28-11-2015 21:00 - Le Corbusier du désert dessine Nouakchott

Le Corbusier du désert dessine Nouakchott

Génération Indépendances - Mon ami José Javier Legarra (JL), cet espagnol mordu de Mauritanie, ou plutôt ce mauritanien venu un jour d’Espagne, vient de me faire une nouvelle surprise en me dédicaçant, en avant première, son livre de type inédit dans notre pays : « Nouakchott انواكشوط ».

La précédente avait eu lieu lorsque JL m’avait offert, en juin dernier, de préfacer cette remarquable œuvre. J’avoue que j’avais été alors surpris, tout en éprouvant un sentiment de fierté difficilement dissimulable.

Surpris, que son choix se soit porté sur moi, parmi sa pléiade d’amis dont la volubilité est inimitable et la verve percutante et irrésistible. La fierté, grâce à l’opportunité qu’il m’offrait, généreusement, pour laisser mon empreinte sur cette lecture réaliste et objective qu’il a faite, de façon méthodique et attentive, de ce qui était mon pays, et est devenu aussi, depuis quelques bonnes années, le sien, autrement dit le nôtre.

En effet, celui qu’on peut appeler « Le Corbusier du désert », architecte de son état, artiste perfectionniste par son style, spontanément humaniste et viscéralement généreux de nature, était tombé, très tôt, sous le charme de la Mauritanie. Et, depuis lors, il l’a adoptée.

Il a commencé son œuvre à Ouadane, ville enclavée dans les méandres du Nord désertique du pays et classée patrimoine de l’Humanité par l’UNESCO. En s’appropriant les problèmes de ce site historique, il y a fait montre d’un sérieux, d’un engagement, d’une originale créativité et d’une singulière inventivité qui lui ont valu d’être désigné « Citoyen d’honneur de Ouadane ».

Depuis lors, il fait grand honneur, non seulement à Ouadane qui l’a adopté, mais à toute la Mauritanie dont il fait désormais partie valorisante du patrimoine. Ce pays qu’il a tant aimé et qui, malgré l’hospitalité légendaire, ne saurait le lui rendre équitablement.

Cette tâche devient d’autant plus difficile que les illustrations rassemblées dans le remarquable recueil qu’il met à notre portée, nous livrent le décryptage de la vie des mauritaniens par un observateur averti, d’une grande délicatesse, très attentionné et bien intentionné.

Nouakchott, telle que vue, à juste titre, par JL, est la Mauritanie en abrégé. Elle est habitée par près du tiers de la population du pays. Un peuplement, pour la plupart, venu à cause de l’exode rural résultant des sévères sécheresses cycliques qu’a connues la Mauritanie ces dernières décennies.

Une sédentarisation dans l’urgence, et malgré soi, qui a impliqué une transposition, partielle mais apparente, du mode de vie nomade de tous dans le cadre citadin. Chacun était venu de n’importe où et n’importe comment. Qui avec son reliquat de chèvres, qui avec son âne.

Ce qui a créé une situation dichotomique où les rutilantes grosses cylindrées côtoient, parfois non sans anicroches, les charrettes à traction asine. Aussi, les villas cossues s’accommodent, tant bien que mal, du voisinage, parfois très immédiat, des tentes et baraquements à la limite de l’insalubrité.

Nouakchott est aussi une ville qui se trouve ‘’bousculée’’ par un irrésistible océan de désert vers une mer qui, apparemment, n’en veut pas, et l’exprime à travers son érosive – pour ne pas dire ‘’agressive’’- salinité. D’où des lagunes qui freinent les ambitions de certains promoteurs immobiliers, et d’autres qui enclavent des quartiers déjà habités.

Nouakchott est une ville énigmatique. Elle a la particularité et la richesse de vous dévoiler d’elle une nouvelle facette tous les jours. C’est sur ces paradoxes, et tant d’autres, que mon ami José Javier Legarra a tenu à interpeller votre attention.

Il pouvait le faire à travers l’écrit. Je peux attester qu’il en a la capacité. Il avait la latitude -et il sait le faire avec son magnifique appareil- de rassembler un grand et sublimissime Album Photos de Nouakchott.

Le premier choix ne lui aurait pas permis de faire parvenir fidèlement le message qu’il voudrait véhiculer. Il n’est pas homme à ignorer que s’il est au pays au million de poètes, il est aussi dans une nation à tradition orale, au sein de laquelle le taux d’analphabétisme, malheureusement, est encore assez élevé.

La seconde méthode aurait été, pour lui, « une opération de Toubab », comme il aime appeler les gestes peu compatibles avec les mentalités autochtones.

Ici, on n’apprécie pas, nécessairement, ceux qui arborent leurs appareils photos. Ils sont considérés comme des touristes, et ces derniers sont perçus comme des randonneurs dédaigneux, venant se gausser du retard des visités.

Il a opté, et c’est conforme à sa nature, pour sa voie à lui. Celle de l’originalité qui lui sied bien et toujours : le dessin. Ainsi, il donne, à travers ses dessins, à ceux qui n’ont jamais vu Nouakchott, une exceptionnelle opportunité d’y faire une escapade sans grands frais.

Il offre aussi, à ceux qui y habitent, la possibilité de mieux apprécier une infinité de subtilités, d’incongruités, d’anachronismes et d’exotismes, qu’ils n’ont pas eu le temps d’apprécier, pressés qu’ils sont par les contingences d’un quotidien qui, parfois, ne vous permet pas d’adapter votre rythme à votre vouloir.

Ce travail immense, dense, profond, méthodique, qui révèle un génie exceptionnel et traduit une culture encyclopédique a été réalisé par son auteur, le plus simplement du monde.

Un jour férié, il se déplaçait, le plus souvent par pur hasard, vers un quartier de la ville, à la chasse d’une vue saisissante ou intrigante, avec armes et bagages. Ces derniers – n’en prenez pas des frayeurs – ne sont qu’un carnet miniature, un crayon, un taille-crayon et une gomme. On dirait un écolier.

Mais c’est d’une main de maître, en promenant son regard percutant et subtil, entre ‘’sa proie’’ et le papier, et suite aux va et vient de sa pupille, qu’il va nous transcrire, grâce à la dextérité et l’habileté de ses doigts, avec une fidélité effarante, et une qualité épatante, chacun des dessins que vous aurez, je n’en doute pas, un grand plaisir à décrypter.

Mon ami José Javier Legarra aurait pu faire les maquettes de grandes bâtisses, grâce à ses compétences avérées d’architecte, il aurait également pu peindre des tableaux à la Picasso ou à la Dali, comme son exceptionnel talent l’y autorise. Il n’a fait ni l’un ni l’autre. Il a préféré rester au niveau de la Mauritanie, ce pays qui l’a adopté, dont il est citoyen d’honneur, et à qui il fait, lui-même, et fera, pour toujours, un grand honneur.

Il est compréhensible, vu qu’il fait partie du patrimoine national, qu’il choisisse, entre diverses options offertes, de présenter son œuvre au Musée national le vendredi 04 décembre 2015 à 19 heures.

Il veut que sa promotion, comme son objet d’ailleurs, demeurent accessibles à tous les publics. Son objectif majeur et son souci principal sont de toucher le maximum d’hommes de culture, de la presse, de citoyens simples, ainsi que les génies en herbes, nos merveilleux et adorables élèves et écoliers.

Debellahi ABDEL JELIL



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