20-08-2017 13:54 - En Mauritanie, une dérive autoritaire qui inquiète la communauté internationale

En Mauritanie, une dérive autoritaire qui inquiète la communauté internationale

La Tribune Afrique - Sous pression économique et politique avec le resserrement de la marge de manœuvre budgétaire, la crise alimentaire, et la récente fronde de l’opposition rejetant le projet de réforme constitutionnelle passée au forceps à travers un référendum contesté,

la Mauritanie du Général Ould Abdelaziz semble avoir franchi un nouveau cap autoritariste avec l’arrestation d’un sénateur emblématique et populaire, Mohamed Ould Ghadda, dans des conditions mystérieuses qui rappellent les heures les plus sombres du pays.

« Kidnapping ». Le mot est lâché dès les premières heures qui ont suivi l'arrestation du sénateur Mohamed Ould Ghadda, il y a plus d'une semaine, sans que personne ne sache où les forces de sécurité l'ont emmené pendant plusieurs jours, jusqu'à ce que le parquet annonce son inculpation vendredi soir pour des « crimes transfrontaliers et des actes visant à perturber la sécurité et la tranquillité publique ».

Opposant farouche au régime de Ould Abdelaziz, adversaire déclaré du projet de réforme constitutionnel visant à supprimer le Sénat, Ould Ghadda est devenu au cours des derniers mois la figure de proue de la Mauritanie qui s'oppose au Président.

Et le moins qui puisse être dit, c'est que Ould Abdelaziz lui rend bien ce statut particulier de premier opposant, quitte à convoquer les fantômes du passé. En effet, dès l'arrestation du sénateur - la seconde en deux mois- un certain nombre d'observateurs n'ont pu s'empêcher de faire le rapprochement avec les pires heures de la Mauritanie, celle des « visiteurs du soir », où les opposants étaient enlevés de nuit, emmenés vers des destinations inconnues, certains d'entre eux disparaissant définitivement.

Un référendum qui a creusé les fractures sociétales

Selon une source haut placée proche de la Présidence de la Mauritanie, contactée par La Tribune Afrique, cette « crispation du régime et cette dérive autoritaire est à mettre sur le compte des récents revers politiques de Ould Abdelaziz, qui a été contraint à recourir au référendum pour faire passer sa réforme constitutionnelle, après que celle-ci aie été rejetée par le parlement. »

Toujours selon cette même source « Le Président sait qu'il est devenu clivant au sein même des grandes familles mauritaniennes, et la pression très forte exercée pour faire passer le référendum a généré de profonds stigmates chez les grandes tribus mauritaniennes, qui ont toutes au moins un sénateur en leur sein. En supprimant le Sénat, il s'est attaqué aux fondements de l'architecture sociale complexe de la Mauritanie, et s'est coupé de ses bases ».

Paris et Washington inquiets, craignent une évolution à la « Maduro »

Cette radicalisation du système mauritanien n'inquiète pas uniquement les grandes familles mauritaniennes, mais aurait également alerté les grandes puissances, dont la France et les Etats-Unis, qui regardent d'un œil circonspect les dernières évolutions dans le pays. Sur fond de crise économique profonde en Mauritanie, et notamment de crise alimentaire alarmante , Paris et Washington craignent en effet que le régime ne suive le même chemin que le Venezuela de Maduro, en intensifiant la répression contre l'opposition et en tentant d'élaborer une nouvelle architecture institutionnelle qui permettrait au Président de marginaliser totalement l'opposition.

Dans cette configuration, selon un haut diplomate du Quai d'Orsay : « Aziz ouvrirait la voie à un artifice qui lui permettrait de prétendre à un troisième mandat, en invoquant par exemple l'excuse selon laquelle la constitution actuelle, amendée, n'est pas celle sous laquelle il a été élu, et qu'en quelque sorte, les « compteurs sont à zéro » et il peut se présenter à nouveau. L'argument est spécieux, mais en absence d'opposition, il peut demander à ses partisans de le défendre. »

Selon des informations fiables parvenues à La Tribune Afrique, des contacts discrets entre Nouakchott et Washington au sujet du sénateur emprisonné auraient déjà été entrepris, les américains poussant les mauritaniens à « sortir par le haut » et à accorder la liberté conditionnelle à Ould Ghadde. L'oncle Sam se serait toutefois fait opposer une fin de non-recevoir de la part du maître de Nouakchott.

Par La Tribune Afrique



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Commentaires (4)

  • lass77 (H) 21/08/2017 22:21 X

    Je ne fais que rappeler l'hypocrisie de la France et des USA. Oui une injustice ne se répare pas par une autre injustice , c'est pourquoi c'est un cercle vicieux, notre religion ne l'encourage pas. Le cas Mauritanien est une immense épreuve pour toutes les victimes des injustices. Il faut frémir nos coeurs quand on a des dirigeants( gouverneurs) injustes et cruels. Les Mauritaniens devraient faire attention à ce que disent les savants de l'islam sur des dirigeants injustes face à leurs peuples. Attention à la fitna sur ce point. Patience

  • Lebatmohamed (H) 21/08/2017 09:43 X

    Lass77, Une injustice ne peut pas justifiée une autre. C'est parce que l'on s'est tu sur les crimes commis contre les negromauritaniens que le régime se permet de réprimer et d'emprisonner qui il veut en toute impunité . MartinNiemöller disait: "Quand ils sont venus chercher les communistes, je n’ai pas protesté parce que je ne suis pas communiste. Quand ils sont venus chercher les Juifs, je n’ai pas protesté parce que je ne suis pas Juif. Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai pas protesté parce que je ne suis pas syndicaliste. Quand ils sont venus chercher les catholiques, je n’ai pas protesté parce que je ne suis pas catholique. Et lorsqu’ils sont venus me chercher, il n’y avait plus personne pour protester. »

  • a.bennan (H) 20/08/2017 23:48 X

    Manchette ou tract?? "tribune Afrique"c' quoi??Le pays est beaucoup plus robuste que tu ne le lui souhaite...petit journaleux de merde.Que mensonges de À a Z.

  • lass77 (H) 20/08/2017 21:39 X

    La situation au Venezuela n'a rien de comparable avec la Mauritanie.En revanche l'inquietude de ses pays hypocrites tels les USA et la France est une diversion.Le sort de cet ex-senateur n'a rien à envier à ces centaines des milliers de negromauritaniens que pourtant ces deux pays maitrisent.