22-01-2019 00:00 - Note de lecture: Bottaari ngari dutal, la bravoure, une vertu innée

Note de lecture: Bottaari ngari dutal, la bravoure, une vertu innée

Initiatives News - La lecture de l’essai anthropologique de Diouldé Niaye Dieng, BOTTAARI NGAARI DUTAL, nous renseigne, suffisamment et de la manière la plus experte, sur une des multiples formes d’éducation du jeune peul, en l’occurrence le « Ceddo JAAMBARO ».

En effet, il faut le rappeler, le Fouta a connu plusieurs mutations sociologiques consécutives aux événements historiques (guerres, invasions, colonisations, aléas climatiques, tactiques stratégiques) qui ont fini par façonner un individu, un type psychologique tel qu’il apparaît dans cet illustre essai.

On est tenté d’affirmer, sans risque de se tromper, que la bravoure du jeune guerrier Ceddo Serait le résultat d’un long processus de cristallisation d’une douleur collective, d’une expérience historique complexe ressentie au plus profond de l’être.

Autrement dit, le Ceddo est déjà un homme complet à sa naissance, en dehors même des rites qui l’accueillent au monde, puisqu’ il est détenteur d’une information génétique qui le prédestine à la bravoure, « au courage et à l’ardeur au combat ». Recroquevillé dans le ventre de sa mère, le bébé Ceddo entend miraculeusement l’air du GUMBALAA.

« Il tait sa douleur pour exhiber sa fierté »

Ce même GUMBALAA dit à la page 71 : « la seule richesse du Ceddo, c’est d’être venu au monde muni d’un cœur de pierre, un cœur si dur et si compact que les flèches de la peur n’arrivent pas à transpercer. » on voit clairement les prédispositions prénatales du Ceddo à la hardiesse et à l’intrépidité. Il est déjà « taureau qu’il ne faut chercher à encercler, le caïman qui se défie des menaces, l’hippopotame qui ne fait la différence entre jeu et simulacre ».

On comprendrait alors pourquoi le jeune Ceddo arrive à subir les épreuves les plus monstrueuses possibles sans pousser le moindre gémissement. Voilà qui renseigne sur l’insouciance du guerrier dans la souffrance. Il tait sa douleur pour exhiber sa fierté, il cache son désarroi pour éviter la honte et l’abaissement. La peur qui reste une nature difficile à masquer est une sensation inconnue de lui.

On pourrait affirmer ceci : on ne devient pas un Ceddo par l’éducation seule, mais par l’éducation, on amène le Ceddo à découvrir ce qu’il a en lui-même et qui le différencie des autres : le dévouement, la bravoure, l’agilité. Dioulde Niaye DIENG nous transporte magnifiquement dans un univers épique que les non-avertis pourraient tenter de remettre en question. Son essai, son beau livre s’inscrit en parfaite harmonie avec cet état de fait.

L’éducation du jeune guerrier Ceddo qui consiste à le mettre à l’épreuve de la douleur, de la honte et de la mort, est un prétexte que la conscience collective a ingénieusement trouvé pour réveiller en lui ce qu’il traîne dans son sang depuis la nuit des temps. Le poids de l’éducation est certes capital, mais l’éducation à la bravoure et à l’intrépidité serait vaine n’eût été la charge génétique qui prédestine le Ceddo à ces différentes valeurs.

Le guerrier est donc un homme intègre qui s’intègre parfaitement dans cette dynamique sociale où le souffle principal ne serait autre que l’exploit, la noblesse et le dévouement.

Aujourd’hui, nous vivons dans un monde où les vertus sociales semblent perdre de leur substance. Mais qu’on ne se méprenne pas. Le Ceddo est malgré tout demeuré ce qu’il était. A l’entendre s’exprimer dans les réunions publiques, à l’observer dans les rencontres communautaires, on décèle sans trop de peine cette fierté antique, cette noblesse de cœur et cette grande abnégation.

Il reste toujours cet homme qui affiche une colère terrible face à la provocation. Il reste « ce guerrier qui, quand il rugit au nord, se fait entendre au sud ; celui qui, quand il se manifeste, on enferme chèvres et moutons, comme devant le lion. » P71 Il traine toujours avec lui ce goût du risque puisqu’il a confiance en lui. Il est celui qui donne toute sa fortune contre un simple éloge, une simple louange pour paraphraser notre illustre essayiste.

L’essai de M. Diouldé Niaye Dieng n’est pas un texte qui rappelle les temps glorieux de la communauté Ceddo. Ce n’est pas le récit d’un passé qui n’est plus. C’est plutôt un travail qui demeure très actuel eu égard au conservatisme indiscutable du Ceddo de son être, dans sa singularité, dans son caractère et pour finir dans son énergie !

Kane Ismaila Demba

isoka1@hotmail.fr



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Commentaires (2)

  • doubango (H) 22/01/2019 23:17 X

    Mukhabarat, tu n'es qu'un aigri. Les ceddo anciens esclaves, cela fait rire. La noblesse et la dignite n'ont pas debute en 1776.

  • moukhabarat (F) 22/01/2019 11:43 X

    La douleur du Ceddo ne viendrait-elle pas de son statut antérieur d'esclave avant d’être guerrier??