02-08-2019 12:33 - Leïla Bouamatou: banquière, fille de son père et femme de son continent

Leïla Bouamatou: banquière, fille de son père et femme de son continent

RFI - Leïla Bouamatou est directrice et administratrice de la Générale de banque de Mauritanie (GBM), l’un des principaux établissements du pays, fondé par son père. Leïla Bouamatou revendique l’héritage de son père, figure de l’opposition, mais place son engagement au service de l’émergence des femmes en Afrique.

Leïla Bouamatou est la première femme à diriger une banque dans son pays.

Depuis qu’elle a pris les rênes de la Générale de banque de Mauritanie, l’année dernière, à seulement 35 ans, Leïla Bouamatou a amorcé la digitalisation de l’établissement, l’a ouvert aux petites et moyennes entreprises, et a créé une filiale consacrée à la finance islamique.

Cette banque, c’est son père, Mohamed Ould Bouamatou, l’une des plus grandes fortunes du pays, qui l’a fondée il y a près de vingt-cinq ans. Leïla Bouamatou est fière de son père, mais elle ne veut pas lui devoir sa carrière. Alors elle étudie et elle voyage : école de commerce en Suisse, master en Espagne, doctorat aux États-Unis.

Leïla Bouamatou est née avec des facilités, mais elle ne s’en est pas contentée. « L’un des défis les plus importants pour moi, confie la jeune dirigeante, c’était de ne pas être vue juste comme la 'fille du patron'. J’ai essayé à tout prix de grimper les échelons, petit à petit. Je dois ma réussite à ma détermination. Pour mériter sa place, il faut se faire respecter. »

« Je voulais faire de l’architecture ! »

Leïla Bouamatou veut réussir par elle même, mais elle ne renie pas l’héritage de son père, dont elle se dit extrêmement fière. D’ailleurs, c’est bien lui qui a influencé ses choix professionnels. Depuis le début.

« Moi je voulais faire de l’architecture !, se souvient sans regret la banquière, mais il m’avait conseillé de faire de la finance parce que c’était beaucoup plus intéressant.

Et de le faire en anglais. Il m’a dit “tu sais ma fille, dans dix ans, si tu ne parles pas anglais, tu seras l’analphabète du siècle.” J’ai suivi ces conseils et j’ai fait tout mon cursus en anglais. » Leïla Bouamatou se forme ensuite au sein du cabinet d’audit Deloitte en Tunisie, puis à la BMCE à Londres.

« Et puis mon père m’a demandé de rentrer parce qu’il avait besoin de mon aide... c’était au moment où je m’apprêtais à signer un contrat de rêve à Londres. » Contrat de rêve d’un côté, papa de l’autre, le combat est inégal... À la demande de son père, Leïla Bouamatou revient dans le groupe familial en tant que trésorière, en 2008. Dix ans plus tard, elle est nommée directrice.

« L’Afrique a besoin de modèles de femmes »

Le père de Leïla Bouamatou, Mohamed Ould Bouamatou, n’est pas seulement un homme d’affaires. Cousin et soutien de l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz, le père de Leïla Bouamatou est ensuite devenu l’un de ses plus farouches opposants. Il vit aujourd’hui en exil à Bruxelles. Leïla Bouamatou, elle, préfère éviter de parler politique.

Ce n’est pas son combat. En tout cas, pas pour le moment. Son engagement, elle le met au service des femmes. « L’Afrique a plus que jamais besoin de modèles de femmes, pose la directrice, surtout en matière d’entrepreneurship et de leadership, pour encourager des jeunes filles et des femmes à aspirer à des positions de premier rang comme nous.

Je suis arrivée à ce que je voulais, donc mon objectif c’est de tirer d’autres femmes vers le haut. » Une démarche qui tient aussi du sentiment de gâchis que Leïla Bouamatou a pu éprouver tout au long de ses études puis de sa carrière : « j’ai vu beaucoup de jeunes filles intelligentes, talentueuses, compétentes, reculer devant des postes tout simplement parce qu’elles se sous-estimaient et qu’elles manquaient de modèles de femmes. C’est dommage pour elles, pour la société et surtout pour le continent africain. »

Les traditions, une force libératrice

Leïla Bouamatou parle d’autorité : le magazine Forbes l’a classée l’année dernière parmi les 10 personnalités africaines de moins de 40 ans les plus talentueuses.

Et pour construire son modèle, Leïla Bouamatou a dû commencer... par la racine : « l’un des défis qu’il a fallu surmonter, pour moi et certainement pour d’autres femmes africaines, c’est de se détacher des perceptions, des coutumes, des normes qui confèrent à la femme un rôle subalterne.

En tant que femme africaine, je pense que nous ne devons pas accepter que ces traditions africaines soient exploitées pour incarner la domination de l’homme. Au contraire, ces traditions doivent être utilisées comme une force libératrice, un catalyseur, afin de promouvoir le leadership des femmes africaines. »

Sa melhfa, le voile traditionnel mauritanien, la couvre des chevilles jusqu’au visage, lorsque Leïla Bouamatou prononce ces paroles.

Car sa religion et ses traditions, cette mère de deux enfants les assume. Elle les vit. Elle en fait même un outil au service de l’émergence des femmes africaines. Une question d’égalité et, préciserait la banquière, un investissement forcément rentable pour le continent.



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Source : RFI Afrique
Commentaires : 7
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Commentaires (7)

  • Thiedo56 (H) 05/08/2019 04:39 X

    (***) ne vous vantez pas de ce que vous êtes car le chemin vous est déjà tracé depuis votre enfance...Pauvre Mauritanie.

  • khaledwalid (H) 02/08/2019 21:37 X

    RFI fait dans le people? Grosse déception de voir ce média de référence "vendre" cette fille à papa. Attention à la marche ....la fille de SIDIOCA a causé la perte de son father avec ses rodomontades.

  • mdmdlemine (H) 02/08/2019 16:00 X

    je tire à Leila le chapeau pour avoir tenu 10 ans dans un système qui a incontestablement rayé la GBM du cycle économique national, lui infligeant des impôts surelevés, la privant de marchés et de domiciliation de salaires 10 ans sans s'immiscer dans la politique, se consacrant aux affaires Leila aurait réalisé des exploits plus importants si son savoir-faire avait évolué dans un environnement transparent et non hostile Mille bravos Le mieux est de la nommé dans le gouvernement pour faire profiter son expérience riche au pays

  • wael06 (H) 02/08/2019 14:42 X

    C est facile a réussir quand son daron a sucé le sang des pauvres mauritaniens et lui a payé des études de qualité alors que les enfants des pauvres n arrivent pas à prendre les 3 repas par jour s' il vous plait respectez nos consciences au nom du professionnalisme journalistique car ces genres des personnes ne sont pas des exemples à présenter cependant je la trouve un peu prétentieuse " j avais le choix entre une belle carriere en ANGLETAIRE et le retour avec la famille hhhh ca me fait doucement rire travailler à london n est pas une belle carrière j en connais des tonnes des africains qui y travaillent et qui ont demissionné , si j etais a votre place et pour faire une belle carrière comme vous prétendez j aurais fait une carrière en medecine en vue d aider les pauvres de mon pays avec les moyens finaciers que vous avez c est jouable breffffffffffffffffffffffffffffff

  • sraghaa (H) 02/08/2019 13:24 X

    Elle a fourni tant d'efforts pour se forger une place par elle-même et elle constitue l'aide la plus importante pour son père . Son cas doit être pris en exemple par les femmes Mauritanienne .

  • rimneutre (H) 02/08/2019 12:56 X

    La Mauritanie sort de son retard par rapport à d’autres pays africains qui ont des femmes qui occupent les premiers rangs dans l’entreprenariat. Nous sommes tous fiers d’avoir une femme d’une telle dimension académique et professionnelle. Qu’Allah accompagne cette jeune femme qui confirme l’adage qui dit que tel père….. telle fille. Rimneutre

  • synthetiseur (H) 02/08/2019 12:40 X

    Avec le retour bientot de son père au pays, cette femme doit se libérer des charges financiere et de gestion pour faire de la politique;Je suis convaincu qu'elle a un bel avenir devant elle.Bon vent Leila.