... et au parlement en faveur de la femme mauritanienne.
Une boutade qui résume parfaitement l’engagement féministe de cette ancienne ministre de la Protection de la Famille et des Affaires sociales sous le régime de Ould Daddah en 1975.
Madame Aïssata Kane est aujourd’hui à la retraite, consultante internationale et présidente de l’Association Internationale des Femmes Francophones. Elle doit cette riche expérience d’abord à son militantisme politique dès les premières de l’indépendance en 1960 au premier parti de la Mauritanie le PPM (Parti du Peuple Mauritanien) où elle a occupé d’importantes responsabilités et dirigé même un magazine féminin « Mariémou ».
Et ensuite pour ses actions féministes qui dépassent les frontières dans un pays islamique où la femme peine à recouvrer ses droits d’égalité avec l’homme. C’est sur ce double regard qu’elle s’est prêtée à nos questions en s’abstenant volontairement de répondre sur les évènements de 89, les événements récents de Kaédi et la situation politique actuelle dont elle n’a pas la réponse et surtout pour des raisons qui dépassent ses compétences.
L’école française pour les filles de chef
Je suis
Aïssata Kane et je suis de
Dar El Barka dans la région du
Brakna en
Mauritanie. Je suis née le 9
Moharam 1359 correspondant à l’année 1938 du calendrier grégorien. J’ai fait ma scolarité primaire et secondaire à
Saint-Louis capitale du
Sénégal de la
Mauritanie à l’époque.
Ensuite je suis allée à Bruxelles où mon mari
Moctar Touré était fonctionnaire français au marché commun. Disons qu’à cette époque nous étions français de nationalité. Nous sommes rentrés à
Nouakchott après la proclamation de l’indépendance en novembre 1960.J’ai été chargée de l’encadrement des premières filles du secondaire au cours complémentaire des jeunes filles de
Nouakchott, ancêtre du lycée de jeunes filles.
En quoi votre éducation de base a –t-elle influencé votre parcours?
Mon éducation est l’éducation traditionnelle du Fouta. Fille de Mame ndiack Elimane Abou Kane chef de canton du Tooro Halaybé de 1923 à 1976, j’ai reçu une éducation traditionnaliste du Fouta. Au départ je n’étais pas destinée à être une femme lettrée tout comme les filles de mon époque. La bonne inspiration est venue de mon père de mettre ses filles à l’école malgré une forte opposition de son entourage (parents, amis…). Mais c’est surtout la bonne qualité de mes notes qui a encouragé mon père à me laisser franchir l’étape du primaire vers le collège.
J’ai été soutenu dans cette démarche par deux frères Feu Mame Ndiack Seck et Feu Elimane Mamadou Kane et ma sœur Aminata Kane. Je rend au passage un vibrant hommage à ces trois personnes qui m’ont été d’un soutien inestimable dans mon parcours. Aujourd’hui je suis mère de 5 enfants. Je suis actuellement à la retraite associative et membre de beaucoup d’associations féminines à travers le monde
Première femme ministre
Comment en êtes venue à la politique ?
Je suis entrée en politique au sein du parti du peuple mauritanien (PPM). D’abord comme membre du Conseil supérieur des Jeunes ensuite au Conseil supérieur des Femmes permanentes de l’institution puis présidente de ce même conseil de 1971 à 1978. A ce titre je siégeais au bureau politique national avec rang de ministre. J’ai été durant cette époque directrice de la revue « Mariemou » ( magazine de la femme mauritanienne).
En 1975 je suis devenue membre du gouvernement comme Ministre de la protection de la famille et des affaires sociales. Quand il y a eu le coup d’Etat militaire en 1978 j’ai quitté la Mauritanie pour intégrer le Mouvement Associatif Féminin International de l’organisation panafricaine de la femme ( OPF)au centre de recherche pour la femme ( CEA Addis Abeba) en Etthiopie. Je fus choisie par plusieurs organismes comme consultante sur les problèmes de femme de société, de développement social, du droit humain en général et du droit de la femme en particulier.
J’ai eu l’initiative de fonder avec d’autres, l’Association Internationale des Femmes Francophones dont j’ai l’honneur d’être la présidente. Cette association regroupe des femmes et des organisations de femmes de l’espace francophone et d’autres femmes qui ont adhéré à l’association et dont les pays ne sont pas de l’OIF comme par exemple le Kenya, l’Ethiopie , la Gambie, l’Algerie etc…
C’est ainsi que vous avez occupé un poste ministériel sous le régime de Ould Daddah. Comment avez-vous vécu cette responsabilité aux premières heures de l’indépendance de la Mauritanie ?
J’ai fini ma carrière ministre et je crois que j’ai rempli ma mission de ministre et c’est aux autres de me juger.
Auriez-vous accepté ce poste en 78 après le premier coup d’Etat militaire qui a renversé le président Ould Daddah ?
Je n’aurai pas accepté parce que je faisais partie des personnalités suspendues de la politique en Mauritanie par contre à l’extérieur j’ai accepté plusieurs postes de responsabilité. J’ai présidé l’Union Internationale des Organismes Familiaux puis l’Organisation panafricaine de la Famille etc Organisation panafricaine de la femme.
La femme mauritanienne citoyenne à part entière
En tant que consultante quelle est la place et le rôle de la femme mauritanienne aujourd’hui dans le développement du pays ?
Faire prouver sa capacité de citoyenne à part entière de mère de famille de qualité et de travailleuse consciente et capable exigeant des autorités égalité de compétence et égalité de responsabilité.
Est-ce qu’on peut dire que les femmes mauritaniennes sont suffisamment impliquées dans la vie politique et économique 53 ans après l’indépendance du pays ?
Elles sont impliquées mais très peu nombreuses à être nommées à des postes de hautes responsabilités.
Si vous étiez ministre en 2013 quelles lois penseriez-vous que le parlement devrait voter pour les femmes ?
J’aurai fait voté une loi instituant un quota aux femmes sur tout le système des nominations, des élections et sur les concours et examens, un quota minimum pour les filles et les femmes.
Baba Kane
Membre actif de
Cridem et journaliste à
Rouen (
France)
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