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08-08-2017

20:00

Libre-échange : quand l'Union du Maghreb arabe s'éveillera...

Le Point - Le commerce entre les cinq pays de l'UMA ne représente que 3 % de leurs échanges globaux, ce qui en fait la région la moins intégrée au monde.

Sur le papier, ça sonne bien. Cinq pays : Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Mauritanie – ayant trois points communs : la langue, la religion et leur histoire (passé colonial notamment). De quoi disposer d'une région forte, intégrée, prospère, ayant un destin commun. Ce n'est pas le cas.

Le 17 février 1989, le quintette de chefs d'État signait le traité instaurant l'Union du Maghreb arabe. Objectifs : fraternité, progrès des sociétés, préservation de la paix, ouverture progressive à la liberté de circulation des personnes, des services, des marchandises, des capitaux… Une sorte d'Union européenne en Afrique du Nord. Ou d'Alena, de Mercorsur

Les cinq chefs d'État ne se sont plus réunis depuis la création de l'UMA. Sur son site internet, on trouve des données socio-économiques datant de 2007. Une occasion ratée, qui coûte un à deux points de croissance à chacun des pays concernés. Certains rapports estiment qu'une véritable UMA apporterait une valeur ajoutée de plusieurs milliards de dollars à chaque pays.

Un récent rapport mené par une commission du Sénat français sur l'Algérie et l'Union européenne, sous la houlette du sénateur Simon Sutour, pointe au détour d'un paragraphe la tragique faiblesse « des échanges commerciaux entre les cinq pays de l'UMA », « échanges commerciaux qui ne représentent que 3 % de leurs échanges globaux ». Au lieu de construire un avenir commun, certains pays campent sur une logique purement nationale et privilégient les relations économiques avec des partenaires étrangers, l'UE notamment. Les relations tumultueuses entre Rabat et Alger, pour cause de conflit sur le Sahara occidental, sont marquées par une fermeture terrestre de la frontière entre les deux pays depuis 1994.

Difficile de bâtir un marché économique régional lorsque deux nations ont des rapports aussi tendus. Plus récemment, la Mauritanie a fermé ses frontières, pour des raisons sécuritaires, avec l'Algérie mi-juillet. Décision qu'Alger n'a, litote, guère goûtée. Difficile dans ce climat de bâtir une zone de libre-échange dotée d'une union douanière. À plusieurs reprises, la Tunisie a tenté de relancer ce projet. Sans réel succès faute de volontés politiques dans les cinq capitales. De plus, la crise libyenne met de côté un des cinq acteurs. Quant à l'autoroute transmaghrébine qui doit relier 55 villes, soit 50 millions d'habitants, elle n'est que parcellaire. Le tronçon Maroc-Algérie demeure une vue de l'esprit.

Si l'Afrique du Nord pèse sur l'échiquier politique et médiatique, on ne le doit pas à sa coopération économique entre pays voisins. Certes, l'Algérie et la Tunisie entretiennent de bons rapports et pourraient former un tandem moteur. Mais la situation politique algérienne – avec un pouvoir qui se bunkerise – n'encourage pas les efforts menés par la Tunisie. Ainsi du projet de zone de libre-échange développé depuis 2014.

Certes, ils sont près d'un million d'Algériens à s'être rendus en Tunisie (chiffres office national du tourisme tunisien au 20 juillet) cette année. Mais les échanges commerciaux de l'Algérie avec ses partenaires de l'UMA ne représentent qu'une poignée de milliards de dollars, chiffres trois fois inférieurs à son commerce avec l'Espagne ou l'Italie. Cette absence d'Union du Maghreb permet de rêver au jour où cette région s'éveillera économiquement. Que le Marocain, le Tunisien, l'Algérien, le Mauritanien et l'Algérien puissent se mouvoir à leur guise à l'intérieur de cette région. Qu'ils puissent commercer, voyager sans barrière, acquérir une propriété…

Ce jour-là, une partie des problèmes économiques et sociaux de cette région sera réglée. Mais pour cela, il faut une volonté politique commune. Ce qui relève du sacerdoce…

Le Point Afrique



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