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12-09-2017

21:30

La furie du ciel dans la commune de Boghé

Journal Le Terroir - Dans la nuit du lundi au mardi 5 septembre, comme pour surprendre les populations dans leur sommeil profond, le ciel s’est déchaîné. Il y eu tempête, tonnerre, pluie, éclairs et feu.

Il s’en est suivi 9 décès, une trentaine de blessés dont certains graves, des maisons écroulées, des zincs volatilisés à la va où je ne veux, cheptel électrocuté, oiseaux calcinés, arbres déracinés, ébranchés et rameaux pulvérisés.

Plusieurs paramètres physiques ont concouru à ce drame : la pression, l’engouffrement et la vitesse du vent d’une part, la hauteur des constructions, le poids de l’argile et sa plasticité d’autre part. L’énergie potentielle et l’énergie cinétique étaient au rendez-vous. L’hypothèse d’une foudre n’est pas à écarter : une perturbation d’ondes électromagnétiques pourrait être à l’origine de cela.

N’eût été l’ouverture du circuit électrique instantané, la situation allait être encore plus chaotique : des dizaines de pylônes avec du fer de diamètre 8 dont la résistance est aujourd’hui très douteuse portant des fils de haute tension de l’électricité de Manantali se sont cassés et d’autres ont perdu leur verticalité notamment entre Boghé et Thialgou dans le casier pilote de Boghé.

La dépression a été de direction est-ouest et a emprunté un couloir allant de Béli Ourdi à la zone de Mboon où elle a atteint son paroxysme, en passant par Mballadji, Douboungué et Tweï Djery. Il faut rappeler que la capacité de destruction est proportionnelle au carré de la vitesse (par exemple si la vitesse est multipliée par 5, la capacité de destruction sera de 25).

Depuis la nuit des temps, l’Homme a tenté d’expliquer les phénomènes naturels. Dans la « cosmogonie » de notre société, le scintillement des étoiles est lié à la mort des hommes surtout quand un astre d’une grande dimension se manifestait, on dressait un parallélisme avec la disparition d’une figure charismatique et les grandes tempêtes à la disparition d’un djinn.

Le rationnel donne d’autres explications : un dérèglement climatique lié au réchauffement de la terre qui lui-même est lié entre autres aux gaz à effet de serre (les chlorofluorocarbures CFC) en plus de la réponse à plusieurs phénomènes environnementaux : déformation de l’écorce terrestre.

Ce que nous appelons l’irrationnel rationnel a déjà prédit l’explication : plusieurs cabales de dévots avaient prédit un malheur imminent et qu’il fallait formuler prières et faire des sacrifices mais hélas ont-ils été entendus ? Il faut oser dire que le banco nous a laissé et sous peu de temps pour les générations futures ce ne sera qu’un lointain souvenir.

Les handicacraft du banco, les spécialistes du « daral » (construction sans briques) se sont sublimés et nous n’avons jamais su avec notre mentalité conservatrice aidant, introduire la latérisation et pourtant les bâtiments en latérite introduits par les colons sont encore là indemnes.

En tout cas, le tout vu et le jamais vu se sont mêlés : la puissance du vent a renversé des charrettes à Beeli Ourdi qui étaient en position statique, le capital de la biomasse végétale éprouvé : des centaines d’arbres notamment Acacia radiana (ciluki) et Balamitesaegytiaca (murtooki) à même le sol avec un géotropisme à l’envers (racines vers le haut et cimes vers le bas).

Après avoir perdu le nord, après cette grande psychose, l’heure est au bilan. L’hivernage de cette année est exceptionnelle : elle a été tardive, disparate dans le temps et dans l’espace. Au moment où il fallait penser à recourir aux pluies artificielles par ionisation des nuages, il y a eu cette catastrophe.

Notre attention a été attirée ces jours-ci à Bakaw par le développement du système foliaire d’un Acacia albida (caski) géant, lui qui perdait ses feuilles pendant l’hivernage et les développait pendant l’été ; phénomène que les scientifiques ont du mal à expliquer.

Il y a eu un élan de solidarité spontané des autorités locales et centrales (déplacement du Ministre de l’intérieur et de bonnes volontés anonymes de la société civile) : il y a eu compassion et apport de moyens financiers. Mais il y a lieu aussi de mettre en place un haut conseil de gestion des catastrophes car mieux vaut prévenir que guérir pour agir en temps réel avec des plans Orsec multiples.

Mais surtout, et c’est là l’essentiel de prier car c’est la Force des forces ; c’est la meilleure garantie de la protection de notre Nation mais aussi de faire des sacrifices : satisfaire les laissés-pour-compte, les orphelins, les handicapés, les étudiants coraniques, les Élus de Dieu.

En tout cas, la terre a été blâmée par le ciel et le corps a été blâmé par l’âme.

Alhousseïnou SY dit SY Aliou
Professeur des Sciences de la nature et directeur du lycée de Bababé



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