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01-02-2018

12:30

Les femmes parlementaires mauritaniennes mobilisées contre la malnutrition

L'Authentique - Aux termes de la journée de mobilisation organisée le mercredi 31 janvier 2018 sous la coupole de l’Assemblée Nationale, les femmes parlementaires, encadrées par des experts du mouvement SUN, entre autres, ont été suffisamment outillées sur la situation alarmante de la malnutrition en Mauritanie.

Savoir par exemple que 75% des enfants et 24 % des femmes en Mauritanie sont en situation grave d’anémie ou que 7 Wilayas sur les 15 et 21 Moughataas sur les 55 que compte la Mauritanie sont dans une situation nutritionnelle d’urgence a suffi pour qu’elle fassent de cette pandémie leur prochaine priorité.

L’Assemblée Nationale a abrité le mercredi 31 janvier 2018 une journée de mobilisation des parlementaires en faveur de la nutrition. Cette manifestation a été organisée par le Réseau des femmes parlementaires (REFPAM) en collaboration avec le mouvement Scan-Up Nutrition (SUN) de Mauritanie.

L’institutionnel s’engage

La cérémonie d’ouverture a été marquée par le mot d’ouverture du Vice-président de l’Assemblée Nationale, l’Honorable député M.Ahmed Yahya Ould Kharchi, qui s’est félicité de l’organisation de cette journée destinée à sensibiliser et à mobiliser les parlementaires contre le fléau de la malnutrition. Il a enfin exprimé la disponibilité des députés à accompagner tout effort de nature à améliorer les conditions de vie des populations.

Auparavant, la présidente du REFPAM, l’Honorable députée Mme Marième Baba Sy a donné un bref aperçu sur la nutrition et ses bienfaits sur le bien-être en général, tout en mettant en exergue la part très faible du budget qui lui est accordée ainsi que l’absence d’une politique d’informations et de sensibilisation des populations sur la malnutrition et ses dangers. Elle a cependant évoqué les efforts importants déployés sur le plan mondial pour lutter contre le fléau et l’engagement des Etats dans ce domaine.

De son côté, Dr.Moulaye El Mehdi Ould Moulaye Zeine, président de la Plateforme du mouvement SUN-Mauritanie de la société civile qui regroupe des ONG nationales et internationales exerçant au niveau local s’est félicité de l’importance que les femmes parlementaires accordent à la question de la nutrition, au point de susciter de leur part une si grande mobilisation malgré un calendrier chargé (Déclaration de politique générale du Premier ministre, plénière prévue le même jour pour la clôture de la session ordinaire du Parlement, après les âpres discussions sur le budget…)

Dr.Moulaye a par la suite procédé à une brève description de son mouvement, qui est né après l’adhésion de la Mauritanie au mouvement SUN international le 19 mai 2011 avec une lettre d’engagement du Ministre des Affaires économiques et du Développement (actuel Ministère de l’Economie et des Finances). Il a par la suite expliqué à l’assistance que la société civile mauritanienne n’est pas restée inactive face au phénomène de la malnutrition et que des initiatives de terrain ont déjà été menées et continuent de l’être. Il a cité en exemple le Projet de renforcement de la résilience mené par son ONG, AMAMI (Association Mauritanienne d’Aide aux Malades Indigents) dans la Moughataa de Koubenni au Hodh Gharbi, en collaboration avec l’Unicef et Echo.

Enfin, Elena Vicario, Coordinatrice d’Action contre la faim, une ONG espagnole présente en Mauritanie depuis 2007 a brièvement évoqué les actions menées par son organisme, en collaboration avec les autorités mauritaniennes, dans le domaine de la nutrition.

Par la suite, les Honorables députées, Mmes Aminata Niang et Habsatou Kane ont donné un bref aperçu du REFPAM qui a été créé en 2013, ses missions, ses objectifs et ses réalisations, avec à l’appui un documentaire sur la caravane qu’elles avaient organisée dans les Wilayas du Trarza, du Brakna du Gorgol et du Guidimagha. Elles déclarent avoir mené une deuxième caravane dans la foulée dans les deux Hodhs, en Assaba, au Tagant. Ces caravanes destinées à s’enquérir sur les problèmes des populations devront se poursuivre selon elles, avec une troisième caravane dès le 4 février 2018 en direction des régions Nord (Adrar, Inchiri, Nouadhibou et Tiris-Zemmour).

Situation nutritionnelle et alimentaire alarmante


Plusieurs communications ont été par la suite présentées, dont l’une sur la Situation nutritionnelle en Mauritanie par le Dr.Barro de l’Unicef, qui a livré les chiffres alarmants de la dernière enquête SMART qui fait ressortir des situation d’urgence dans plusieurs régions et départements du pays, avec des taux de malnutrition aigüe sévère (MAS) et de malnutrition aigüe globale (MAG) au-dessus du seuil d’urgence, respectivement 2% et 15%.

L’insécurité alimentaire en Mauritanie qui touche 370.000 personnes, soit le double des chiffres de 2016, risque selon Mohamed Dah, expert à Action contre la faim, de s’exacerber en cette année particulièrement marquée par un grand déficit pluviométrique et un couvert végétal qui ne pourrait pas suffire au bétail. D’où des tensions qui pourraient naître selon lui, de la concentration excessive des animaux dans les régions sud du pays et des conflits que cela pourrait générer entre éleveurs transhumants et paysans.

La Mauritanie et ses engagements internationaux

Mohamed Ould Bneijara, président de l’ONG ADIG, Point focal au sein du Groupe humanitaire-pays et Secrétaire général de SUN-Mauritanie, est revenu sur les engagements de la Mauritanie par rapport à la santé et la nutrition, citant le Sommet d’Abuja où l’Etat mauritanien s’était engagé à accorder 15% de son budget national à la Santé (il en est à moins de 3%), où quand il s’est engagé à réduire de 40% le nombre d’enfants de moins de 5 ans en retard de croissance ou de 50% le nombre de femmes malnutries, alors qu’il reste encore très loin de ces engagements.

Aujourd’hui, le constat est amer. L’Etat mauritanien fait de la nutrition une affaire qui ne concernerait que l’assistance technique-financière internationale, alors que 2, 7 milliards d’UM par an consacrés à la nutrition, suffiraient selon les experts, à éradiquer ce fléau dans le pays et sauver des milliers d’enfants et de femmes.

Outre le rôle qu’ils jouent dans le maintien des centres de nutrition (au niveau communautaire, dans les centres de santé ou dans les hôpitaux), les partenaires comme Action contre la faim, Wolrd Vision, Oxfam, ou encore Adra, Terre des Hommes, Caritas contribuent par leurs efforts à réduire l’impact de la malnutrition et de l’insécurité alimentaire.

A ce titre, leur présence a été très marquée au cours de la journée de mobilisation et l’Unicef a enfin mis à la disposition des participants le « Plan stratégique multisectoriel de nutrition, 2016-2025 ».

Les femmes parlementaires mauritaniennes, enfin édifiées sur l’ampleur de la pandémie, se sont dites engagées à prendre le combat de la nutrition à bras-le-corps, même si elles regrettent que cette journée soit organisée très tard, après l’adoption du Budget 2018 et après la Déclaration de Politique Générale du gouvernement. Mais surtout, aux lendemains d’un renouvellement des sièges de l’Assemblée Nationale qui devra intervenir au cours de l’année. « Mais, que nous soyons réélues ou pas, nous resterons membres actives du REFPAM qui regroupe non seulement les députées actives mais aussi toutes les anciennes parlementaires » a souligné Mme Marième Baba Sy.

Cheikh Aïdara



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