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12-04-2018

16:45

L’édito de MFO : Mauritanie, le tournant historique

Initiatives News - Qu’on le veuille ou non, la Mauritanie s’apprête à faire le tournant de son histoire.

Si l’on réussit à tenir les rendez-vous de 2018 et s’ils se déroulent dans les normes, il n’y a rien à craindre pour la suite. La société politique, les leaders d’opinion (journalistes, militants actifs et même Imams) sont appelés à réhabiliter la culture du dialogue. L’une des plus grandes maladies sociétales ayant pour symptôme le renversement de l’échelle des valeurs.

Nous avons besoin aujourd’hui – et avant tout – de revivifier le contrat moral qui nous lie, de le plonger au plus profond de nous-mêmes pour le ressourcer.

De la culture de l’empathie, «al inçaaf»

Dans notre culture, il existe un concept que ne recouvre aucun mot ailleurs : «al inçaaf». On peut bien le traduire par le mot «Equité», mais en ajoutant qu’il y a aussi de la Justice, de la Tolérance, de l’Abnégation, de l’Humilité… dans ce mot que nous avons décidé d’utiliser pour dire cette valeur extraordinaire qu’est «al inçaaf». Parce que c’est tout ça en même temps.

On peut et on doit réclamer la Justice comme fondement de l’État de droit parce que s’il y a une chose nécessaire dans la construction d’un Etat, c’est bien le respect des lois et règlements en vigueur.

On peut enfreindre ces lois et règlements par erreur, par méconnaissance, même par incompétence. Mais cela ne doit jamais rester sans suite. Parce que l’impunité qui découle de l’absence de responsabilité quand les individus ne sont pas comptables de leurs faits et gestes, cette impunité est la pire des attitudes pour une société.

On peut et on doit cultiver la Tolérance comme principe de base du contrat social qui doit nous lier. Elle est une valeur fondamentale qui durcit le socle sur lequel tous les équilibres sociaux se construisent.

Quand, par vanité ou par insouciance, on oublie ce que chacun de nous doit à l’autre en terme de Tolérance, nos rapports sont immédiatement tendus et nous donnons ainsi rendez-vous aux pires des dérives.

On peut et on doit sublimer l’Abnégation pour en faire un caractère premier, une règle de comportement. Sans l’Abnégation, il n’y a pas de convivialité possible au sein des groupes. L’Abnégation nous permet de retenir de notre voisin ce qu’il y a de positif en lui, d’oublier et même de ne pas percevoir ses insuffisances, ses faiblesses.

On peut et on doit chanter l’Humilité qui nous permet de nous conformer à ce que nous sommes : des Créatures d’un Dieu qui, dans son infinie Bonté, a créé le Destin, avec ses terrifiantes voies, et la Miséricorde, avec son incommensurable tranquillité. Parce que nous avons terriblement peur des devenirs du Destin et parce que nous baignons dans l’espoir d’une Miséricorde sans limite, nous voilà condamnés à toujours fuir le premier, à toujours espérer la seconde.

Ce qui nous amène perpétuellement à peser ce que nous sommes véritablement et à nous comporter comme si nous n’étions finalement rien tout en étant quelque chose : des Hommes.

La Justice est d’abord «distributive»

Dans une société, dans un Etat, on doit assurer une juste redistribution des biens communs, un équilibre juste des pouvoirs des Institutions et du prestige qu’offre l’exercice du pouvoir en général.

Elle assure l’ordre, impose le respect mutuel et décline des valeurs comme la liberté, l’égalité, le mérite, la responsabilité… C’est bien pour cela qu’elle fonde la démocratie, ce système qui est fait pour assurer une juste répartition des pouvoirs et protéger la société de ses dérives totalitaristes.

La Tolérance, l’Abnégation et l’Humilité nous permettent de nous respecter les uns les autres, de reconnaitre avec fierté nos différences, de nous accomplir individuellement tout en œuvrant pour l’accomplissement de la communauté. Une valeur essentielle de la Mauritanie de départ. Une valeur qui lui a permis de baigner dans le sens de la mesure. On est loin, très loin des extravagances de la société où nous sommes.

Si l’on fait la somme de ces valeurs, on peut avoir une idée de ce qu’est «al inçaaf» et comprendre alors qu’en réhabilitant une valeur aussi sublime, nous recouvrons une partie de nous-mêmes à présent ensevelie sous les coups répétés des agressions multiples (sécheresses, mondialisation, flux d’idéologies mal pensées et mal «tropicalisées», aliénations des élites…).

Le Salut réside certainement dans la restauration de cette valeur cardinale qu’est «al inçaaf».

La Tribune N°750 du 11 avril 2018





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