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14-09-2018

16:45

Élections en Mauritanie : « C’est une victoire amère pour le parti présidentiel », selon l’UFP

Jeune Afrique - Mohamed Ould Maouloud (UFP) se félicite que l’union de l’opposition ait mis en ballottage le parti présidentiel dans toutes les grandes villes, à l'occasion du premier tour des élections nationales, régionales et locales mauritaniennes du 1er septembre.

À 65 ans, Mohamed Ould Maouloud est l’un des plus vieux opposants du pays. Venu du marxisme, il n’a jamais cédé aux sirènes des pouvoirs et il est considéré comme l’un des hommes politiques les plus fermes dans ses convictions. Candidat à la présidentielle de 2007 où il a obtenu 4,92% des suffrages, il est président de l’Union des forces de progrès (UFP).

C’est à ce titre qu’il a présidé le Forum pour la démocratie et l’unité (FNDU), regroupant la plus grande frange de l’opposition dite « radicale » au président Mohamed Ould Abdel Aziz. Ce professeur d’Histoire devrait pour la première fois siéger comme député dans la nouvelle Assemblée. Son authenticité, et le fait que son parti ne soit pas électoralement très puissant, le classent parmi ceux qui pourraient prétendre porter les couleurs de l’opposition lors de l’élection présidentielle de 2019.

Il dénonce la « pagaille » qui a présidé au premier tour des élections du 1er septembre, voulue selon lui par la majorité. Il se félicite néanmoins que l’union de l’opposition ait mis la formation présidentielle en ballottage dans toutes les grandes villes, et se présente soudée pour le second tour de ce samedi.

Le fichier électoral n’est pas fiable.

Jeune Afrique : Quelles leçons tirez-vous du premier tour des élections législatives, régionales et municipales qui se sont tenues le 1er septembre ?

Mohamed Ould Maouloud : Ces élections ont été très mal organisées. Avec trois scrutins qui se tenaient en même temps, qui plus est pour la première fois en période d’hivernage, la grande pagaille qui en a résulté était inévitable.

D’autant plus que la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a été constituée – sans notre participation, contrairement à la loi – avec des personnes proches de la majorité et novices auxquels on n’a pas donné le temps de se former. Ils ne sont d’ailleurs pas parvenus à mener à bien le recensement électoral nécessaire en juillet et en août.

Est-ce pour ces raisons qu’il y a eu 520 000 votes annulés sur 2,7 millions de suffrages exprimés ?

Le fichier électoral n’est pas fiable. Ils ont supprimé celui existant puis, dans l’incapacité d’en établir un nouveau dans les délais, ils l’ont comblé de façon mystérieuse pour obtenir 1,4 million d’électeurs inscrits. On a trouvé sur ce fichier beaucoup de personnes décédées… Nous avions demandé à la CENI d’étaler les élections. Il nous a été répondu que ce n’était pas possible pour des raisons financières. En fait, cette pagaille était voulue.

Le président Abdelaziz a également décidé pour la première fois de l’histoire de faire lui-même campagne. Il a utilisé les moyens et l’autorité de l’État pour menacer tous les partis et décourager les candidats qui risquaient de faire du tort à sa formation, l’UPR.


C’est une victoire amère pour le parti présidentiel, car il est en ballottage dans toutes les grandes villes du pays

Comment analysez-vous les résultats du premier tour ?

Le parti présidentiel prétendait avoir 1,115 million de membres. 132 000 votants seulement ont voté pour lui. Si nous additionnons toutes les voix de l’opposition (FNDU, UFP, Tawassoul, RFD, etc), nous le dépassons, avec quelque 150 000 voix. C’est un échec pour le président.

Le scrutin majoritaire avantage le parti présidentiel, car il a la majorité des députés. Mais c’est une victoire amère, car il est en ballottage dans toutes les grandes villes du pays. À Nouakchott, il est en difficulté dans tous les arrondissements et dans tous les scrutins.

Ils ont eu recours à une fraude massive en subtilisant des cartes d’identité et en les confiant à des gens qui voteraient à la place de leurs vrais détenteurs, avec la complicité des présidents de bureaux de vote. Ils ont refusé de nous communiquer les procès-verbaux électoraux, afin de nous empêcher de les contester. Ils ont pré-rempli des bulletins de vote. Malgré toutes ces tricheries, nos adversaires n’ont pas obtenu le raz-de-marée qu’ils escomptaient.

L’opposition se présente-t-elle unie pour le second tour du 15 septembre ?

Hormis l’opposition « collaboratrice » qui a l’habitude de voter avec le parti présidentiel, nous sommes totalement ligués, dans tout le pays, pour vaincre l’UPR.

Par Alain Faujas



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