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05-11-2018

19:00

Le bras de fer entre la Mauritanie et Donald Trump

Mondafrique - Le gouvernement mauritanien a jugé « futile et insignifiante » la remise en cause par l’administration américaine des accords commerciaux entre les deux pays en raison de la persistance de l’esclavage en Mauritanie

Donald Trump a informé le Congrès et le gouvernement de la Mauritanie qu’il mettait fin à l’admissibilité de leur pays aux avantages en matière de préférence commerciale en vertu de la Loi sur la croissance et les perspectives économiques en Afrique (Agoa), à compter du 1er janvier 2019. Le décret signé par le président américain, indique le site VOA Afrique, met en cause les pratiques de travail forcé et l’esclavage moderne, selon un décret présidentiel publié par le Bureau américain en charge du commerce.

La décision est prise au terme d’une revue annuelle effectuée par l’administration américaine qui établit que la Mauritanie ne progressait pas suffisamment dans la mise en place de la protection des droits des travailleurs internationalement reconnus.

Anti-américanisme primaire

Le gouvernement mauritanien a réagi, via son porte-parole, en qualifiant la décision des USA de « futile et insignifiante ». Dans des termes bien peu diplomatiques, la petite Mauritanie s’en est prise, contre toute évidence, aux USA pour n’avoir jamais pris en compte le problème de l’esclavage « à l’intérieur de ses frontières », en oubliant juste la guerre de Sécession au XIX eme siècle et la lutte pour les droits civiques de la communauté noire dans les années 1960.

Dans une allusion aux positions bien peu tranchées prises par l’administration américaine dans le dossier Khashogi, le porte-parole du gouvernement mauritanien explique que cette indulgence est due aux 110 milliards de dollars de commandes de matériel américain par le Royaume saoudien.

Comprenons que la Mauritanie qui n’a pas de tels moyens financiers est, du coup, plus mal traitée que l’Arabie saoudite par les Américains. « Le président Trump aurait-il pu prendre une telle décision contre nous, a accusé le représentant du gouvernement, s’il espérait obtenir de nous un marché d’armement de 110 milliards de dollars? ». Le propos n’est pas faux, mais calamiteux sur le plan diplomatique face à la première puissance mondiale. Le pouvoir mauritanien est en train de perdre la main?

Des rapports à répétition

Il faut se rappeler que depuis deux ans, la Mauritanie a fait l’objet d’une vingtaine de rapports provenant de l’ONU ou de grandes ONG internationales condamnant la situation des droits humains dans le pays. Au point que même des membres éminents du parti Républicain s’étaient montrés, ces derniers mois, très critiques contre le régime du président mauritanien Aziz.

En mars dernier, six parlementaires républicains proches de Donald Trump avaient décidé d’en appeler à la Maison Blanche pour condamner un régime qui s’affiche pourtant comme un allié de Washington en Afrique.

Ces membres du Congrès ont aussi écrit à Christine Lagarde, chef du FMI, pour lui demander d’arrêter de financer la République islamique de Mauritanie. Cette démarche repose sur une condamnation du président mauritanien Aziz dont le gouvernement est accusé de vol, d’esclavage, de corruption et d’un « odieux bilan des droits de l’homme ».

Cette lettre avait été signée par une poignée de noms qui ont soutenu Trump dès le début de son ascension et qui sont tous essentiels pour faire passer ses projets de loi au Congrès. Les six élus sont Mark Meadows, Thomas Garrett, Gus Bilirakis, Jeff Duncan, Lee Zeldin et Scott Perry.

Ces trois derniers siègent à la commission des Affaires étrangères, tandis que le premier, Mark Meadows, représentant de la Caroline du Nord, est l’un des amis les plus proches du président. Il préside le Freedom Caucus, un groupe de 40 hommes politiques qui ont les moyens de faire ou défaire une loi.

Par Nicolas Beau





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