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01-06-2020

11:58

M’Bagne : La famille d’Abbass Rougui contredit la version de l’armée mauritanienne

Terroir Journal - Dans le cadre de l’exécution de ses missions sécuritaires liées à la fermeture des frontières, une patrouille militaire a intercepté le jeudi 28 Mai 2020 à 21 heures un groupe de passeurs près du village de Winding relevant de la moughataa de M’Bagne (wilaya du Brakna).

La patrouille a pu arrêter l’un des passeurs, alors que les autres ont pris la fuite. Au cours de leur poursuite, un élément du groupe a tenté d’agresser un soldat.

Ce dernier a tiré une balle de sommation en direction de l’agresseur mais cette balle a malheureusement touché mortellement ce dernier peut on lire dans le communiqué publié par l’état major.

Ablaye THIAM [photo de profil de l'article], est le neveu du défunt, Abbass Rougui. Vêtu d’une chemise et d’un pantalon de couleur grise et bégayant en plus, il nous a retracé une partie du film de l’évènement malheureux au soir du 28 mai à Wending.

A l’en croire, il a affirmé que la marchandise appartient à un commerçant mauritanien du nom de Hassane. Marchandise qui a été transportée dans la charrette de son oncle Abbass à partir de la localité de Dabano, peu après le crépuscule puis débarquée à la berge non loin de Wending. Ils ont été rejoints aussitôt par le commerçant sur les lieux. Arrivé sur la berge du fleuve, ils ont commencé à décharger.

Après avoir mis le premier sac à terre, une patrouille de l’armée allume une torche. Les trois prennent tous la poudre d’escampette le commerçant en premier suivi de son oncle Abbass et lui en troisième position dit-il. En pleine course poursuit-il, il vire à droite et les autres continuent en direction du sud. Le soldat qui le poursuivait a fait demi-tour alors que Hassane a été capturé. Quelques instants en pleine course, il entend un coup de feu qui l’affole, ne sachant plus quoi faire. Il décide de rentrer à Wending qui n’est pas loin de Dabano et informe ses parents de ce qui s’est passé.

Les proches refusent la thèse de l’armée

Demba Ba cousin d’Abbass qui fait partie du groupe de gens qui ont assuré la toilette mortuaire a affirmé n’avoir pas vu un trou dans la poitrine d’Abbass mais sur le dos un trou béant qu’ils ont dû boucher avec du coton. Ce qui contredit la thèse avancée par les autorités médicales qui affirment que la balle a atteint Abbass dans la poitrine. La balle n’est pas sortie, elle est restée à l’intérieure insiste Demba.

Le crime s’est passé vers 20 heures, et le corps sans vie déposé au centre médical vers 00 heures. C’est le bruit des voitures des autorités et de l’ambulance qui a suscité la curiosité des habitants. Après l’arrivée du Colonel Hanena, qui commande la base militaire de Kaédi dont relève la patrouille responsable du meurtre d’Abbass, du procureur de la région du Brakna et des chefs de services sécuritaires régionaux. L’ambulance rebroussant chemin en trombe transportant le corps sans vie d’Abbass. C’est le lendemain que le maire a remis le corps sans vie à la famille et l’inhumation intervint quelques heures plus tard.

L’armée change de langage devant la famille

Le 31 en début de matinée, le Commandant de la 7ème région militaire, le Colonel Abdallahi O Hadde débarque avec les autorités régionales et locales pour adresser les condoléances de l’état major à la famille du défunt. Dans le même ordre d’idées, l’officier supérieur déplore le décès tragique d’Abbass en affirmant que c’est une perte pour l’ensemble de la communauté musulmane. La mission de l’armée en cette période difficile de la pandémie reste de sécuriser les populations et non de les tuer, conclut le Colonel Ould Hadde. Il dépose un montant d’un million (ancienne monnaie).

Le chef du village tend la main pour prendre la somme d’argent, l’oncle d’Abbass dit non plusieurs fois. Et le chef du village se rétracte. L’oncle d’Abbass nommé Demba DIALLO tire dehors le maire de MBagne et ils reviennent à l’intérieur du salon, c’est là que le maire a pris le montant après que l’oncle ait sollicité la lumière autour de l’affaire selon notre source. Pour l’instant, aucune plainte n’a été déposée par la famille contre l’armée qui a abattu ce citoyen mauritanien. A en croire nos sources, la brigade de gendarmerie a ouvert une enquête.

Selon toujours nos sources, quatre militaires relevant de la patrouille ont été entendus en plus de l’oncle et de Ablaye THIAM, neveu d’Abbass. A la question de savoir si le tireur a été entendu ou pas, mystère total. Notre source poursuit sans être précise, il semblerait que le tireur aurait été déplacé tard dans la soirée vers le bataillon de Kaédi.

Les autorités craignaient-elles des émeutes dans cette ville dont les jeunes avaient manifesté l’année dernière contre le candidat Ghazouani venu en précampagne ?

Dans ce département, des jeunes de la localité de Wending avaient été arrêtés puis déferrés au parquet pour avoir empêchés des pirogues venant du Sénégal et transportant des marchandises d’embarquer. Un business très juteux auquel s’adonnaient des éléments de l’armée impliquée dans la surveillance frontalière. Le sac était facturé 1000 UM, le bidon d’huile 500 UM et la pirogue avant d’embarquer versait 5000 UM (ancienne monnaie) selon nos sources.

Abbass Diariata, homonyme et cousin maternel du défunt s’étonne de la version de l’armée qui accuse ouvertement le défunt d’être un bandit recherché par la justice. C’est faux et archi faux, ça n’existe pas, il raconte des mensonges, martèle Abbass. Ils l’ont tué mais Allah jugera. La balle l’a atteint sur le dos, dit-il, mais pas de face, je fais partie de ceux qui ont fait le bain mortuaire. Le sang a continué à couler jusqu’au moment de son enterrement. Il a été abattu prés d’une clôture. Ses pas à l’aller son visibles mais ceux du retour non. Affirmer qu’il a voulu résister n’est pas une réalité.

Cependant, un ancien soldat de l’armée qui a requit l’anonymat, nous a affirmé que le trou d’une balle tiré de face non seulement reste invisible mais le tir occasionne une ouverture béante sur le dos.

Une communication désastreuse

Le communiqué de l’Etat-major général des Armées indique : au cours de leur poursuite, un élément du groupe a tenté d’agresser un soldat. Ce dernier a tiré une balle de sommation en direction de l’agresseur mais cette balle a malheureusement touché mortellement ce dernier. Depuis quand, un tir de sommation est dirigé vers une personne ?

Ce communiqué poursuit, les investigations menées à la suite de l’incident ont montré que la victime est un citoyen mauritanien répondant au nom de Abass Rouki, qu’il est recherché par la justice et qu’il a des antécédents judiciaires. Des investigations incapables de fournir l’identité officielle de la victime qui répond au nom de Abbass Hamadi DIALLO né en 1985 à Dabano et non Abbass Rougui. Il n’a jamais été poursuivi par la justice mauritanienne pour quelques délits que ce soit.

Il était un jeune dynamique qui s’activait dans le commerce du bétail et le transport et qui assurait la vie de 7 bouts de bois de Dieu en plus d’une épouse et de sa maman, nous indique son cousin Abbass. Leurs photos sont ci-dessous. Malheureusement, ce n’est pas la première fois que l’armée mauritanienne tue froidement des individus non armés comme Abbass.

Avant lui c’était des centaines de soldats négros mauritaniens sous le règne du dictateur Ould Taya. Une loi d’amnistie a été votée par le parlement mauritanien en 1992. Et depuis, les organisations des droits de l’homme et certains partis politiques ne cesse de dénoncer cette loi d’amnistie.

Daouda Abdoul Kader DIOP

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Les enfants de feu Abbass Rougui







La mère de feu Abbass Rougui

Oncle de Abbass Rougui

Des proches de Abbass Rougui

Cousin et homonyme de Abbass Rougui




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