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17-10-2020

12:15

Libération de Sophie Pétronin : les militaires français indignés par les propos de l'ex-otage

La Dépêche - Depuis sa libération vendredi 9 octobre, Sophie Pétronin a qualifié ses ravisseurs de "groupes d'opposition armée", réfutant le terme de "djihadistes".

Le général François Lecointre, chef d'État-Major des armées, a confié son "indignation" et précisé la situation au Mali. À travers l’opération Barkhane, la France déploie actuellement 5 100 militaires dans la bande sahélo-saharienne contre les groupes jihadistes qui minent le Mali, le Niger et le Burkina Faso.

Affiliés à al-Qaïda ou à l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS), ces derniers ont été responsables de la mort d’au moins 4 000 personnes en 2019, selon l’ONU, tandis que depuis 2013, 45 militaires français ont trouvé la mort en les combattant, dont trois parachutistes tarbais encore cet été.

Ceci rappelé ? Les déclarations de Sophie Pétronin à RFI après sa libération, il y a une semaine, sont, de fait, restées en travers de la gorge des Armées. " 'Jihad', c’est 'guerre' en français, et c’est une guerre entre des groupes d’opposition armés au régime", avait notamment déclaré l’ex-otage occultant la dimension terroriste de ses ravisseurs.

Inacceptable pour les militaires et d’autant plus… qu’en échange du leader de l’opposition malienne Soumaïla Cissé -principal enjeu de la négociation, en fait- des deux otages italiens (pour lesquels une rançon de 10 M€ a été évoquée) et de la septuagénaire française, 204 prisonniers (dont 29 jihadistes capturés par Barkhane) avaient été libérés par Bamako et… accueillis par un grand banquet mis en scène par Iyad ag Ghali, émir touareg du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, sous pavillon al-Qaïda.

"Organisation terroriste"

Au Sénat, mercredi, et jeudi devant l’Assemblée nationale, la "grande muette" a donc exceptionnellement donné de la voix.

"Pour que les choses soient bien nommées, l’adversaire qui est le nôtre n’est pas un groupe armé comme un autre, qui serait un groupe armé d’opposition au régime malien. Il s’agit bien d’une organisation terroriste internationale […] qui a fait allégeance à al-Qaïda et dont l’objectif contrevient directement à la sécurité des Français, à l’étranger et sur le territoire national", a ainsi rappelé le général Lecointre, chef d’état-major des armées (CEMA).

"On ne peut pas appeler ces personnes des militaires et imaginer qu’ils peuvent être comparés aux militaires français […] soldats d’une armée régulière, qui se battent dans le respect du droit international, dans le respect du droit de la guerre, en maîtrisant leur violence et qui sont liés, au-delà de la mission, par une éthique particulièrement exigeante", a-t-il aussi souligné avant d’assurer que la "France [n’avait] en rien été impliquée dans des négociations d’aucune sorte avec ce groupe terroriste que nous continuerons de combattre avec la dernière détermination."

De fait, c’est bien le pouvoir de transition à Bamako qui a été à la manœuvre avec Alger, axe qu’aura quelque peu masqué une Sophie Pétronin semblant porter haut les symptômes d’un syndrome de Stockholm multiplié au carré par le traditionnel appel du désert cher aux mystiques.

Pour faire simple ? L’apparition en 2018-2019 de Daech soudain exporté au Sahel, a changé la donne pour tous les acteurs. Revendiquant par nature le califat, l’Etat islamique est entré en conflit avec les salafistes touaregs et peuls dont les revendications préalables étaient territoriales et ethniques. Éliminer l’EIGS est alors devenu une priorité partagée tant par la franchise al Qaïda que par ceux qui tenaient à avoir des interlocuteurs "locaux" pour faire taire les armes.

Aujourd’hui ? Selon les spécialistes, l’échange "otages contre prisonniers" permettrait, lui, d’ouvrir un dialogue vers une solution politique négociée dans le nord du Mali, sous l’égide d’Alger, tandis que pour la France se poursuivait, hier, une même guerre au terrorisme sur deux fronts.

Par Pierre Challier






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