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Sahara occidental: l'édification du Maghreb arabe passe par le règlement de ce conflit.
Quelle tristesse d'entendre le Président tunisien, Monsieur Mohamed Moncef Marzouki, un révolutionnaire, combattant de longue haleine pour la liberté de son peuple, dire, en marge de sa visite en Mauritanie, que les droits des peuples ne se valent pas, pour reprendre des termes bien utilisés ces jours-ci dans l'hexagone.
C'est en fait ce que le Président tunisien, Monsieur Mohamed Moncef Marzouki a déclaré aujourd'hui relativement au conflit du Sahara Occidental. Pour lui, ce conflit doit être "mis entre parenthèse" pour construire le Maghreb arabe. Sa proposition est donc de glisser sous le tapis ce problème et passer à la table de la coopération, comme si rien n'était.
En toute lucidité, aucun dirigeant responsable du Maghreb ne croit qu'une réelle union ne puisse être construite sur des fondements en argile. Car, le problème du Sahara Occidental est au cœur même du Maghreb et sa condition sine-qua-non. Les pays de cet ensemble doivent lui trouver une solution juste et définitive avant tout autre chose.
Les Nations-Unies ont adopté plusieurs résolutions, demandant aux parties, le Maroc et le F. Polisario, de trouver une solution qui permet au peuple sahraoui de s'autodérminer. Je ne les citerais pas ici, tellement elles sont connues de tous.
Aussi, l'ensemble de ces résolutions invitent et demandent aux pays de la région du Maghreb d'appuyer les parties et la communauté internationale dans cette démarche de recherche de solution. Les résolutions des Nations-Unies sont claires: il n'est plus question d'indépendance du Sahara Occidental, suivant le désir du F. Polisario, ou d'annexion de celui-ci, suivant la volonté du Maroc, mais plutôt de permettre à la population de ce territoire d'exercer une forme quelconque d'autodétermination.
C'est donc la créativité, l'imagination et la bonne foi de ces deux belligérants sur lesquelles on mise pour matérialiser cette autodétermination, et ce, afin de répondre aux impératifs de la résolution 1514 des Nations-Unies.
Malheureusement, c'est là où le bât blesse. Car, les parties sont tarées. Et pour cause: l'absence total de leadership des dirigeants du F. Polisario, et leur incapacité à imposer l'option de l'indépendance, n'a d'égale, en fait, que le manque de conviction du Maroc dans son plan, phare, "d'autonomie" pour le peuple sahraoui.
Le F. Polisario est si dépouillé d'initiative, qui se contente aujourd'hui d'organiser des "circuits touristiques" aux ONG et aux amis du peuple sahraouis.
Les survivants dans les camps de réfugiés, n'en peuvent plus de la passivité des dirigeants du F. Polisario au regard des principes qui ont donné naissance au mouvement du 20 mai 1973.
Ces dirigeants sont réduits, en fait, à grignoter les muettes des acquis de l'idée originelle, pour laquelle tant d'hommes et de femmes sahraouis ont donné leurs vies, sacrifiés leur bien-être et bien sûr ceux de leurs enfants. Le plus triste, est que ce soi-disant leadership du F. Polisario continue encore à essayer de convaincre un peuple sahraoui, devenu autiste, de l'inévitabilité de son indépendance. Le dernier congrès en est la preuve de cette triste réalité.
Pourtant, les membres de cette élite sont ceux-là mêmes qui sont à la tête de ce mouvement depuis 37 ans. Trente sept ans de stratégie stérile, vacillante entre les incertitudes de l'indépendance et la peur de perdre les acquis gagnés sur les étendus arides de l'Éhmada algérien.
Que reste t-il pour le peuple sahraoui à présent? Rien! Assister impuissant à un maraudage ou, dirai-je, à un acharnement de vautours autour du cadavre de sa monture vers la liberté et l'indépendance.
Le Maroc, quant à lui, est loin d'être dans une meilleure posture. Oui, il occupe le Sahara Occidental, mais à quel prix? Les derniers événements de Gdeim-Izik sont là pour nous le rappeler.
Sur le plan de la légitimité de son annexion, aucun pays au Monde, pas un seul, même parmi ses alliés les plus ardents (la France ou l'Arabie Saoudite), ne reconnait sa souveraineté sur ce territoire.
Certes, il a lancé l'idée de son "plan d'autonomie" au Sahara Occidental. Mais cette idée n'a jamais été soutenue par la volonté et la conviction du Maroc. Il ne lui a jamais laissé la chance de prendre vie sous une forme quelconque. Pour rappel, le "plan d'autonomie" du Maroc repose, entre autres, sur l'implantation d'un gouvernement autonome, avec un parlement régional, tous les deux responsables des leviers économiques, politiques, y compris la gestion des ressources du territoire et de sa sécurité.
Il faut dire que ce plan, répond en partie à certaines revendications historiques du peuple sahraoui: la mise en place de ses propres institutions politiques et la gestion de ses ressources naturelles. Le problème, est non le moindre, c'est que le Maroc n'a jamais posé un seul geste dans le sens de la réalisation de ce plan.
Pourtant, devant la passivité du F. Polisario, plusieurs hauts dirigeants de ce mouvement ont rallié le Maroc, espérant sans doute participer à la mise en place de son "plan d'autonomie". Rien n'y fait! En fait, le Maroc joue la carte de l'usure, la carte de l'écoulement du temps. Ce qui laisse à croire, à plusieurs observateurs, qu'il n'est pas tout à fait de bonne foi dans sa démarche autonomiste.
Nous sommes donc devant deux belligérants entièrement cantonnés et figés dans leurs positions respectives, lesquelles ne laissent aucune place au compromis.
Alors que le peuple sahraoui, de part et d'autre, a tant souffert et continue de souffrir dans sa chaire et de son sang de ce conflit. Après 37 ans d'exil, de misère, de domestication et d'attente, il est temps que les pays de la région s'impliquent, dans la foulée de la nouvelle dynamique géopolitique, en obligeant les parties de trouver une solution à ce conflit et, ainsi, endiguer ce cancer dont souffre la région du Maghreb.
Passer outre, comme le demande le Président tunisien, Monsieur Mohamed Moncef Marzouki, n'est pas la bonne chose à faire, encore moins, le bon message à envoyer aux parties et leurs alliés.
Le peuple sahraoui, le peuple oublié, à droit à sa chance de vivre en paix. Sa chance de sortir de cette situation chaotique, d'éparpillement, de dépendance de l'assistance internationale, d'incertitude, d'exil, de répression, de l'indifférence des autres et d'attente de solution qui n'arrive jamais.
Le Maghreb arabe ne peut, et ne doit, être construit sur les souffrances du peuple sahraoui. Que la solution soit à l'avantage de la position du Maroc ou celle du F. Polisario, il est temps que cette solution soit trouvée et mise en œuvre le plus rapidement possible.
Me Takioullah Eidda, Avocat & Procureur, Québec, Canada.