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La zone franche : option Nouadhibou land.
L’assemblée nationale et le sénat ont adoptés au courant du mois de décembre 2012, un projet de loi portant création d’une zone franche à Nouadhibou, apparemment le projet de loi a été promulgué et publié, car le conseil des ministres, lors de sa réunion du 10 janvier 2013, a adopté un décret d’application de cette loi.
L’importance capitale de l’évènement m’a encouragé à écrire l’histoire de Nouadhibou en décroissance (I) et à analyser les insuffisances de la loi sur la zone franche (II) avant de lancer l’option Nouadhibou Land (III), qui, de mon point de vue, aura un impact positif, aussi bien sur la vie des populations de la zone que sur le développement économique du pays.
I. Nouadhibou : histoire d’une décroissance
Nouadhibou a connu la création de la première société sur le territoire Mauritanien (Société Industrielle de la Grande Pêche SIGP créé en 1921), après l’indépendance, la ville a abritée de dizaines de sociétés et unités de production.
Le trafic aérien était relativement intense, jusqu’aux années 80 du 20ème siècle, l’aéroport de Nouadhibou recevait des vols réguliers de plusieurs compagnies UTA, IBERIA, Aeroflot.. En plus, bien sûre, de l’Air Mauritanie qui effectuait souvent plusieurs navettes par jour. La navigation à travers le chenal du port de Nouadhibou était plutôt dynamique et le Port avait une bonne réputation.
Quand on compare la situation actuelle à celle de jadis, nous pouvons dire qu’il y a eu un déclin évident, certains même pensent qu’il y a une volonté politique derrière la marginalisation progressive de la ville de Nouadhibou.
II. Loi sur la zone franche : texte sans effets positifs sur le développement
La loi portant création de la zone franche de Nouadhibou, adoptée dernièrement, sans grandes études, n’aura pas de répercussions positives sur le développement de la zone pour des raisons liées, d’une part, à la carence des infrastructures de base (1), d’autre part, aux défaillances du système incitatif de la loi sur la zone franche (2) et de surcroît à l’exclusion des opérateurs locaux de ses maigres privilèges (3).
1. La carence notoire des infrastructures de base de la ville:
• Les infrastructures du Port Autonome de Nouadhibou sont limités au point que sa direction été, dernièrement, contrainte de casser son portail pour permettre l’écoulement d’un groupe électrogène destiné à la SOMELEC !
• L’électricité, à prix élevé, connait encore des coupures qui durent parfois plus de 24 heures, lors de la rédaction de cet article, mon ordinateur s’est éteint et la ville a plongé dans l’obscurité (le 03/02/2013 vers 19h).
• La capacité d’accueil - des personnes et de stockage des marchandises - demeure limitée.
• Les nouvelles routes sont bien en-dessous des standards internationaux quant à leur largeur et ne disposent pas de zone de sécurité ni d’ouvrages de collecte et d’évacuation des eaux.
2. Les défaillances du système incitatif de la loi sur la zone franche :
• La loi a exclus du régime d’exonération douanier les produits de première nécessité, les hydrocarbures, les voitures d’occasion et leurs pièces détachées.
• Le système fiscal instauré par la loi est loin d’être incitatif: les entreprises agréés sont soumises aux taxes et impôts locaux à l’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux, aux règles de droit commun en matière d’assiette, de déclaration, de recouvrement et de contestation.
• Une charge fiscale supplémentaire: Les entreprises agréées sont soumises à une redevance d’administration jusqu’ici non connue dans le système fiscal mauritanien !
• Les employés des entreprises agréés sont soumis aux impôts sur les traitements et salaires (ITS) et leurs entreprises ne bénéficient pas d’avantage en matière sociale.
• Le guichet unique - chargé de l’accomplissement de l’ensemble des formalités et démarches pour faciliter la tache des opérateurs - n’est pas concerné par les formalités douanières !
• Les décisions du Centre de Régulation de la zone franche de Nouadhibou - rattaché à la Présidence de la République – peuvent faire l’objet de recours devant les juridictions compétentes ? .. Donc les litiges seront analysés par un système judiciaire qui a souvent éveillé la méfiance des investisseurs étrangers.
3. L’exclusion des opérateurs locaux :
• « Les personnes physiques ou morales exerçant une activité au sein de la zone franche sans être titulaire d’un enregistrement ou d’un agrément au régime de la zone franche ne bénéficient pas du régime de la zone franche et demeurent soumises aux règles de droit commun en matière sociale et fiscale et de change », fin de citation, alinéa 3 de l’article 39 de la loi portant création de la zone franche de Nouadhibou.
Eu égard à ces insuffisances, nous pouvons conclure, que la loi sur la zone franche de Nouadhibou ne se répercutera pas positivement sur la vie des citoyens et n’aura pas de grandes répercussions sur le développement du pays.
Je trouve de mon devoir en ma qualité de citoyen Mauritanien de contribuer à la réforme et d’exprimer ma conception.
III. La réforme : Nouadhibou land
Plus le traitement commence tôt, meilleures sont les chances de réussite, c’est pourquoi je propose aux autorités publiques de s’orienter vers la préparation de l’avenir d’une véritable zone franche à Nouadhibou au lieu de se limiter à des mesures qui n’auront pour effet que d’avorter un projet tant attendu, la couverture médiatique à la déclaration de naissance d’un projet revêt une importance capitale dans son succès.
L’option que je suggère consiste à s’atteler sur la fondation d’une nouvelle ville : Nouadhibou land (???????? ????) sur la rive est de la baie du lévrier, au nord du Parc National du Bang d’Arguin et en face de l’emplacement actuel de la ville, j’évoque ici les raisons de choix du site (1) les ouvrages à réaliser (2) et le scénario d’exécution du projet (3).
1. Les Raisons du choix du site :
• Le terrain vierge permettra de réaliser, sans gêne, des ouvrages et des zones de développement conformes aux normes internationales.
• la proximité par rapport au réseau routier national, aux abords de la (RN3) : le trajet vers Nouakchott sera écourté de 100 km, et la route de l’Europe sera seulement à quelques dizaines de kilomètres.
• Le voisinage de la nappe de Boulenouar facilitera l’approvisionnement en eau douce.
• Le dégagement relativement important des frontières du pays aide à maitriser la sécurité dans la zone.
• L’espace continental, étendu sur des centaines de kilomètres, permets de réaliser aisément tout ouvrage sans se soucier de la superficie.
• Le terrain dur et rocheux, élevé par rapport au niveau de la mer, mets à l’abri du danger des submersions que nous connaissons à Nouakchott.
2. Les ouvrages à réaliser :
• Un Port pouvant accueillir de grands navires avec des vastes terre-pleins, qui permettra à notre pays d’améliorer son infrastructure portuaire, de rehausser sa courbe descendante en 2011, et surtout d’améliorer la mauvaise note que nous avons obtenus du Forum Economique Mondial (3,3/7) - voir les données de la banque Mondiale sur le lien: http://donnees.banquemondiale.org/indicateur/IQ.WEF.PORT.XQ
• Un aéroport disposant de l’ensemble de bâtiments et des installations qui servent le trafic aérien.
• Un réseau routier conforme aux standards internationaux. Les autorités mauritaniennes et maliennes doivent parallèlement à l’exécution du projet, s’activer pour la réalisation d’une route reliant le port au mali voisin, qui ne dispose pas de frontières maritimes et dont les hommes d’affaires constituent des opérateurs potentiels dans la future zone franche, une telle route aura aussi pour effet de désenclaver le nord « moitié vide » de la Mauritanie et peut servir les opérations d’exploitation et d’acheminement du pétrole et du gaz de Taoudenni, et autres gisements aussi bien en Mauritanie qu’au Mali.
• Des zones de développement modernes et séparés : industrielles, commerciales & résidentielles.. tout en veillant sur la maîtrise du développement de la ville afin d’empêcher l’anarchie qui a longtemps caractérisé nos plans et lotissements.
3. Le scénario de réalisation :
• Lancement des études sur fonds de l’Etat mauritanien : la réalisation des études peut être faite par un groupe d’experts nationaux et internationaux & la coordination doit veiller à ce que les rapports d’études soient disponibles, au moins, en trois versions (arabe, française & anglaise).
• Mettre ce projet à la tête des priorités de développement de notre pays, le Président de la République doit programmer des visites officielles dont le but est d’obtenir le soutien et les financements de ce projet et la diplomatie doit s’activer dans la sensibilisation des partenaires étrangers pour qu’ils apportent un soutien consistant à cet ouvrage primordial, à compter surtout sur les frères arabes (auxquels font recours les grands pays occidentaux à la quête des financements), sans négliger bien sûre les autres partenaires au développement.
• Après préparation du terrain et obtention des promesses de financement, il ne reste que l’organisation d’une rencontre dans un centre international d’affaires pour les cérémonies protocolaires de signature des accords.
• Les travaux doivent être exécutés avec détermination et patience : la réalisation d’un tel projet ne peut se faire sérieusement qu’après plus d’une décennie de labeur. Il est à retenir que ce projet peut avoir encore des répercussions positives sur les pays voisins : l’Espagne, en crise, regorge de matériel de travaux publics et de sociétés immobilisés et les pays voisins disposent des ressources humaines qualifiées.
Mohamed Sidi Abderrahmane
Avocat à Nouadhibou
mohsiab@yahoo.fr