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Ouverture du sommet de l’UA: entre polémique, cafouillages et premières annonces
Le 22e sommet de l’Union africaine s’est ouvert ce jeudi 30 janvier 2014 dans la matinée. Durant la cérémonie, plusieurs dirigeants se sont succédé à la tribune de l’UA à Addis-Abeba, en Ethiopie. Certains n’ont pas hésité à lancer des polémiques.
Pour commencer ce sommet de l’UA, il y a d’abord eu des annonces très concrètes : ainsi la Mauritanie prend le relais de l’Ethiopie à la présidence tournante de l’Union africaine et la première vice-présidence revient au Zimbabwe, un choix effectué à la dernière minute.
L'élection du président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz à la tête de l'UA est un choix par défaut, critiquent certains participants, car la présidence tournante revenait à la région Afrique du Nord. L'Algérien Abdelaziz Bouteflika étant malade, la Libye étant en déliquescence institutionnelle, et l'Egypte étant suspendue, la Mauritanie s'est retrouvée seule en lice.
Pour nombre de participants, offrir la présidence de l'organisation régionale à un « putschiste » est un mauvais signal. Pour rappel, ce militaire reconverti avait conduit son coup d'Etat en Mauritanie aussitôt après l'adoption par l'UA de sa charte pour la démocratie et les élections. Il était le premier. La déclaration sur les changements anticonstitutionnels, interdisant aux auteurs de coups d'Etat de se présenter aux élections, a aussi été bafouée dans ce pays.
Haïti invité
Sur le conflit au Soudan du Sud, les dignitaires africains et onusiens ont tous demandé aux deux parties de respecter le couvre-feu. Pas de condamnation pour l’heure, de l’ex-vice-président du Soudan du Sud, Riek Machar, et c’est une grande déception pour Juba. L’Union africaine a annoncé ce matin l’ouverture d’une enquête sur les exactions dans ce jeune pays. Aucune information précise n'a été donnée sur l’envoi d’observateurs
Haïti est l’invitée d’honneur de ce sommet. Et le Premier ministre Laurent Salvador Lamothe a rappelé les liens ancestraux entre son pays et le continent et a même demandé une dérogation de l’Union africaine pour que son pays puisse devenir membre à part entière. Ce qui a fait rire dans les tribunes.
Pas un mot ce jeudi matin sur la Caric, la Force africaine de réaction rapide, le projet de mécanisme pour permettre à l’Afrique d’assumer elle-même sa sécurité. Enfin, il faut noter cette phrase du président sud-africain, qui a dû provoquer l’ire du Maroc et sans doute froisser Paris. Lors d’une courte allocution, Jacob Zuma a déclaré que le rêve d’une Afrique libérée était devenu réalité, excepté au Sahara occidental.
La République arabe sahraouie démocratique est membre à part entière de l’UA, et c’est pour cette raison que le Maroc boude l’organisation depuis plusieurs décennies. Alors cette phrase de Zuma semble donc éloigner, à très court terme en tout cas, la perspective d’un retour du Maroc au sein des instances de l’Union africaine.
Bisbilles autour de la RCA
Il y a aussi eu un cafouillage autour de la position de l’Union africaine sur la question de l’éventuel déploiement des casques bleus en Centrafrique. Mercredi soir, le président guinéen Alpha Condé, qui assume en ce mois de janvier la présidence tournante du Conseil de paix et de sécurité de l’UA, a déclaré, lors de son discours d’ouverture du Conseil : « Nous appuyons la demande de Catherine Samba-Panza d’un déploiement d’une force de maintien de la paix en Centrafrique ».
Pour rappel, la présidente de transition en Centrafrique a déclaré mardi soir avoir demandé officiellement à l’ONU l’envoi de casques bleus dans son pays. Ce dossier est facteur de divisions à Addis-Abeba. La plupart des pays d’Afrique centrale, qui plaident pour un retour de la paix rapide en Centrafrique, y sont néanmoins opposés
Ce jeudi matin, retournement de situation, puisque le ministre des Affaires étrangères de la Guinée, François Fall a déclaré que son président s’exprimait au nom de son pays et non de l’UA. Ce qui est tout de même très troublant, car c’est en qualité de président du Conseil de paix et de sécurité qu’Alpha Condé s’exprimait pourtant bien jeudi soir. C’est en tous les cas, ce qui était inscrit sur l’écriteau, devant son micro.
Alors est-ce un cafouillage, une erreur, un rétropédalage ? Cela mérite clarification. En tout les cas, les intervenants à la tribune de la cérémonie d’ouverture ont pris soin de ne pas aborder ce sujet visiblement épineux.
■ ZOOM : le grand retour de Madagascar
C’est par la grande porte que Madagascar a été réintégrée au sein de l’organisation. « J’ai le plaisir d’annoncer la réintégration de Madagascar », a dit le président en exercice sortant, juste après avoir ouvert le sommet des chefs d’Etat et il a immédiatement donné la parole au chef d’Etat malgache.
Il s’agit bien d’un retour officiel de Madagascar au sein de sa famille naturelle après « cinq longues années d’absence », a déclaré visiblement ému le président Hery Rajaonarimampianina. Emotion aussi, puisque ce retour est celui d’un membre fondateur de l’Organisation panafricaine qui célèbre cette année son cinquantenaire. Emotion enfin, car en tant que chef d’Etat, c’est le premier déplacement hors de son pays du nouveau président élu.
« Une ère nouvelle vient de commencer à Madagascar pour le bonheur des Malgaches », a affirmé Hery Rajaonarimampianina, qui reconnaît tout de même que les indicateurs sociaux et économiques sont pour la plupart au rouge. Profitant de cette tribune, il a lancé un appel pour tenir dans un délai de trois mois, une conférence des bailleurs de fonds et amis de Madagascar, afin de l’aider à trouver les financements pour la reconstruction de son pays.