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15-05-2014

10:55

Festival de Cannes : 'Timbuktu' de Sissako en ouverture sur la croisette

Metro News - Premier film de la compétition officielle, "Timbuktu" du mauritanien Abderrhamane Sissako a fait l'unanimité sur la Croisette. On y découvre une ville prisonnière des djihadistes. Une merveille. Au milieu du désert, une jeune femme hurle sous d'incessants coups de fouet. Son tort ? Avoir chanté.

D’épaisses larmes roulent le long de ses joues et, bientôt, ses cris insoutenables laissent place à une douce mélodie. L’image, d’une force inouïe, cristallise à elle-seule la toute-puissance de Timbuktu, le nouveau long métrage du mauritanien Abderrhamane Sissako.

Elle illustre aussi la volonté première d’un cinéaste inspiré qui a choisi de brandir sa caméra comme une arme et de tirer avec noblesse et dignité sur les nouveaux visages de l’obscurantisme en Afrique. Après Bamako, c’est à Tombouctou que l’intéressé a choisi de nous emmener le temps d’un drame d’exception.

La ville, située aux abords du fleuve Niger, est ici tenue d’une main de fer par des djihadistes belliqueux. Armés de kalachnikovs, ces derniers veillent au grain afin que personne ne succombe aux sirènes du péché. Aux quatre coins des rues, le silence demeure donc, poisseux et vertigineux, et les habitants, apeurés ou stoïques, glissent telles des ombres errantes pour éviter un hypothétique écart de conduite.

Violence et poésie

On aurait pu craindre une œuvre à charge manichéenne. Mais, fort heureusement, Sissako constate avec une distance salutaire l’émergence du mal entre les dunes chaudes du Sahel. A travers le parcours de plusieurs personnages, dont Kidane, un père de famille ayant tué accidentellement un pêcheur, le réalisateur met en lumière l’opposition entre deux Islam. Celui de la tolérance et du modernisme contre celui de la violence perpétrée au nom d’Allah. Un bras de fer qui s’opère dans la plus inattendue des douceurs.

La force de Timbuktu réside sans aucun doute dans le contraste entre l’extrême cruauté des situations et la beauté époustouflante des visages et des panoramas. Cet antagonisme donne naissance à des moments de pure poésie où se confondent le beau et l’absurde (à l’instar d’une séquence d’air football mémorable), la haine et l’amour, l’espoir et le désespoir.

Mi conte, mi pamphlet, ce délicat obus cinématographique, porté par des plans somptueux, met déjà la barre très haut. On en en ressort sonnés et émus, notamment par la dernière image. Celle de l’enfance sacrifiée, bafouée, oubliée qui court, court, court, comme une bête traquée. Sans savoir où aller.



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