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15-06-2015

13:51

Ministère de la culture : Apres Garn El Gasbah et Aoujeft ….. Kanaoil ?

Adrar-Info - Dans le cadre des préparatifs de la 3eme édition du festival des anciennes villes qui se tient cette année à Ouadane, la ministre de la culture et de l’artisanat vient de passer un séjour de trois jours en Adrar. Au cours de cette visite, elle a hissé au statut de « patrimoine national », le quartier de Garn El Gasbah à Atar ainsi que l’ancienne ville d’Aoujeft.

Ces deux localités s’ajouteىف aux autres sites déjà classés ainsi. De l’avis de nombreuses personnalités du monde de la culture, la ministre aurait dû , simultanément avec le quartier Garn El Gasbah, faire bénéficier aussi de ce statut , le village antique Kanaoil , ancienne capitale Emirale et vitrine traditionnelle culturo- sportive et artistique de l’Adrar.

Un oubli du ministère de la culture et de l’artisanat ? Un manque d’informations ? ou un défaut de programmation ? Il semble que ce soit les trois à la fois . Garn El Gasba est certes un vieux faubourg labyrinthique très chic d’Atar , avec ses gites d’étapes, résidences VIP dignes de riches et grandes notabilités de la ville mais surtout , ses maisonnettes en pierres taillées ouvertes sur des ruelles étroites et sinueuses dont les méandres pittoresques conservent chacune sa propre histoire et ses secrets de polichinelle.

Non loin de là, dans la banlieue sud d’Atar, Kanaoil ne démérite pas non plus de considérations et d’atouts. Selon ce que rapportent des sources concordantes, Kanaoil jumelait et voisinait les cités anciennes de Ag-ni, Ilij, Tizikine.

Certains de ses anciens habitants sédentarisés depuis les temps reculés, se disent descendants des Bavours. Lesquels colonisaient les contrées Adraroises bien avant l’arrivée des Almoravides. La fertilité des terres de kanaoil, la diversité de ses palmeraies et la richesse de ses populations lui a valu dés le XVI eme siècle, le statut de capitale Emirale de l’Adrar.

Cela en plus, il devint le quartier général (P.C) de regroupement et d’accueil de populations laborieuses venues de toute part fuyant les geurres et famines (cultivateurs, éleveurs, artisans, charpentiers maçons… ). A kanaoil se déroulaient les cérémonials de prestige, trocs commerciaux, émulations sportives et culturelles… (mariages exemplaires, Degdagas, danse du fusil, Hib d’agilité et force, vente publique et échanges d’utilité, courses de chevaux, At3az, lutte traditionnelle, sketches, blagues…).

C’est à partir de Kanaoil aussi, que les stratégies d’attaque contre les ennemis extérieurs et les techniques de défense du terroir sont conçues et engagées. Kanaoil fut chanté et glorifié au fil du temps par les poètes les plus prestigieux :

كنوال اكبيل أصل بل…لمرو و احسان الخطار

بل أحمد لمحمد واحمل….سيد أحمد واحمد للمخطار

(De tout tempsة kanaoil était terre de sagesse et hospitalité tout comme il est le fief des Emirs Ahmed Lemhamed,Ahmel Sidahmed et Ahmel lilmokhtar )

Après l’arrivée des colons en Adrar , la fin de la résistance armée et la mort de l’Emir Sid’Ahmed Aida vers 1932, c’est à Kanaoil que fut construite la première Medersa d’enseignement moderne. Ouverte le 1er Mai 1936. Seize élèves y apprenaient des cours d’arabe pour 2/3 du temps pour 1/3 en Français . Cinq d’entre eux réussirent à décrocher en 1942 le certificat de fin d’étude primaire (CEPE) constituant ainsi l’embryon du 1er réservoir formatif des cadres Nord du pays.

Postindépendance, la République transforma la Medersa de Kanaoil en première prison politique. Elle y séquestra les leaders du parti contestataire ( NAHDA) pour le motif : Attentats de Nema et d’Atar survenus au début des années 1960.

C’est à Kanaoil et à partir de ses acteurs et troupes artistiques que fut tourné en 1970 le 1er et célèbre film « Terjitt » d’ El Marhoum Hemmam Fall

Comme vu, Kanaoil a enregistré tout au long de l’histoire, un passé actif prompt à promouvoir les développement, authenticité et rayonnement culturel de l’Adrar et par delà toute la Mauritanie.

La direction du patrimoine au sein du ministère de la culture et de l’artisanat, s’enrichirait en répertoriant et en restaurant :

Ce qui reste de la 1ere Medersa de Kanaoil ,(logement du directeur, refectoire, dortoir et cuisine)qui a été à l’origine de la formation de nombreux cadres pionniers de l’indépendance nationale

Le logement du chef de village ou « hôtel de ville d’antan » construit en pierres entreposées avec dextérité et maitrise architecturale , comportant pièces d’hôtes, cour de réceptions, silos de conservation de vivres, porte-ustensiles, escaliers, vérandas , terrasses, ..

Cet habitat traditionnel reflète le mode de vie des populations sédentaires de l’époque.

Le « Rag kanaoil » , site d’installation et camping estival de la Hella Emirale. Actuellement délabré, dégarni et ouvert aux circulations à tout va d’animaux, véhicules et piétons, ce Rag gagnerait à être transformé en parc public moderne avec monument historique, musée et bibliothèque, arbres et bancs de repos, arènes de jeux divers et aires de rassemblements populaires. Le tout embelli de façades ornées de calligraphies , peintures arabesques et décorations diverses.

Des dispositions simples à faire très importantes pour le respect de la mémoire collective et l’histoire de la Nation.

Ely Salem Khayar



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