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08-12-2015

09:11

Fête nationale de l’indépendance à Nouadhibou : Pour la première fois….

L'Authentique - Pour la première fois depuis 55 ans, la Mauritanie célèbre la fête nationale de l’indépendance hors de Nouakchott. Pour la première fois aussi, depuis 55 ans, des armées étrangères défilent lors de la commémoration de l’indépendance nationale.

C’est aussi la première fois que le « Liqa Echaab », la traditionnelle conférence « show populaire » du président Aziz est incluse dans le programme des festivités commémoratives de l’indépendance nationale. Enfin, c’est pour la première fois qu’un président de la République se ballade lors de visites officielles, avec sa fillette dans les bras.

Ainsi, la ville de Nouadhibou a innové en tout, samedi 28 novembre 2015 où elle devint, l’espace de festivités, de parades militaires, d’exhibition, de réalisations et de rubans coupés, le centre névralgique de la Mauritanie. Il était 7 heures du matin et déjà l’état de siège.

La tribune centrale où devaient s’installer le président Mohamed Ould Abdel Aziz et les grands dignitaires du pays, était bouclée à des centaines de lieux. Les invités qui ne disposaient pas de badge d’accès devaient parcourir des kilomètres à pied, se mêler aux badauds, avant d’arriver, pieds crasseux et habits poussiéreux, à la grande avenue où devait se dérouler le grand défilé.

De grands commis de l’Etat, de hauts responsables de l’administration, des parlementaires et de nombreux élus, avaient parcouru ce chemin de croix, face à la parcimonieuse et inique distribution des badges par le protocole d’Etat, rouspétèrent certains d’entre eux.

Tiens, même Zeydane, l’homme troubadour qui a accès à toutes les portes, était en rade, poursuivi par sa cour, une meute de membre de son organisation « Donne-moi ou je te vilipende ». Craint et adulé pour on ne sait quelle vertu, il paraît même que Aziz lui a offert l’année dernière une Rav4 et un billet d’avion pour la Mecque. Toute la République est à ces pieds et aucune porte ne se ferme devant lui.

Des dizaines d’éléments de la garde présidentielle, ce fameux BASEP qui reste la seule unité du genre dans la région après la dissolution de son pendant burkinabé, le RSP, étaient lourdement armés. A chaque intercession de rue, se tenait un véhicule, canon pointé vers la foule et sa demi-douzaine de fantassins, harnachés jusqu’aux dents. Le président avait-il autant peur de sa population ? se demandaient plusieurs citoyens qui tournaient en rond, cherchant une brèche où s’engouffrer.

Il y avait sur la place centrale du grand défilé, plusieurs dizaines de milliers de curieux entassés dans une longue file. Il y avait autant de militaires en uniformes que de soldats du BASEP mêlés sournoisement à la foule, en tenue civil. Jamais, la sécurité du président n’était aussi exagérément renforcée.

Même la presse avait des difficultés à se mouvoir. Les journalistes non accrédités, et ils étaient légion, tentaient d’accomplir leur mission dans des conditions qui relèvent parfois du suicide. Refoulés par les militaires dans la foule, tolérés quelques instants, puis remis de nouveau dans la touche.

Ce jeu dura tout le temps qu’il le fallut, jusqu’à l’apparition du président Aziz en complet veston, debout à l’arrière d’un véhicule militaire, le chef d’Etat-major des forces armées à côté. Celui-ci avait les cinq doigts collés à sa tempe droite, alors qu’Aziz ne savait où donner de la main, alors qu’une clameur sans précédent accompagnait son passage.

Là-bas, à la tribune, il paraît que sa fillette, qu’il avait amenée avec lui, faisait déjà ses caprices, gamine turbulente qu’une dame assignée à son service tentait de retenir vaillamment.

Ce fut par la suite une longue et ennuyeuse procession de militaires, de tenues bigarrées, de raideur, de véhicules, d’armes, et de cadences portées sur l’asphalte, devant le silence prolongé d’un public que Tiartoura, réveillait de temps en temps à coups de grimaces sonores, de claironnements, de chants improvisés, de battements à tout rompre.

Le pauvre supporter « N°1 » des Mourabitounes gesticulait pratiquement seul, mais ses « Eydikoum Ya Chebab », ces « Houwa Chin Galou » créaient de l’ambiance et des délires. Seule note exotique dans ce décor du « déjà vu », la parade des armées étrangères, celles de pays voisins, le Sénégal, la Gambie, le Mali, le Tchad et le Maroc, qui avaient envoyé chacun un petit détachement d’une trentaine de militaires.

Clou de la journée, le lancement de douze parachutistes, dont l’un ira s’abattre au milieu de la foule. Comme un OVNI, il fut happé par des centaines de curieux qui tenaient à voir de près à quoi ressemblait vraiment un parachutiste, cette « chose » qu’ils avaient vu tournoyer dans les cieux.

Longtemps après la fiesta, durant laquelle leur regard s’était délecté du merveilleux, les habitants de Nouadhibou qui étaient sortis en plusieurs milliers, restèrent prisonniers des lieux, comme scotchés sur cette grande avenue, comme s’ils ne voulaient pas que les artifices du grand défilé s’arrêtent.

Cheikh Aïdara
Envoyé Spécial à Nouadhibou



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