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Vient de paraitre : « Le Lignage, Ehel Heddar, cinq générations de poètes en Mauritanie.»
Le Quotidien de Nouakchott - « Le Lignage, Ehel Heddar, cinq générations de poètes en Mauritanie.»
Cinq générations, du fondateur, Mohamed Heddar (1815-1886), à Zouheir Mohamed Vall né en 1982. Cinq générations de poètes hassanophones (langue hassaniya) originaires du Trarza, région du Sud-ouest Mauritanien. Dans cet ouvrage conçu et coordonné par Mohamed Heddar et Abdelvetah M'Hamed Alamana, vingt poètes du « lignage » sont présentés.
Le fondateur du « Lignage » des heddar, a voulu, explique l'auteure de la préface et éditrice, Mick Gewinner, « rendre accessible à tous les publics une poésie libérée de l’emprise des griots et du cénacle des lettrés. »
Le Lignage, édité par Les trois Acacias, 2016, est un ouvrage aéré, sobre, 149 pages…sur chaque page, le texte original d’un poème en Hassaniye et sa traduction en français.
Pour les « auteurs» de ce recueil de poèmes, un triple challenge : traduire d’abord, ensuite, traduire un poème et enfin, passer de l’oralité à l’écrit. « Cet ouvrage est un sacrilège, parce que transgression de l’oral. Une désobéissance écrite, en quelque sorte», écrit Abdelvetah Alamana, éditeur. La poésie Hassaniya, est, explique-t-il « poésie pour être dite. Dite et redite au gré de passage d’une station improbable du désert. » Où encore « la poésie maure s’emporte avec le viatique du nomade en mouvement. »
Mais en Mauritanie, comme ailleurs, le nomade est de moins en moins en mouvement…les poèmes voyagent moins. Partir, c’est « mourir un peu » disait Edmond Haraucourt. Mais pour le nomade et sa poésie, « rester, c’est mourir un peu. » d’où la pertinence de la « tentative de fixer des mots insaisissables nés ici et ailleurs et nulle part. »
Fixer pour préserver car avec les nouvelles générations, la transmission n’est plus évidente. Cet ouvrage, écrit son éditeur, « est en somme un croisement de tensions. Des tensions nourries par le désir de séduire l’attention d’un lecteur local et à la fois universel. L’attirer et l’embarquer dans cette pérégrination linguistique, aux passagers faits de mots migrants, qu’on tente d’installer et donc intégrer dans une territorialité. »
Khalilou Diagana
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Baba El Sgheir (1948-2005)
Hier est parti.
Ne portons pas son deuil devant Dieu trop longtemps.
Aujourd’hui, Dieu merci, après Hier se fait voir.
Toujours à Aujourd’hui succédera Demain.
Le temps, Dieu soit béni, se perpétue ainsi.
Demain s’en vient.
Qu’à-t-il en lui ? Quoi après lui ? Quoi dans ses flancs ?
Inévitablement, si quelqu’un Aujourd’hui
Au temps pense et repense, il n’est qu’Hier, Aujourd’hui,
Et Demain : trois jours font le temps, entièrement.