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Mauritanie : Aïchetou, des livres, du sable et des envies
Jeune Afrique - Un prénom, tout simplement. C’est ainsi que signe la plus iconoclaste et la plus prolifique des auteures mauritaniennes. Certains disent d’elle qu’elle est provocatrice. D’autres préfèrent éluder le sujet : « Ah, non ! Elle, elle n’est pas mauritanienne ! »
Aïchatou est hors code. « Je parle de la vie nomade de mon campement natal à travers ses coutumes : la vie des jeunes filles, le système des castes, l’esclavage, le racisme sournois et la déplorable condition de la femme en Mauritanie, réplique-t-elle. Je ne cherche pas à plaire. Je décris les tares dont nous devrons nous débarrasser si nous voulons avoir une société moderne et respectueuse de ses diversités. »
Née et élevée entre Boutilimitt et Rkiz, dans la région du Trarza, où « nomadisaient » ses parents, Aïchetou dit avoir tout appris sous la tente. Jusqu’à ce qu’elle atterrisse, en 1974, dans le Paris de Sartre et Beauvoir.
Elle a alors 14 ans. Après son bac et des études de lettres et d’histoire à la Sorbonne, en 1981, elle s’installe en Italie avec « son Ligure » (qu’elle épouse), puis en Éthiopie, avant de revenir à Paris terminer ses études en histoire romaine.
Plus de vingt-cinq ans après avoir quitté son désert, elle retourne en Mauritanie, espérant y faire sa vie, mais elle ne reconnaît plus son peuple et rentre à Paris, où elle vit depuis. Une blessure de laquelle naît son premier roman, publié en 2003 : L’Impossible retour, qui raconte sa tentative ratée de se réinstaller dans une Mauritanie disparue.
Allers-retours
Depuis, la souffrance de ne reconnaître ni les hommes ni les cultures de son enfance transparaît dans toute son œuvre, engagée, et ses titres, à la fois rageurs, factuels et poétiques : La Ligurienne est partie (2004), DivorceZ de Lui…, Sarabandes sur les dunes (2005), L’Hymen des sables (2006), Elles sont parties (2007), la trilogie des Chroniques du Trarza : Cette Légendaire année verte (2007), La Fin des esseulées et Rabia est arrivée (2008), En attendant ses dix-huit ans (2009), Les Esseulées (2010) et En attendant la lapidation (2013).
Chacun des romans d’Aïchetou (tous publiés chez L’Harmattan) embarque le lecteur dans un éternel aller-retour entre le passé bédouin et le présent parisien de la narratrice.
Enseignante-documentaliste dans l’académie de Créteil, en région parisienne, l’auteure vient d’achever un essai : Les Femmes du Messenger (titre provisoire).
• En attendant la lapidation (Éditions L’Harmattan, 166 p., Paris 2013)