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16-08-2019

13:51

Accord de pêche RIM-UE 2019: une autre épreuve de l’ère Ghazouani

Dr Sidi El Moctar Taleb Hamme - A l’issue de la réunion de la Commission mixte mauritano-européenne pour la pêche maritime, tenue à Nouakchott du 10 au 12 décembre 2018, il était prévu d’entamer, à partir d’Avril 2019, les négociations du renouvellement de l’accord de pêche liant notre pays à l’Union Européenne.

Curieusement, il a été constaté que cet accord n’a pas fait partie des dossiers prioritaires ou urgents tels que le remboursement des biens publics détournés par certains, l’aménagement de la Place de la Liberté, la libération de Ould Mkheitir, etc.

Autrement dit, cet accord de pêche RIM-UE semble avoir été, volontairement, laissé pour constituer l’une des multiples épreuves de l’ère Ghazouani.

Bien qu’il s’agit d’un exercice habituel depuis la conclusion du premier accord avec la CEE en 1987, ce sont les conditions dans lesquelles vont démarrer les négociations qui peuvent faire de cet exercice, cette fois-ci, une épreuve pour le nouveau gouvernement du Président de la République Mohamed Cheikh Al-Ghazouani.

La stratégie sectorielle de pêche 2015-2019, a pris fin et tarde à être remplacée. Des voies se lèvent déjà pour s’opposer au fait de confier l’évaluation de cette stratégie échue au trio ‘’gestionnaires centraux du Ministère-IMROP-Projet PRAO’’.

Une partie neutre, serait la solution souhaitée eu égard aux divisions des avis sur les fondements de cette stratégie finissante et l’espoir fondé, à la lumière du programme électoral du nouveau Président de la République, sur celle à mettre en place.

Il y a également la propagande menée autour de certains résultats du Groupe de Travail de l’IMROP organisé en février 2019 tels que l’évaluation de certains stocks et l’importance, sans précédent, des volumes et des valeurs des productions réalisées en 2017 et 2018.

Quand même, il n’échappe à personne que (i) les chiffrent relatifs à la production et aux recettes cachent conjonturellement des catastrophes qui ne se manifesteront que dans quelques années à venir et que (ii) l’impact de l’insuffisance quantitative et qualitative des données statistiques sur les évaluations des ressources a été, lui aussi, très remarqué.

Le contexte en question, se caractérise aussi par l’absence et/ou la dégradation des performances des maillons sur lesquels repose généralement tout système de gestion par quotas et dont dépend obligatoirement sa réussite.

S’ajoutent à ce genre de contraintes, les maversations répétées et parfois insupportables poussant, parfois, les protégés de toute activité prohibée (vente de drogue, migration clendestine, surveillance des frontières, etc.) à se révolter au point de rompre le silence et les contrats tacites préétablis avec leurs protecteurs. La presse nationale ne cesse d’en dévoiler des cas révélateurs.

Les quotas supposés distribués par le Président de la République sortant, constituent un autre élément qui contribue à rendre le contexte des négociation moins aisé que d’habitude. De tels quotas risquent en effet de rendre plus complexe l’opération d’allocation du TAC, en génaral et de détermination de la part à vendre aux étrangers, en particulier.

Aussi, ces quotas-bonus risquent d’échapper aux nationaux et tomber, en conséquence, aux mains de promoteurs étrangers par le biais d’intermédiares déguisés (http://cridem.org/C_Info.php?article=720258).

Le dernier élément dudit contexte –et non le mooindre- en constitue

le fait que les négociations RIM-UE vont se dérouler en une période de transition, c'est-à-dire à un moment où normalement un système se défait et un autre cherche à se mettre en place. Pourtant, il n’est point exclu d’assister tout simplement à une métamorphose du système Aziz en vue d’une sorte d’adaptation apparente aux slogans prônés par Al-Ghazouani et aux attentes de ses soutiens.

Le retour du Ministre Nani Chrougha au département de la pêche, multiplie la chance du premier gouvernement du Président de la République Ghazouani de réussi cette épreuve de renouvellement du protocole de l’accord de pêche RIM-UE.

Cette épreuve où le plus difficile serait le fait que le Département de la pêche doit répondre, à cette occasion, aux questions que se posent la profession et beaucoup d’autres Mauritaniens qui suivent désormais la gestion des ressources naturelles du pays.

L’article intitulé « Groupe de Travail de l’IMROP 2019: avoir dans la mire les enjeux à venir » (http://cridem.org/C_Info.php?article=720258), avait soulevé certaines parmi de telles questions se rapportant surtout à :

- l’abandon du renouvellement de la flotte nationale pour faire des accords de pêche la seule alternative possible devant l’Etat quant à remplacer les navires devant chaque fois sortir de l’activité.

Alors le passage du système de gestion par effort de pêche à celui de quotas et l’application de ce système, de manière brusque et pour toutes les pêcheries, seraient destinés à empêcher les autorités de réculer ou de recourir à d’autres choix (sorties de détenteurs de navires et entrée de nouveaux promoteurs sans avoir préalablement des navires et sans en acquérir de nouveau);

- l’introduction de l’affrètement de navire coque-nue et la poursuite de l’autorisation de l’affrètement des embarcations côtières pour les usiniers de farine et huile de poisson. N’est-ce pas les navires RSW et ceux construits localement par les Chantiers Navals de Mauritanie, devraient empêcher le recours à de telles embarcations en conformité avec la politique de mauritinanisation de la main d’œuvre à bord des navires opérant dans la ZEEM ;

- les dépasments constatés annuellement par rapport aux TACs prédéfinis (par la recherche) ;ceux-ci ne pouvant découler que de la mauvaise gestion ou du fait que les conditions recquises pour l’application du système des QIT, ne sont pas réunies ;

- les impacts de la prolifération des usines de farine et huile de poisson sur la ressource, les petits pêcheurs, l’approvisionnement du marché intérieur, la santé des populations et de l’environnement, etc.

Malgré les défis et les enjeux auxquels est faite allusion dans ce qui précède, Nani Chrougha est l’homme sur lequel peut-on fonder un espoir puisque qu’il jouit de la confiance totale du Président de la République, a les compétences techniques et professionnelles et enfin connait, plus que quiconque, les méandres de l’ensemble des problèmes du secteur des pêches que les plus grands experts nationaux pourraient diagnostiquer.

Que Son Excellence se mette donc au travail. C'est-à-dire finir d’abord les préalables à l’élaboration et la mise en œuvre d’une nouvelle stratégie sectorielle en parfaite harmonie avec la Stratégie du Développement Accéléré et de la Prospérité Partagée 2016-2030 (SCAPP) et qui intègre les engagements du Président de la République dans le domaine de la pêche.

Et ensuite, mettre en œuvre un plan d’action déclinant les objectifs de la nouvelle stratégie et englobant les actions relatives à la pêche, notamment dans la Déclaration de Politique Générale du Gouvernement pour 2020.

Immédiatement après, Monsieur le Ministre devra revoir l’organigramme de son Département pour un souci plutôt de mise en relief des priorités et puis pour plus d’efficacité fonctionnelle (http://cridem.org/C_Info.php?article=667092).

Enfin, suivra le déploiement des ressources humaines. Là, il ne devra plus s’agir d’une simple opération de remplissage des cases de l’organigramme, mais plutôt de se débarrasser des agents ayant réduit les performances du secteur par leur mauvaise gestion et/ou l’entaché même par des comportements immoraux ou contraire à l’éthique. Un autre souci, devra être celui de chercher, au sein de la majorité et de l’opposition, les compétences pour mettre l’homme qu’il faut au poste qu’il faut.

Par ailleurs, rendre les membres du gouvernement responsables de leurs départements respectifs et s’engager à leur offrir les moyens nécessaires pour réaliser ses engagements, n’est-il pas synonyme, pour le Président de la Républiique, d’obligation de résultats ? Si oui, cela signifierait aussi, pour nous citoyens, la récompense de la réussite et la sanction de l’échec. Senera (سنرى.)

Dr Sidi El Moctar Taleb Hamme



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