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20-07-2021

16:21

En Belgique, des sans-papiers mauritaniens et étrangers en grève de la faim et de la soif pour leur régularisation

Parmi eux, de nombreux Mauritaniens qui ont quitté le pays depuis trois ans, cinq ans, voire dix ans. Ils viennent du Maroc, d’Algérie, de Tunisie, d’Égypte, du Pakistan ou encore de Maroc. La plupart d’entre eux sont en Belgique depuis trois, cinq, ou dix ans.

Tous ont un travail – ou avaient, du moins, avant la pandémie -, tous ont un appartement. Ne leur manquent que les papiers qui leur permettraient d’être protégés des exploitations dont ils pourraient être victimes au travail, notamment.

Le combat pour la régularisation a commencé fin janvier dans une église de Bruxelles, avec la création de L’union des sans-papiers pour la régularisation (USPR). Femmes, hommes et même enfants ont décidé de s’unir dans une action forte : occuper le lieu, généreusement prêté par le père Daniel Alliët, pour demander leur régularisation.

Au fil des jours, la bulle de protestation s’est élargie. L’Université Libre de Bruxelles et la Vrije Universiteit Brussel (VUB) ont prêté des locaux. Mais, si les semaines passaient, le secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, Sammy Mahdi, fils d’un réfugié politique, restait, lui, ferme sur ses positions. Pas de régularisation collective au programme. Il ne voulait pas céder “au chantage”.

Grève de la faim et tentatives de suicide

Le combat a pris un autre tournant à la fin du mois de mai. Sur les trois sites occupés, plus de 450 personnes ont entamé une grève de la faim. “Pour la dignité”, a lancé l’Union des sans-papiers pour la régularisation à l’annonce du mouvement.

Face “au silence du gouvernement”, les voix se sont élevées ailleurs, et même jusqu’à l’ONU. Le 15 juillet, le Rapporteur spécial sur les droits de l’Homme et de l’extrême pauvreté et le Rapporteur spécial sur les droits de l’Homme des migrants ont, à leur tour, interpellé Sammy Mahdi, rappelant les conditions de vies de ces travailleurs sans-papiers et les mesures à prendre pour respecter les droits humains, dans un pays comme la Belgique.

Après 27 jours de grève de la faim, premier drame, même si le pire a été évité. “Un occupant de l’ULB âgé de 43 ans a tenté de mettre fin à ses jours, (…) à 19h”, annonçait, le 19 juin, l’Union pour la régularisation des sans-papiers sur sa page Facebook.

Et d’ajouter : “Cette séquence dramatique nous pousse à croire qu’il est nécessaire qu’un processus politique de régularisation soit actée afin d’éviter qu’un malheur ne vienne ébranler notre quotidien”.

Six jours plus tard, nouveau drame. “Cette fois-ci la personne s’est entaillée le bras au point où elle aurait perdu une partie importante de sa motricité. Situations de stress incessantes, chocs liés à cette politique de non régularisation, nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre sans qu’une action politique majeure ne soit menée”, indiquait le collectif, toujours sans réponse du gouvernement.

Jusqu’à la grève de la soif

Depuis une semaine, 300 des grévistes ont décidé d’aller plus loin. Ils ont entamé une grève de la soif, se cousant même la bouche pour certains. Et désormais, “on parle de quelques jours de survie”, assure le docteur Michel Roland, ancien président de Médecins du monde, qui accompagne les sans-papiers depuis le début de leur grève de la faim.

“La circulation du sang diminue, le rythme cardiaque augmente très fort, la tension diminue et le rythme respiratoire s’accélère, ce qui augmente encore la perte d’eau…”. Toujours selon le Docteur Roland, “tout ceci accentue les problèmes neurologiques et surtout l’insuffisance pré-rénale déjà initiés par la grève de la faim. Les troubles ioniques que cela génère entraînent une défaillance des organes nobles, comme le cœur avec une issue fatale”.

Brouilles politiques

Face à la situation, la question a fini par gagner le cercle politique belge, au-delà de Sammy Mahdi. Ce 19 juillet, les partis politiques du PS et d’Ecolo ont annoncé vouloir démissionner en cas de décès des sans-papiers, rapporte La Libre Belgique. Une décision qui viendrait ébranler le gouvernement au pouvoir, formé après un accord gouvernemental difficilement validé.

Ce 19 juillet, Sammy Mahdi a, de son côté, décidé de faire un pas en avant. Il “va désigner un envoyé spécial qui servira de relais pour orienter les grévistes de la faim vers les procédures existantes”, indique La Libre Belgique.

Et il l’assure, dans son communiqué, “il va tendre la main pour sortir de l’impasse”. “Toutes les candidatures seront examinées minutieusement, en tenant compte de tous les éléments du dossier. Cela ne déroge pas aux règles existantes. Les dossiers sont traités en priorité, afin de mettre un terme à cette grève de la faim dans les plus brefs délais”, a-t-il ajouté.

En attendant que les choses bougent, l’USPR, son comité de soutien et la coordination de la campagne We Are Belgium Too ont écrit au roi Philippe de Belgique.

Le dernier appel au secours ? Le roi est en tout cas invité à les rencontrer : “L’Union des Sans-Papiers pour la Régularisation (USPR) serait prête à rouvrir les portes de l’église du Béguinage pour vous recevoir : une visite de Sa Majesté, accompagnée de Sa Majesté la Reine Mathilde, serait un geste fort apprécié par les grévistes et leurs soutiens”.

Par La Rédaction de Cridem, avec TelQuel (Maroc)

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