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08-02-2024

17:48

AVOMM - Collectif des Veuves - FONADH - ODISSI - VOIX | Déclaration

Nous, soussignés, collectif et associations des victimes et ayants droit des martyrs des violations massives des droits de l’Homme dans les années 1980-1990 en Mauritanie, sommes activement engagés dans la question du génocide pudiquement appelé « Passif humanitaire » en Mauritanie.

Nous saisissons l’opportunité de faire le point sur le processus de recherche d'une solution concernant ce douloureux dossier pour clarifier notre position sur cette question. Cette démarche vise à éclairer l’opinion nationale et internationale sur notre vision des tentatives de concertation initiées par l’État ainsi que le dialogue interactif mené avec les instruments des Droits de l’Homme des Nations Unies dont la Mauritanie est partie.

Dans ce cadre, nous commençons notre analyse en examinant les discussions entre les coalitions représentant les organisations des victimes du "Passif humanitaire" et le Président Mohamed Cheikh Ould Ghazouani.

Depuis 2021, sous l'égide des facilitateurs auprès du pouvoir, les organisations des victimes ont élaboré une feuille de route, en quatre points, qu'elles ont présentée au Président de la République lors d'une audience accordée à leurs représentants issus des trois coalitions qui les regroupent. Cette plateforme a été acceptée par l'autorité suprême, qui a mandaté deux ministres pour coordonner sa mise en œuvre.

Suite à plusieurs réunions entre les parties prenantes du pouvoir et les organisations des victimes, les échanges ont buté sur l'approche de la justice transitionnelle.

Dans ce contexte, les autorités ont recommandé aux victimes de définir, elles-mêmes, le contenu qu'elles donnent à ce sujet. Cependant, la proposition du mécanisme de la justice transitionnelle présentée par les victimes aux ministres délégués du Président Ghazouani n'a pas reçu leur assentiment ; disant l'État rejette toute action liée à la recherche de vérité et de justice.

Par conséquent, les ayants droit des martyrs ont publié une déclaration annonçant la cessation de leur participation aux discussions avec le pouvoir tant qu'une commission d'enquête indépendante ne sera pas mise en place.

Par la suite, les discussions entre l'État et les organisations des victimes ont vacillé. Certaines parmi celles-ci, étant déterminées à poursuivre le dialogue malgré l'affaiblissement des revendications, ce qui pourtant n'a pas empêché les autorités de rejeter cette nouvelle demande révisée.

Durant la période de concertation sur le "Passif humanitaire" de 2020 à 2022, le suivi des recommandations prioritaires adoptées en juillet 2019 par le comité des droits de l'homme des Nations Unies chargé de la mise en œuvre du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques concernant la Mauritanie, n’a pas pu être effectué.

La mission prévue à Nouakchott à partir de juillet 2020, n'a pas été autorisée par l’État. Ce n'est qu'en août 2022 que le CCPR, chargé du secrétariat du comité des droits de l'homme, a été autorisé à effectuer sa mission de suivi en Mauritanie ; et que l’État partie n' a été examiné par le comité des disparitions forcées que lors de sa 25ème session en septembre 2023.

Il est important de rappeler que la question du "Passif humanitaire" était hissée parmi l'une des trois observations prioritaires, lors de l'examen de la Mauritanie par le comité des droits de l'homme en 2019, devant faire l'objet d'un suivi et d'une évaluation de sa mise en œuvre. A l'examen de la Mauritanie à la 25ème session du comité des disparitions forcées en septembre 2023, une étude spécifique et approfondie est réalisée par les experts de ce comité sur la question du "Passif humanitaire".

Ainsi, il est demandé à la Mauritanie d'adopter une approche globale de mise en œuvre du mécanisme de la justice transitionnelle, qui devrait passer par la mise en place d'une commission d'enquête indépendante chargée de faire la lumière sur les exactions commises, l'établissement d'une liste exhaustive des bourreaux et des tortionnaires, le jugement des présumés auteurs ou complices par les juridictions compétentes ( même en l'absence de plaintes selon les normes de la convention), afin de prononcer les sanctions appropriées auxdites violations.

Le comité a également souligné l'incompatibilité de l'amnistie avec le droit pénal international et la nécessité de former les juges, le personnel impliqué et les victimes, afin de mettre en œuvre la convention.

À la lecture de ce contexte, nous, organisations soussignées, soucieuses de la stabilité de la Mauritanie et conformément à notre démarche éthique :

Appelons la Mauritanie (à travers le comité technique interministériel chargé des rapports sur les droits de l'homme et la Commission Nationale des Droits de l’Homme) à adopter une attitude proactive et positive, en répondant aux observations des organes techniques des Nations Unies et en acceptant l'offre d'accompagnement des experts, afin de tirer parti des bonnes pratiques pour résoudre correctement le problème du « Passif humanitaire » ;

Attirons l'attention des autorités sur les bénéfices apportés par le suivi normatif des observations prioritaires lors de l'examen de la Mauritanie par le comité des droits de l'homme en 2013, concernant l'harmonisation des instruments juridiques internationaux avec les lois nationales, la torture et l'esclavage.

Soulignons également les conséquences néfastes générées par une approche variable dans le traitement des questions relatives aux droits de l'homme, alimentant ainsi les injustices, les inégalités et les contradictions dues à des mesures prises à géométrie variable ;

Exprimons notre solidarité envers les parlementaires indépendants qui ont eu le courage de dénoncer la présidence de cette assemblée par un tortionnaire et criminel et demander la vérité et la justice pour les martyrs et les victimes du « Passif humanitaire ».

Exigeons à cette occasion que l'immunité parlementaire de la députée Mariem Mint Cheikh soit respectée ;

Lançons un appel pressant aux parlementaires épris de paix et de justice, afin qu'ils soutiennent la création d'une coalition de suivi holistique des recommandations des Nations Unies pour le règlement du « Passif humanitaire », en adoptant une loi abrogeant la loi scandaleuse d'amnistie n°93-23 et en créant une commission d'enquête indépendante chargée de faire la lumière sur cette sources d’informations a conduit à une triangulation et un recoupement des informations pour parvenir à des données plus fiables;

• Collectes d’informations de terrain : certains documents qui ont servi de base de travail sont le résultat des recherches de terrain conduites en amont par les mauritaniens –de la société civile dirigeants des osc ou des coalitions en contact direct avec les acteurs, personnes victimes ou concernées/touchées par les problématiques soulevées ;

• Consultation de personnes ressources : l’actualisation de certaines données qui étaient en cours a nécessité le recours à des personnes-ressources externes à la coalition ;

• Réunions d’information organisées à Nouakchott a permis de regrouper les dirigeants ou représentants des organisations actives des droits humains qui travaillent sur la thématique des disparitions forcées de la période sombre de l'histoire de la Mauritanie, d'accorder des réparations individuelles et collectives ainsi que des garanties pour éviter que de tels faits ne se répètent plus jamais.

Nouakchott, le 08 février 2024

Aide aux Veuves et Orphelins des Militaires Mauritaniens-AVOMM : Président Monsieur Ousmane Abdoul Sarr

Collectif des Veuves en Mauritanie : Présidente Madame Houleye Sall

Forum des Organisations Nationales des Droits de l'Homme -FONADH:Président Monsieur Sarr Mamadou

Organisation pour le Développement International Social Solidaire Intégrée : Présidente Madame KANE haby Zakaria Konté

Veuves Orphelins contre l'Impunité et la Xénophobie : Présidente Madame Djariyatou Toumbou





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