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Et si vous entendiez les murmures de la jeunesse
À l’aube d’une élection présidentielle dans notre patrie, avec un président sortant et six autres candidats, quelle est l’appréciation de la jeunesse pour le prochain quinquennat ? Et si ceux qui aspirent à la fonction suprême du pays s’arrêtaient un moment pour écouter cette voix raisonnable de la jeunesse, qui murmure au lieu de hurler ?
Car, à vrai dire, cette jeunesse a déjà voté, sans attendre les urnes du 29 juin 2024. Non pas parce qu’elle ne croit pas en la démocratie ou qu’elle pense que l’issue est déjà scellée, mais parce qu’elle est pacifique, sage et profondément patriote.
Lorsque la jeunesse analyse cette campagne, où chaque candidat prêche son programme, il apparaît que les discours se ressemblent étrangement.
Le président parle de réformes judiciaires, administratives, financières, de développement des infrastructures, des secteurs productifs, du développement humain, de diplomatie et de sécurité. On se rend vite compte que, hormis un objectif de 55 % du PIB à l’horizon 2050, un cap lointain et déconnecté de l’urgence actuelle, ces programmes manquent de fond et de clarté.
Alors, que reste-t-il à la jeunesse pour jauger, sinon suivre les profils et les meetings de campagne, et écouter les discours des uns et des autres pour en tirer une conclusion simpliste ? Un président sortant qui se présente comme celui ayant réussi à stabiliser le pays, appliquant une politique sociale avec un nouveau slogan pour la jeunesse.
Un candidat extrémiste qui tente de changer son image de raciste en exploitant l’échec de l’éducation et les inégalités sociales. Un candidat avec un calendrier d’organisations internationales vouées à l’échec, comme déjà vu dans les pays où son clan était au gouvernement. Un avocat-député perdu dans ce cirque électoral, sans véritable désir électoral.
Un excellent professeur qui s’est trompé de classe et de bloc opératoire. Un candidat suivant la vieille tradition de candidature par ethnie. Et un chef de service mal positionné, incapable d’étaler un bilan équilibré. Voilà les six profils, loin de pouvoir incarner une posture présidentielle.
Une vérité éclate au sein de ce carnaval : l’absence d’une alternative sérieuse au président sortant, qui demeure le seul choix pour garder notre chère patrie stable. Et notre jeunesse le sait pertinemment. Malgré les critiques et les difficultés du précédent quinquennat, qui ont poussé des dizaines de milliers de jeunes à s’exiler, dont certains membres du camp de la majorité disent qu’il s’agit de coïncidences alors qu’il s’agit en réalité de leur politique ayant provoqué la plus grande vague de migration de la jeunesse mauritanienne.
Malgré tout cela, la jeunesse reste consciente qu’il faut faire barrage à l’extrémisme, au racisme, au prophétisme et à la stigmatisation, car notre patrie est belle et merveilleuse dans son union, sa diversité, sa cohésion et sa stabilité.
Cependant, la jeunesse exprime une profonde déception face à la gouvernance des élites arabophones, des cloportes qui ont entouré le président. Une caste déconnectée des réalités du peuple. Cette jeunesse a déjà voté, pacifiquement, en montrant son mécontentement par l’exil.
Des jeunes, autrefois boursiers d’État dans de grandes écoles, revenus pour servir leur pays, certains étaient des chefs de service dans des ministères, des jeunes très compétents, se retrouvent aujourd’hui de l’autre côté de l’Atlantique, incapables de vivre dignement sous un gouvernement ignorant les principes de développement économique, appliquant une politique sociale de rase gratis courtermisme qui ne permet l’émergence d’une classe moyenne mais en réalité la détruise.
En effet, d’autres ont choisi Poussy-Saint-Antoine comme lieu de résidence, et les multinationales comme lieu de travail, car dans les administrations d’ilot C, ils n’ont pas de place. Cette fuite des cerveaux, capable de générer des milliards pour d’autres pays, est le triste récit de notre jeunesse.
Malgré tout, cette jeunesse se portera responsable et votera pour le président sortant, afin de faire barrage à l’extrémisme et à la confusion.
Enfin, cette jeunesse n’est pas dupe. Réduite à un rôle de divertissement dans une campagne soi-disant dédiée à la jeunesse, elle aurait dû participer à la rédaction d’un vrai programme. Un programme qui renforcerait notre éducation avec des propositions réelles à l’ère du numérique, qui sauveraient l’avenir du pays. Un programme d’une justice de proximité, un programme accordant plus de prérogatives à l’IGF, à l’IGE, à la Cour des comptes pour garantir la bonne gouvernance.
Un programme créant un hub attractif pour l’entrepreneuriat, un programme répondant à la crise du logement de la jeunesse par des vrais chantiers immobiliers, un programme chiffré digne d’être porter par le président, un programme enrichissant notre pays à long terme et incarnant les valeurs de notre république.
La jeunesse est capable de construire, de développer et de hisser la Mauritanie au rang des grandes nations, un objectif que les précédents gouvernements, prisonniers de mythes sociaux, n'ont jamais pu atteindre.
Que la promesse du candidat que nous devrions élire par responsabilité envers le pays le 29 juin 2024 soit tenue. Si réellement nous devons voir cette promesse se réaliser, nous devrions nous attendre à voir, à la primature, un chef de gouvernement jeune, dans la vingtaine ou la trentaine. Car c’est cela, la jeunesse.
Dr. Mouhamdy Dahoud