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12-12-2024

12:52

Mauritanie: les légumes importés du Maroc toujours surtaxés et pour plus longtemps

Le360 Afrique - En 2025, les exportations de légumes vers la Mauritanie, toutes origines géographiques confondues, devront supporter la surtaxe sur les produits agricoles. La décision, actée dans la loi de finances de l’année prochaine, comporte toutefois quelques changements relatifs à la périodicité et à la durée de l’application de cette imposition introduite pour la première fois en janvier 2024.

Une décision qui impactera aussi bien les exportateurs marocains que les consommateurs mauritaniens. Les exportateurs de légumes marocains et les consommateurs mauritaniens devront faire face aux conséquences de la surtaxe sur les importations de légumes par la Mauritanie.

Instaurée pour la première fois en 2024 par le gouvernement mauritanien, dans le cadre de loi de finances rectificative, cette surtaxe sur les légumes importés, qui avait alors pris au dépourvu producteurs et transporteurs marocains, a été reconduite dans la loi de Finances 2025. Ainsi, la taxe appliquée sur les légumes importés passera de 13,73% en temps normal à 39,23% durant la période d’application de la surtaxe.

Il faut le souligner d’emblée: cette surtaxe concerne les légumes importés par la Mauritanie quelle que soit l’origine géographique de ces produits. Seulement, malgré les importations en provenance des Pays-Bas, de l’Égypte, du Sénégal et de la Turquie, le Maroc demeure le premier pourvoyeur de légumes du pays.

Le bien nommé «Marché marocain» de Nouakchott sert de baromètre du marché mauritanien des légumes. Les prix y valsent en fonction des conditions de l’offre en provenance du voisin du nord. Une dominance qui explique que l’on se focalise davantage sur la surtaxe des produits agricoles venant du Maroc.

Pour l’année qui démarre dans quelques jours, les autorités mauritaniennes ont maintenu la surtaxe sur les produits agricoles, comme cela est explicité dans la loi de finances 2025, avec toutefois quelques changements sur la périodicité et la durée de son application.

«La proposition de modification des périodes d’application de la taxation spécifique sur les importations de certains produits agricoles, entrée en vigueur au début de 2024 conformément à la loi de finances modifiée de 2023, répond aux observations et recommandations des acteurs nationaux dans le domaine agricole, notamment la filière des légumes.

Leurs remarques et suggestions s’accordent sur l’adoption d’une liste des mêmes produits ciblés par la loi de finances rectificative de 2023, avec un décalage de la période d’application de la mesure pour la faire coïncider avec la récolte des produits nationaux qui commence à la mi-février de chaque année et s’étend jusqu’à fin juin la pomme de terre, carotte, de poivron, de chou-fleur et de chou».

Rappelons que pour l’année en cours, cette surtaxe a été appliquée sur la période allant du 1er janvier au 30 avril 2024. La durée d’application de la surtaxe a donc été rallongée de 15 jours.







Et plus encore, la loi de finances 2025 précise que «la période serait prolongée pour les tomates et les oignons jusqu’à la fin août de chaque année». En clair, pour ces deux légumes, la durée de la protection de la production locale s’étalera désormais sur six mois et demi à partir de la mi-février de chaque année.

Plusieurs objectifs sont visés à travers cette surtaxe. En premier, assurer une certaine protection aux producteurs locaux de légumes grâce à la surtaxe qui rend leurs produits maraichers relativement compétitifs.

Le changement de la périodicité de l’application de la surtaxe «permettra d’atteindre l’objectif visé: protéger la production locale et augmenter sa compétitivité pendant la période de récolte, tout en fournissant des légumes importés à des prix abordables durant la période où les produits locaux ne sont pas disponibles», selon le document de la loi de Finances.

Ensuite, en surtaxant les légumes importés, les autorités souhaitent attirer des investisseurs étrangers, notamment marocains, qui ont une expertise avérée dans la production de légumes, à s’implanter en Mauritanie.

Certains d’entre eux, contraints de quitter le Royaume à cause des restrictions sur certaines cultures grosses consommatrices d’eau, se sont installés en Mauritanie et y produisent des pastèques de qualité, approvisionnant le marché local et exportent une grande partie vers les marchés européens.

Reste que cette surtaxe ne fait pas que des heureux. Si elle protège les producteurs locaux, elle a aussi des impacts négatifs sur le marché local, notamment chez les consommateurs. En effet, les exportateurs étrangers de légumes répercutent, plus ou moins totalement, cette surcharge fiscale sur les importateurs mauritaniens, qui, à leur tour la répercutent sur les grossistes et ainsi de suite jusqu’au détaillant qui fait supporter la hausse sur le consommateur mauritanien.

Conséquence, la surtaxe se traduit par un fort renchérissement des prix des légumes sur le marché local du fait de l’insuffisance et de la faible compétitivité de la production locale qui assure, au plus, 25% des besoins du pays en légumes. Ainsi, en début d’année, cette taxe avait entrainé une pénurie de légumes et une flambée des prix de certains légumes concernés par la mesure.

Partant, cette décision est dénoncée par les acteurs de la filière d’importation et de distribution des légumes, et surtout par les consommateurs. Enfin, il est utile de signaler que la surtaxe des légumes ne concerne que les produits agricoles destinés au marché mauritanien. Ceux qui ne font que transiter par le territoire mauritanien et qui sont destinés aux marchés ouest-africains ne sont pas concernés.

Par Moussa Diop



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