...sur les insuffisances de la réglementation.

On parle de plus en plus de boom minier de la Mauritanie. Il est vrai que pas un Conseil des Ministres de ne se passe sans que plusieurs attributions de permis de recherche soit faites. Mais côté exploitation, le paysage s’est stabilisé depuis 4 ans sur les 3 mines existantes :

SNIM, MCM, Taziast. On peut s’interroger bien-sûr, sur ce que rapportent ces exploitations minières au pays, en termes budgétaires ou termes macro-économiques et des chiffres sont produits régulièrement. Mais il est une approche complémentaire qui consiste à se demander ce que « coûte » au pays l’exploitation de ces sites miniers. On parle ici d’impact social et environnemental.

Le Ministère du Pétrole de l’Energie et des Mines a diligenté une mission d’audit au début de 2011 qui a été réalisée par un bureau international indépendant des opérateurs miniers : le BRGM (français) en association avec le cabinet mauritanien BEMP (Directeur : Abdel Kader ould Saleh).

La mission a commencé en juillet 2011 et a duré 4 mois, jusqu’à fin octobre : un record pour une intervention à la merci d’entretiens de fonctionnaires, d’opérateurs et de membres de la société civile . Les résultats de l’étude on été restitués le 14 novembre à l’Hôtel Atlantique, par l’équipe intervenante dirigée par Monsieur F.Blanchard du BRGM.

L’importance du sujet pouvait se mesurer à la participation des Ministres à la cérémonie d’ouverture. Cette dernière était sous la Présidence du Ministre du Pétrole de l’Energie et des Mines, entouré des Ministres de l’Hydraulique et de l’Assainissement, de la Santé, de l’Environnement et du Développement durable, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et des technologies nouvelles.

L’implication interministérielle s’expliquera au cours des exposés et des débats dans lesquels on a pu percevoir les risques et impacts multiformes des activités minières massives à ciel ouvert. On a pu aussi être impressionné par les mesures pour contenir les risques déployées par les opérateurs et souvent méconnues.

La journée de restitution avait un plan simple :

• Analyse de la réglementation nationale et internationale applicable au secteur minier

• Analyse de la perception sociale du secteur minier

• Audit environnemental et social de la mine d’Akjoujt

• Audit environnemental et social de la mine de Taziast

• Audit environnemental et social de la SNIM

• Synthèse et recommandations

Aspects réglementaires

Dès cette première partie on a pu juger de l’indépendance de l’audit par l’inventaire sans complaisance des bizarreries, insuffisances, contradictions, oublis, amalgames qui caractérisent la réglementation minière et que Maître Yazid a asséné sans pitié. L’Administration gardienne de la réglementation a dû se sentir « sur la sellette » et peut-être a-t-elle compris qu’elle a « du pain sur la planche ».

Le défi n’est pas mince : un cadre réglementaire cohérent, transparent et applicable est non seulement nécessaire au contrôle de l’activité minière mais également nécessaire à l’attrait des investisseurs particulièrement sourcilleux sur la transparence de la réglementation.

Perceptions

On aurait pu penser que commencer par le factuel des audits et conclure par la perception sociale aurait été plus judicieux. En effet l’évocation de la perception sociale des activités minières, avant la présentation du problème, par Monsieur F. Diabira du bureau BEMP, a provoqué une irruption de questions particulières de la part des représentants de la société civile présents. Quelques uns de ces échanges avaient à voir avec le sujet. Mais l’émotion ou la truculence des remarques étaient toujours là pour rappeler que l’activité minière et ses impacts sont moins une affaire de pierres qu’une affaire d’êtres humains de chair.

Audits des opérateurs

Les audits ont suivi la même méthodologie :

• Appréciation du management environnemental : les efforts en matière de procédures, documentation et organisation pour maîtriser les risques environnementaux et développer le social. Ces efforts se traduisent dans un PGES : Plan de Gestion environnemental et social.

• Appréciation de la performance environnementale : les résultats

Audit MCM

Cette mine de cuivre et d’or produit des déchets cyanurés et des déchets non cyanurés mais amiantés. L’audit a fait ressortir un niveau médiocre du management environnemental : documentation insuffisante, faiblesse des effectifs, procédures à améliorer.

Par contre les résultats environnementaux ont été salués : dôme de confinement des poussières, géotextile dans les bassins de rétention, remplacement de l’eau douce par de l’eau saumâtre dans le process pour consacrer l’eau douce à la ville, consultations publiques régulières, existence d’un bureau de liaison, absence de plainte au registre des plaintes en 2011.

Il a été regretté que la performance environnementale ne sa traduise pas dans la documentation réglementaire et sur dans un plan de communication qui montrerait à la population d’Akjoujt les efforts et leurs fruits.

Audit Taziast

La mine d’or est l’exploitation la plus jeune (comprenez « la moins expérimentée ») des mines examinées. L’intervenant l’a souligné d’emblée comme pour atténuer les conclusions « salées » qui allaient arriver. Son diagnostic fut sans appel : Faible respect de la réglementation, documentation calamiteuse, absence de certains plans. En matière de performance environnementale le résultat fut un peu meilleur.

Toutefois on comprend bien que le procédé de lixiviation consistant à répandre sur les kilomètres carrés un mélange de minerai, d’acides et de cyanures, avant de récupérer un jus concentré d’or, soit difficilement contrôlable et on ne peut que saluer la mise en place de géotextiles et de filets protecteurs contre ceux qui seraient attirés par cette immense étendue d’eau (en apparence).

Audit SNIM

Il s’agit de la mine de fer est-il besoin de le préciser, qui exporte son minerai quasi brut sans process depuis Zouérate jusqu’à Nouadhibou. La doyenne des exploitations a reçu des félicitations pour son management de l’environnement.

En effet, la SNIM a été certifiée ISO 14 001 (espèce de médaille d’or en matière de gestion de la qualité) en janvier 2011 : tous les documents sont présents et bien tenus, il y a des procédures pour tout, du personnel responsable de l’environnement dans tous les services etc… Mais ceux qui se félicitaient déjà de ce bilan savoureux ont dû ouvrir les yeux par la triste performance environnementale présentée : poussières, eaux, mélange eaux-huiles, gestion des déchets.

On a pu comprendre le poids de l’âge en voyant des collines de poussière accumulées, les eaux mélangées à l’huile formant des mares destinées à l’irrigation. On a pu ainsi méditer sur la différence entre le respect théorique de la réglementation et l’indifférence polluante de la pratique.

Recommandations

En conclusion, on a pu apprécier que les deux mines d’or maîtrisent totalement le risque du cyanure, mais que le risque concernant l’amiante et la silice cristalline véhiculées par les poussières demeure présent.

En matière de management de l’environnement le palmarès est :

1. SNIM

2. MCM

3. Taziast

En matière de performance environnementale le palmarès est :

1. MCM

2. SNIM

3. Taziast

On ne peut que saluer l’initiative de l’Administration qui, en commandant cet audit indépendant, a permis de donner un plan de charge à la Police des Mines pour améliorer son cadre réglementaire et des objectifs de progrès pour chacun des opérateurs administrés. Enfin, à la veille d’un afflux d’opérateurs nouveaux, ces conclusions peuvent servir de modèle aux nouveaux venus.

Les générations futures apprécieront, pour une fois, les actions responsables que nous avons faites en pensant à elles. Cette initiative, qui prend en compte la vision du futur, a du souffle. Une fois n’est pas coutume, disons-le : Bravo l’Administration.

Zakaria Ba

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