08-02-2012 06:57 - IRA Mauritanie / Conscience & Résistance : les milices tribales de Aziz
Après l’opération « enrôlement-identification », destinée au tamisage des critères de nationalité pour extraire les résidus « impurs » de la communauté de destin, le pouvoir mauritanien, quasiment dans l’indifférence des citoyens, vient de franchir, dans le domaine paramilitaire, un pas décisif sur la voie de l’exclusion des composantes noires de la population, en l’occurrence les descendants d’esclaves et les négro-africains ; la tentative, conçue dans l’ombre et exécutée par touches indolores, atteint, aujourd’hui, le stade final ; sa mise en œuvre pratique s’accélère au rythme de l’instabilité dans l’environnement régional, notamment aux Mali et Sénégal voisins.
I/ Au début
Le processus, entamé en catimini lors du vote de la loi 2009/025 du 07 avril 2009, ne soulevait, alors, que des interrogations mineures sur la pertinence d’ouvrir le secteur du gardiennage privé aux militaires retraités. D’ailleurs, très vite, les sociétés actives, au nombre d’une dizaine, pour la plupart constituées après la fin de la dictature du Colonel Ould Taya en 2005, s’empressèrent de se conformer au texte, par le recrutement de directeurs issus des rangs des forces armées. Beaucoup d’entre elles, employeurs de milliers de vigiles civils, ont gardé leurs effectifs mais restreint l’embauche aux anciens soldats, environ, à ce jour, 70% du personnel ; le droit n’étant rétroactif, l’affaire semblait entendue mais le décret d’application 2011/066 du 24 février 2011 - publié au Journal officiel n°1245 du 15 août 2011 et diffusé seulement le 02 janvier 2012 - lève le voile sur un projet de cloisonnement de la société d’une ampleur sans précédent.
II/ Le monopole
1. Le texte instaure une tutelle, absolue - d’orientation, de suspension et d’ultime recours– par la Direction générale de la Sûreté Nationale (DGSN), sur les acticités de surveillance, de gardiennage et de transport de fonds ; la personne chargée de veiller sur la tranquillité de votre domicile et de vos biens, se trouve, de facto, en contrat tacite avec le principal organe de l’espionnage intérieur ; il est même stipulé que les préposés ont pour obligation, outre leur employeur, de rendre compte et de « communiquer, à l’Officier de police judiciaire, les faits susceptibles de porter atteinte à l’ordre et à la sécurité publique » ; c’est une disposition sur-mesure, à l’adresse des indicateurs et des délateurs, une gent dont le zèle, durant les 30 dernières années, brisait des centaines de vies, souvent sans preuve, impunément.
2. Le métier est désormais réservé, à titre « exclusif », aux retraités des forces armées et de sécurité, « l’ayant servi dignement » ; sans commenter, pour l’instant, la notion de « servir dignement » une corporation plutôt putschiste, corrompue et compromise dans des tueries à caractère raciste, l’on notera, à ce stade, que la nouvelle norme ne complaît, selon toute logique, aux officiers et hommes du rang, réputés auteurs de tentatives de coup d’Etat, le mode d’alternance par lequel, le Général Mohamed Ould Abdel Aziz, se singularisait, à deux reprises (2005-2008).
3. Les deux références légales violent, explicitement, des dispositions expresses du code de commerce; l’article 1213 prescrit que « toute restriction à la concurrence doit être justifiée par des motifs d’intérêt général et proportionné au but poursuivi » et qu’ « est nulle la clause de non-concurrence qui mettrait le débiteur de cette clause dans l’impossibilité d’exercer une activité conforme à sa formation professionnelle ».
III/ La spoliation
4.Un prélèvement obligatoire est prévu sur les revenus de toute entreprise du genre pour être reversé aux associations des retraités des forces armées et de sécurité, instituant ainsi un impôt spécifique qui bénéficie à une catégorie de la population, au mépris des principes fiscaux d’universalité et d’anonymat.
5. Au prétexte que la plupart des retraités militaires seraient impécunieux – argument au demeurant recevable d’un cas à l’autre - le gouvernement mauritanien, toujours en cachette, vient de prélever, sur le trésor public, 900 millions d’ouguiyas, à partager, par lots individuels de 50, entre les 18 bénéficiaires des nouveaux agréments. L’argent du contribuable, sur le mode le plus primitif de l’accumulation, vient financer, sans intérêt ni remboursement, une opération commerciale.
6. Et comme la capitalisation ne suffit à rattraper la concurrence, les 10 entreprises existantes, sous peine de fermeture, sont sommées de fusionner avec les nouveaux privilégiés, en deux parts égales, 50/50. Or, au moment de calculer et d’additionner les actifs comme il est d’usage, les nouveaux venus, forts de l’appui de l’Etat, exigent de se porter actionnaires par bons, c’est-à -dire, à crédit !!!
IV/ La prime au pire
7. Certes, si l’on devait admettre ou excuser tant d’abus de pouvoir, la liste nominative des 18 agréments réveillerait, en vous, le plus improbable des civismes parce qu’elle suscite la colère et appelle la révolte :
- Parmi les 18 personnalités récipiendaires, figurent 4 négro-africain, serviteurs loyaux de l’hégémonie. Un Hartani de la tribu du Colonel Ould Taya vient « colorer » une profession dont le caractère mono-ethnique, confortera le constat similaire au sein de la hiérarchie des forces de défense et sécurité, résultat de deux décennies d’exclusion et de purges. En sus de ses prétoriens en uniforme, la domination prépare ses milices, prêtes à sévir dans l’hypothèse – probable et crédible – d’une contestation de l’ordre établi. L’on assiste, ici, à la formation, souterraine, d’une Baltiguiya de supplétifs prête à écraser la moindre velléité de révolution, à l’image du Printemps arabe.
- A l’inverse, dans un contexte de famine et de précarité qui frappe singulièrement les cadets sociaux, des milliers d’agents, en majorité Hratine et négro-africains, vont se retrouver à la rue, privés de toute rémunération ; pour des raisons socio-historiques, convient-il de le rappeler à l’adresse des profanes, ces deux groupes communautaires, concentrent l’essentiel de la main d’œuvre dans tous les domaines de pénibilité du travail ; l’absurdité et l’irrationalité paraissent se conjuguer encore plus, dans la mesure incriminée, quand l’on découvre que seuls 400 anciens militaires remplissent, aujourd’hui, les conditions requises, sur un marché de 7000 emplois, d’ailleurs en expansion !
- Mais l’indignation s’impose à la lecture de la fameuse : défilent les noms de présumés tortionnaires aussi notoires que les Colonel Sidi Mohamed Ould El Vaida et le Commissaire Mohamed Mahmoud Ould Ahmed Mahmoud dit Nkerrani : oui, l’Etat mauritanien verse, aux susdits, une prime à la torture et au meurtre auxquels s’ajoutent d’autres officiers, enrichis par le trafic d’armes, le détournement des dotations de carburant et la ponction sur le tarif quotidien des rations individuelles. Bref, après vous avoir volés, maltraités ou tué vos parents et concitoyens, les voilà qui vous protègent, avec l’argent de la collectivité !
- Les 18 autorisations accordées ne profitent à aucun officier négro-africain radié lors des purges sanglantes de 1987-1991. En revanche, sont retenus certains de leurs collègues renvoyés de la troupe et parfois arrêtés à cause de leur implication présumée dans les projets de putsch de 2003 et 2004, contre la dictature de Ould Taya.
- Les 3% des montants des contrats reviennent aux associations de retraités militaires, gendarmes, gardes et policiers, reconnues par les différents états-majors ; en sont évincés les agents des forces armées et de sécurité, victimes des « évènements » de 1987-1991, sans doute les plus exposés à la misère.
V/ Observations
A/ Il revient aux parlementaires, partis politiques et associations de la société civile d’exiger l’abrogation, en urgence, de la loi 2009/025 du 07 avril 2009 et du décret d’application 2011/066 du 24 février 2011, aux motifs pertinents de prise illégale d’intérêts, de recel, d’abus de bien sociaux, d’incitation à l’impunité de crimes de sang et de crimes économiques, de discrimination raciale et d’intention de créer des groupes paramilitaires, en marge des corps constitués.
B/ Si la décision est appliquée en l’état, elle conduirait au chômage de milliers de mauritaniens, menacerait l’avenir de la démocratie et fragiliserait l’économie par la déstructuration d’un outil de production déjà éprouvé, au moment où l’affluence des investisseurs miniers requiert un service de qualité, loin de l’amateurisme prévisible.
En politique, il arrive que la vertu saute une génération ; avec Mohamed Ould Abdel Aziz le bond s’apparente à un envol cosmique.
Nouakchott, le 7 février 2012
Conscience et Résistance (CR) | Initiative pour la Résurgence du mouvement Abolitionniste (IRA) |
Hacen Ould Lebatt, Porte-Parole | Malick Fall |
N° | Nom; | Grade | Nom de l'entreprise; |
Armée (9);
01 | Brahim Ould Alioune Ndiaye | Colonel | Cie Gle de surveillance et de transport de fond |
02 | Athié Hamath | Colonel | Grpt d'Entreprises et Stés de Surveillance et de Sécurité |
03 | Salem Ould Memou | Colonel | Sté Gle de sécurité de Gardiennage et transport de fonds |
04 | Cheikh Ould Ahmed Ould Baya | Colonel | Groupe Al Assass |
05 | Sidi Mohamed Vayda | Lt-Colonel | M.G.S. |
06 | Brahim Ould Bakar | Commandant | Renforts Sécurité Mauritanie |
07 | Mohamed Ould Sid Ahmed Ely | Capitaine | Sté Strag |
08 | Mohamed Ould Ahmed | Lieutenant | Nouvelle Vision de la Sécurité |
09 | Saoudi Ould Jeddana | Lieutenant | Cie de Sécurité Privée |
Gendarmerie (3)
;
10 | Sidi Ould Riha | Colonel | Sogasem et Actionnaires |
11 | Ely Ould Cheikh | Colonel | Secrim |
12 | Hamoud ould Ahmed Kory Ould Samba | Commandant | High Security Group |
Garde (3)
13 | Welad Ould Haimdoun | Colonel | G.S.T.F. |
14 | Alassane Yéro Sogho | Colonel | Gle Somasec |
15 | Daouda Djibril Niang; | Lt-Colonel ; | Gpt El Barakat |
Police (3)
16 | N'Kerrani Ould Mohamed Mahmoud | Commissaire Pr | El Amana Cie. |
17 | Ly Mamadou | Commissaire Pr | Star Sécurité |
18 | Daouda Djibril Niang | Lt-Colonel; | Gpt El Barakat |