28-01-2014 18:27 - L’éditorial La Nouvelle Expression : A la diaspora mauritanienne
Vous vous êtes engagés, il y a plus d’une année (24 novembre 2012, c’est la date de votre 1ère manifestation) dans un combat sans relâche. Vous vous êtes engagés pour la Mauritanie, votre patrie qui vous a tout donné, même si aujourd’hui vous vous êtes expatriés.
Grâce à vous, des milliers de Mauritaniens ont échappé à la faim, à la précarité existentielle et à l’ignorance.
Par vos moyens, des écoles ont été construites, des dispensaires ont vu le jour et ont été équipés quoique qu’ils restent parfois sans médecin.
Des forages, des barrages, beaucoup des réalisations socioéconomiques ont été crées et mis en place pour venir en aide à des populations délaissées par l’Etat central et rackettées, voire triturées par les administrations locales ou régionales. Pour l’amour que vous avez pour votre pays, la Mauritanie, vous êtes devenus des ambassadeurs partout où vous vous trouvez.
Et c’est pourquoi, pour cet amour que vous vouez à votre patrie, vous refusez d’abandonner votre nationalité comme le veut la politique actuelle du pays qui conduit un enrôlement discriminatoire des citoyens mauritaniens ; une politique d’un régime qui ne comprend pas l’expression effective de la souveraineté d’un pays. Et vous le lui faites savoir de fort belle manière.
A ces gouvernants qui dévaluent et ‘’illégitimisent’’ les papiers d’identités mauritaniens pour une carte de séjour étrangère, vous avez dis non. Car pour vous, vous êtes Mauritaniens d’abord avant d’avoir un titre de séjour étranger pour un but bien déterminé.
Un document dont la validité ou l’utilité dépend intégralement de l’espace et du temps contrairement au document de la citoyenneté. On est mauritanien par l’histoire et la géographie ; la mauritanité est formalisée par des lois mauritaniennes sur tout le territoire national, symbolisant l’indépendance du pays.
Voilà pourquoi depuis plus d’une année vous luttez. Un combat contre la discrimination dans l’enrôlement biométrique des citoyens expatriés. Dans ce combat, vous faites de la bonne résistance. La résistance pour une Mauritanie indépendante et digne. Une Mauritanie pour la citoyenneté mauritanienne de droit et de devoir.
Une Mauritanie pour l’expression effective des dispositions légales régissant la citoyenneté d’un pays malmené et trituré par ses gouvernants qui n’ont de la Mauritanie que leur épanouissement individuel. Ces sangsues ont abusé de la mère patrie. A cause de leur turpitude, la Mauritanie se classe dans le dernier peloton des pays civilisés car pour ces sangsues le pays ne s’analyse qu’en termes de division des citoyens.
Leur Mauritanie à eux est une Mauritanie de haine, de pillage, de honte, de mensonge et d’hypocrisie… Mauritaniens de la diaspora, vous faites honneur à la Mauritanie juste. La victoire pour la Mauritanie que vous luttez est proche, très proche. Vous êtes à un pas du but : la déconstruction d’un système monstrueux qui cultive l’iniquité.
Merci de reprendre le combat au moment où l’élan de contestation dans le pays s’essouffle. Le front intérieur de cette Mauritanie qui se cherche est malade mais cela ne vous a pas diverti. Les méthodes de l’enrôlement décriées par la jeunesse sont encore d’actualité dans nos centres d’enregistrement biométrique.
Et la Mauritanie en souffre. Le Canard enchaîné l’avait prédit et Aziz vient de le prouver. La Mauritanie relevait de l’abstrait pour certains en 1960. Le journal satirique français avait immortalisé l’accession du nouveau pays à la souveraineté internationale par une caricature symbolisant notre pays par un homme assis sous une tente dans une étendue désertique à perte de vue.
Une tente dans l’immensité du désert, l’immensité d’un «nulle part». Ce Canard-là interprétait l’indépendance de notre pays comme une farce. Tout était à faire, ici. Mais l’équation fut résolue par les fondateurs de la Mauritanie.
Malheureusement, l’héritage de nos anciens n’a pas été fructifié : aujourd’hui, en bafouant les attributs de l’Etat, notamment la plus capitale, à savoir la souveraineté, on donne raison au Canard enchaîné.
Car refuser de reconnaître la nationalité de certains citoyens mauritaniens, sauf à présenter une carte séjour française, relève d’un dédit contre la souveraineté de la Mauritanie comme pays indépendant et légitimement reconnu sur le plan international comme tel. Novembre 2012-Janvier 2014, c’est, dis-je, plus d’une année de lutte pour la souveraineté de la Mauritanie.
Une année pour l’expression totale de la Mauritanie pour les Mauritaniens meurtris par des mesures injustes. En France, aujourd’hui, des Mauritaniens, soutiens de plusieurs familles, perdent leur travail parce que ne pouvant plus récupérer leur titre de séjour à la préfecture puisque n’ayant pas un passeport valide : pour disposer du nouveau passeport il faut s’enrôler et… on ne peut s’enrôler sans la carte de séjour.
Sacrée Mauritanie qui jette ses ressortissants dans un sombre labyrinthe, des ressortissants qui ont pourtant tout abandonné pour s’expatrier afin de venir en aide au pays en soutenant des populations vivant dans la précarité la plus noire. La diaspora mauritanienne en France interpelle le cercle décisionnel du pays depuis le 24 Novembre 2012, date de leur 1ère manifestation.
Est-il utile, sans exhaustive, de retracer les grandes dates de leur combat : Février 2013 : rencontre des Mauritaniens de France avec la Commission d’enrôlement ; 19 Mai 2013 : rencontre avec le Président de République. Ces fils de la Mauritanie ont aussi rencontré l'ambassadeur mauritanien en France, notamment les 1er Février, 10 Mai et 12 Juin 2013.
En désespoir de cause, les mercredi 4 Juin et samedi 23 Octobre 2013, l’ambassade a été occupée par ces militants d’une Mauritanie souveraine. Tous les mercredis et chaque dernier samedi du mois, la diaspora mauritanienne en France est sur le terrain… et attend toujours qu’une solution soit apportée à leurs préoccupations.Comme nous nous interrogions, il y a une année, a-t-on déjà vu un pays au monde reconnaître la citoyenneté de ses populations par la présentation d’un document étranger ?
Et pourtant cette aberration est en cours en Mauritanie dans le cadre de l’enrôlement des citoyens mauritaniens établis en France : la présentation de la carte de séjour est obligatoire, c’est une condition pour que la mauritanité d’un expatrié mauritanien dans ce pays soit acceptée et pour que ce dernier puisse se faire enrôler.
C’est comme si le Sénégal, la Tunisie ou le Mali exigeaient à leurs citoyens, avec l’introduction de la carte de séjour en Mauritanie, que l’obtention pour eux de la carte consulaire est tributaire de la présentation de la carte de séjour mauritanienne.
La décision de subordonner, de soumettre, l’enrôlement des expatriés mauritaniens en France à la présentation de la carte de séjour de ce pays, est abjecte. Ridicule. Humiliante. Incivique. Incongrue. Une décision inqualifiable dans les annales du monde moderne des pays souverains. Et pour cela, la Diaspora mauritanienne est dans la rue pour dire non, depuis plus d’une année. Et pour leur combat, nous disons du courage et bravo.
Camara Seydi Moussa