04-09-2015 13:12 - Libre Expression. Devoir de mémoire et refus de l'oubli : 4 septembre 1986, le début des années de braise en Mauritanie

Libre Expression. Devoir de mémoire et refus de l'oubli : 4 septembre 1986, le début des années de braise en Mauritanie

Kaaw Touré - C´était le 4 septembre 1986, le début des premières arrestations des militants et sympathisants des Forces de libération africaines de Mauritanie (FLAM) suite à la publication du "Manifeste du Négro-mauritanien opprimé". En publiant ce manifeste en 1986, nous avions montré que des problèmes réels de coexistence entre les deux communautés raciales existaient.

Nous avions aussi montré par quels mécanismes, ils avaient été engendrés. Nous avions également indiqué les perspectives dangereuses (guerre civile) sur lesquelles pouvaient déboucher ces problèmes, s´ils n´étaient pas résolus à temps correctement.

Nous avions enfin appelé à un débat national sur la question. L´esprit du Manifeste était, en Patriotes sincères d´attirer l´attention des pouvoirs publics sur les problèmes de la nation, en vue de leur trouver des solutions avant qu´il ne fut trop tard.

Quelle fut la réponse du gouvernement raciste de Ould Taya? Cinglante, féroce et sanglante.

Depuis 1986, le système d´Apartheid mauritanien a systématisé dans le cadre de sa consolidation la politique de répression et de la mise à l´écart de la communauté noire et cela dans tous les domaines de la vie politique.

Ainsi en septembre de la même année, prenant comme prétexte la parution du "Manifeste du Négro-mauritanien opprimé", L´Etat raciste (parce qu´il n´avait pas des idées à nous opposer), procéda arbitrairement à l´arrestation d´une centaine d´intellectuels noirs qui furent inhumainement torturés, sommairement jugés et lourdement condamnés.

Plusieurs centaines d´autres seront révoqués de la fonction publique ou contraints à l´exil. C´est un petit rappel pour ceux qui ont une mémoire courte !

En 1987, les corps militaires et para-militaires connaitront une véritable purge qui se soldera par la radiation de plus de 3000 gendarmes, policiers, gardes et militaires noirs. Cette politique de mise à l´écart s´accompagne d´une volonté délibérée d´extermination de la communauté négro-mauritanienne déjà largement sous représentée dans tous les secteurs de l´Etat.

Ainsi, après l´assassinat le 6 décembre 1987 des lieutenants Ba Seydi, Sy Saidou et Sarr Amadou, le régime totalitaire du colonel Maawiya Ould Sid´Ahmed Taya s´attela à la liquidation physique des prisonniers politiques envoyés à cet effet à la prison mouroire de Oualata, l´écrivain TENE Youssouf Gueye, L´Adjudant-Chef Ba Alassane Oumar, Le Lieutenant Ba Abdoul Ghoudouss, Le Doyen Djigo Tafsirou y seront froidement assassinés. C´est un petit rappel pour ceux qui ont une mémoire courte !

Le pouvoir engagé dans le démentélement de la composante noire s´appuie essentiellement sur les Baathistes et Nassériens qui infiltrent l´appareil d´Etat à tous les niveaux en rivalisant d´ardeur dans la répression des noirs. C´est ainsi que durant toute l´année 1988, les exactions contre les noirs étaient devenues des pratiques quotidiennes.

Les élèves, étudiants et civils noirs qui avaient tenté de manifester contre cette situation d´injustice à Nouakchott furent arrêtés, torturés et obligés à payer des lourdes amendes que les officiers de police baathistes fixaient selon leurs humeurs. C´est un petit rappel pour ceux qui ont une mémoire courte!

A Kaédi, Djowol, Rosso, Sélibaby, Nouadhibou, Zouératt, c´est la même atmosphère de terreur contre les civils noirs avec arrestation, tortures et amendes à ceux qui disaient non à l´injustice. C´est un petit rappel pour ceux qui ont une mémoire courte !

Durant la même année 1988, le gouvernement envoya dans le Sud des brigades militaires exclusivement beydanes, pour exproprier les terres, perquisitionner et désarmer les villageois négro-africains, en état de siége. C´est dans ce contexte de chasse à l´homme généralisée contre les Négro-africains que survient le conflit dit "sénégalo-mauritanien".

En avril 1989, le régime raciste organise des massacres de plusieurs centaines de Négro-mauritaniens et autres ressortissants Ouest-africains, des viols, des vols, des déportations au Sénégal et au Mali de plusieurs dizaines de milliers d´authentiques citoyens noirs, la confiscation de leurs biens, l´arrestation de plusieurs d´entre eux, dont plusieurs souvent froidement abattus.

Cette politique délibérée d´extermination des Noirs a fini par instaurer une très grave situation interne qui a fait des Négro-mauritaniens des otages du Système. Le choix par le régime du génocide de la composante noire comme solution aux problèmes mauritaniens, à travers les événements d´Avril 1989, dans leur préparation méthodique, les conséquences horribles montrent à quel point la communauté noire est menacée dans ce pays.

La persistance en 1990 du même climat de terreur sur toute l´étendue du territoire marquée par les déportations, des licenciements massifs, la systématisation des exécutions sommaires qui prennent l´allure de véritables massacres atteste la réalité de cette menace.

C´est cette même logique de despotisme sanguinaire qui a conduit le régime de Taya à procéder en fin 1990 début 1991 à l´arrestation pour la nième fois de plus de 3.000 Négro-mauritaniens civils et militaires accusés, selon les "prétextes classiques" d´avoir comploté contre l´Etat.

En mars 1991, avec la pression nationale et internationale, la dictature raciste recula et procéda à des "remises de peine grâcieuses" qui devaient aboutir à la "libération"des prisonniers politiques Négro-mauritaniens.

Le bilan de ces arrestations s´éléve à des centaines de morts tous exécutés extra-judiciarement, des milliers de cas de disparition dans la vallée pendant ces années de braise. C´est un petit rappel pour ceux qui ont une mémoire courte!

Dans la totalité des villes et villages du Sud (de Ndiago à Daffor) il n y a aucune famille négro-africaine qui ne compte en son sein, soit un exilé, soit un déporté, un assassiné ou estropié á vie. C´est un petit rappel pour ceux qui ont une mémoire courte !

Le 4 septembre 86, l´histoire des années de braise commençait par là et elle continue toujours à faire des ravages. Que beaucoup de larmes, de sang et de salives versés !

Les Flam d´hier, FPC d'aujourd'hui , portèrent les premières le flambeau de la résistance et elles continuent à lutter contre vents et marées et à résister aux coups d´assaut du Système, de ses valets et de ses alliés.

Une chose est sûre: on a beau critiquer, dénoncer, réformuler, réformer, refonder, on revient au même constat du Manifeste du Négro-mauritanien Opprimé 1986 et reformuler ses recommandations: le dialogue inter-communautaire pour un Etat juste, égalitaire et non-racial.

A cette occasion nos pensées pieuses et militantes vont à nos martyrs tombés sur le champ d´honneur à Oualata, Djreïda, Inal, Azlat, Nbeyka et dans la vallée.

Et la lutte continue!
Kaaw Touré










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Source : Kaaw Touré
Commentaires : 5
Lus : 2005

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Commentaires (5)

  • albatrosdu13 (H) 04/09/2015 16:21 X

    Bonjour à tous, Un message à tous ceux qui profitent du systeme la chute va être dure!! Que dieu bénisse ce pays. Bienôt la libération de ce pays,car la Mauritanie est sur la liste des chercheurs du gaz et pétrole. Patience,patience...

  • Paykah (H) 04/09/2015 15:11 X

    Eskey la lutte continue. Que dieu preserve l' homme de courage de faire ce qui n'est pas du tout apprécié . Eh oui mourir d'une petite et honteuse mort. La mort sur le lit entre les pleurs des enfants et les cris des vieillards .

  • Symaodo (H) 04/09/2015 14:38 X

    Avoir tes joues enflées,tu ne galères pas en Europe,fais un tour dans la vallee a ndodel,ndioum donaye,tu verras des enfants et des femmes fatigues et rachitiques que ton discours repugnent,vous les flam vous avez mis tous ces pauvres dans la merde avec vos ambitions de pauvres petits négros parvenus et vous avez fui en Europe,ton rappel morbide et nauséabond,tu les gardes pour toi,fumier.

  • sndioro (H) 04/09/2015 14:30 X

    Oui, ils ont essaye mais ils ont oublie de couper totalement or ils n'ont pas pu couper totalement les racines de l'ARBRE. L'ARBRE a pousse et continue a pousse et poussera a jamais

  • Moutalli (H) 04/09/2015 14:29 X

    « Depuis 1986, le système d´Apartheid mauritanien a systématisé dans le cadre de sa consolidation la politique de répression et de la mise à l´écart de la communauté noire et cela dans tous les domaines de la vie politique. » Les ministres, ambassadeurs, secrétaires généraux de ministères, directeurs de services centraux, walis, hakems, directeurs d’entreprises publiques et autres nombreux postes de responsabilité occupés par les membres de l’ethnie (minoritaire) de l’auteur de l’énoncé précité ne doivent pas se sentir tellement concernés par ce propos . C’est pour ceux qui ont toujours la mémoire courte ! Egalement pour eux, je veux rappeler que ce monsieur et ses camarades des FLAM ont profité d’un incident frontalier entre des membres des ethnies poular et soninké pour monter des citoyens sénégalais contre de paisibles commerçants maures et failli entraîner la Mauritanie et le Sénégal dans une guerre ! Pour ceux qui peuvent avoir un jour la mémoire courte, je veux signaler que les camarades flamistes de Kaaw Touré tentent de monter aujourd’hui les Haratine contre les « sales » Beydanes et leurs femmes « obèses », bref contre cet ensemble « berbère » « qui ne se lave jamais », « qui ne porte jamais de pantalon », qui accomplit « un travail beydane », qui profère des « beydâneries », « qui massacre la angue de Molière », etc. Pour ceux qui ont la mémoire courte.