27-11-2015 22:30 - Anniversaire des forces armées et de sécurité Mauritanie - 25-11-2015

Anniversaire des forces armées et de sécurité Mauritanie - 25-11-2015

Houssein Baby - Grace à Dieu et par la volonté ferme d’un homme : Le Président Mohamed Ould ABDEL AZIZ épaulé en cela par un Etat-major Général loyal et compétent, une grande armée est née. Une Armée qui prend toute sa part, avec compétence et efficacité, dans ce combat mondial contre l’obscurantisme et la barbarie. Vous témoignons ici toute notre fierté et une gratitude appuyées !

Des bandes armées sahariennes a la nébuleuse terroriste internationale - Quels rôle et place pour la Mauritanie -
1) Du commerce caravanier à la contrebande et au narcotrafic en zone sahélo-saharienne.

2) Naissance des groupes et bandes autonomes en zone sahélo-saharienne et jonction des bandes de rebelles algériens avec les mouvements du trafic transfrontalier.
3) La lutte isolée et incomprise de la Mauritanie contre le terrorisme au sahel

4) Les conséquences de l’intervention occidentale en Libye, le déclenchement de l’opération française Serval et la position mauritanienne.

5) Face à un terrorisme à présent de portée mondiale et dont la menace pèse sur tous les continents, quelle riposte pour l’Afrique en particulier et le monde civilisé en général ?

6) La guerre contre le terrorisme ne saurait être que militaire, elle est aussi et surtout spirituelle et économique.

1) Du commerce caravanier à la contrebande et au narcotrafic en zone sahélo-saharienne.

Le désert du Sahara qui s’est formé dans la fourchette allant du cinquième au second millénaire avant J.C a depuis constitué une barrière entre le monde méditerranéen et l’Afrique profonde. Il a très tôt symbolisé le pont reliant le monde moderne à celui resté primitif ; « Bilad Soudane », au Maghreb, la Méditerranée et la mer rouge.

Cette région vit apparaître un premier commerce transsaharien, activé par les comptoirs phéniciens sur la rive sud de la Méditerranée. Grecs, Phéniciens puis Carthaginois et Romains se lancèrent dans le commerce avec l'Afrique centrale pour obtenir ivoire, plumes d'autruche et esclaves à travers le Sahara.

Dès lors et au fur et à mesure des siècles le Sahara a vu passer toutes sortes d’échanges commerciaux par voies de caravanes de méharis et plus tard de convois motorisés. Cette activité ne dura pas bien longtemps sous sa forme licite, très vite la propension humaine au profit à tout prix l’emporta, les matières naturelles et produits manufacturés laissèrent place aux trafics en tous genres, êtres humains et de produits prohibés en tête.

Le Sahara a été tout à la fois une barrière mais également un pont entre deux mondes, son inhospitalité et son immensité feront vite de lui la cachette idéale des mouvements marginaux et du grand banditisme. Plus tard, il s’avérera être l’alternative idéale pour le terrorisme et le banditisme transfrontaliers en lieu et place de l’Afghanistan en bonne voie de pacification.

Les connexions sous forme d’allégeances d’AQMI à la nébuleuse internationale Al-Qaïda n’ont d’autres explications que le besoin stratégique d’une réimplantation en zone plus sûre jouxtant des sites sensibles et centres nerveux de l’Europe toute proche. Pendant donc des décennies, voire des siècles, le Grand Sahara restera des itinéraires et des caches pour les trafics et commerces contrebandiers avant d’être investi par le narcotrafic à grande échelle.

Comme le cours de la rivière, le commerce international illicite se trouvera des dérivations chaque fois que son mouvement sera interrompu par un obstacle. C’est donc dire que la lutte contre ce phénomène que sont le commerce illicite et la contrebande inter frontaliers est une œuvre de longue haleine exigeant une collaboration internationale sincère et dynamique.

Déjà à la peine dans la lutte contre la contrebande et le trafic de produits et matières prohibés, un autre phénomène autrement plus meurtrier et préoccupant est venu menacer la paix sociale à l’échelle mondiale ; « le terrorisme ».

2) Naissance des groupes et bandes autonomes en zone sahélo-saharienne et jonction des bandes de rebelles algériens avec les mouvements du trafic transfrontalier.

En cellules et groupes endormis avant les années 80, le monde entier a été surpris par la puissance et la force d’implantation des mouvements islamistes en Algérie.

Quand le 26 Décembre 1991, le Front du Salut (FIS) remporte le premier tour des législatives, l’Algérie et le monde furent comme tétanisés, la secousse était en elle un message doublé d’un ultimatum au monde civilisé. L’annulation des résultats et la secousse sociale qui s’en est suivie a été décodée et ressentie comme un séisme par la communauté internationale.

C’est alors que le GIA, Groupe islamique armé fusion entre les groupes de MANSOURI MELIANI et celui de ABDELHAK LAYADA amorce sa lutte armée d’une violence inouïe.

D’abord destiné à prendre le pouvoir en Algérie, le mouvement s’inscrivit très vite dans l’optique d’une révolution « islamique » mondiale. Mus par des motifs tout aussi tactiques que stratégiques, les mouvements armés algériens investirent la zone sahélo saharienne pour le triple motif que voici :

- Le besoin de se soustraire à la pression de l’armée algérienne qui le combat de toute sa puissance.

- La recherche d’une zone d’implantation offrant moins de possibilités de détection donc de poursuite.

- Surtout la jonction avec les groupes du banditisme et du narcotrafic pour les besoins de financement de leur guerre.

C’est ainsi que ces mouvements vont faire jonction avec les trafiquants de tous genre et sceller avec eux une sorte de pacte du diable. Les besoins logistiques d’une guerre aussi violente demandant puissance de feu et une grande mobilité étant très lourds financièrement, ils font vite de faire de la prise d’otages d’occidentaux leur principale source de financement en exigeant des rançons de plus en plus importantes.

Les groupes se réorganisent, fusionnent en passant par plusieurs métamorphoses GIA, GSPC, BAQMI pour enfin devenir cette fameuse nébuleuse qu’est aujourd’hui AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique). AQMI va signer l’internationalisation de sa vocation en prêtant allégeance à AL-QAIDA de l’héritier de BEN LADEN, AYMAN AL-ZAWAHIRI, médecin de formation et ancien chef du Jihad Islamique Egyptien.

3) La lutte isolée et incomprise de la Mauritanie contre le terrorisme au sahel.

De Lemghayti en 2005 avec ses 17 victimes, à l’attaque meurtrière de Tourine en septembre 2008, en passant par celle de Ghallaouiya en 2007, l’assassinat de quatre touristes français le 24 Décembre 2007 sur la route de l’espoir, aux en virons d’Aleg, celui des trois soldats mauritaniens à Ghallaouiya tout ceci suivi d’incursions jusqu’au cœur de la capitale Nouakchott, la menace était d’envergure.

La Mauritanie souffrait alors de trois lourds handicaps, deux étaient d’un fait intérieur, le troisième résultait du voisinage.

· Les régimes antérieurs n’accordaient que peu de place et pas la moindre priorité à la conception d’une politique de défense à la hauteur de la situation géostratégique du pays, et des menaces qui se dessinaient depuis déjà quelques décennies. Nul n’était convaincu, jusqu’au plus haut niveau de l’état qu’avec nos potentialités minières et fossiles, dans un environnement géographique incontrôlé et géopolitique instable nous nous devions de concevoir une politique de défense sérieuse et adaptée.

Tel est le prix de la stabilité et de la pérennité des Nations partout sur cette terre.

· De l’indépendance à 2008, jamais les forces armées n’ont été une priorité pour nos dirigeants successifs, jamais la moindre attention n’a été prêtée à l’évaluation de leurs capacités opérationnelles, c’était un outil qu’il fallait gérer par obligation, sans plus.

Mieux, aux premières années de l’indépendance de haut, très haut responsables ont même émis des doutes sur l’utilité peu convaincante pour nous d’entretenir une armée. Ce même état d’esprit n’a donc fait que perdurer. Plus grave, dans les années 90 début 2000, d’aucuns ont cru devoir étouffer, sevrer et paralyser l’armée pour se prémunir des coups d’états.

Les forces armées ont été non seulement sevrées, mais écrasées et réduites à une coquille vide, ce qui a fini par produire l’effet inverse de celui escompté. Pour qu’une armée soit républicaine et professionnelle il faut la faire sérieusement et lui accorder tous les moyens de sa mission, c’est à ce seul prix qu’elle-même sera convaincue de son utilité républicaine et de sa mission militaire.

· Le troisième handicap qui n’est pas des moindres est l’atmosphère de totale démission voire de connexion et de connivences des mouvements terroristes avec les forces armées voisines. Ce n’était un secret pour personne, les groupes de terroristes et de narcotrafiquants étaient basés en territoire malien, ils circulaient autant en zones désertiques que dans les centre urbains.

De hauts gradés d’antan étaient de mèche avec les groupes et les militaires de la zone étaient bien plus occupés à s’enrichir de la corruption qu’à assurer leur mission de défense et de formation de leurs hommes. Terroristes et militaires cohabitaient et commerçaient ensemble le plus naturellement du monde.

Cette situation de déliquescence a eu pour conséquences majeures d’entretenir des nids de guêpes, donc d’héberger la menace à nos portes. D’un point de vue militaire cela procure à l’ennemi un avantage majeur en matière de disponibilité de la logistique de combat, d’autonomie, de renseignement et de protection contre le risque de repérage aérien.

Dès lors, la Mauritanie était condamnée au choix de sa propre survie : aller à la recherche de l’ennemi là où il se terre pour ne pas le subir continuellement. C’est ce qui fut fait et que certains compatriotes ont très maladroitement condamné donnant ainsi peut-être sans le vouloir un coup de main à l’ennemi.

Ce sont ces raisons qui expliquent les incursions des forces mauritaniennes en territoire malien. Incursions qui d’ailleurs se sont faites en parfait accord avec le pouvoir légitime malien de l’époque. Ce fut entre autres le cas des batailles de WAGADOU, RAZ-EL-MA, AREICH HIND et autres interventions en coopération avec l’armée française.

Le temps a fini par donner raison à la Mauritanie, la lucidité et l’intelligence de l’approche aussi bien politique que militaire du haut commandement mauritanien revues à postériori sont à saluer à cet égard.

Eu égard à ce que nous avons vécu en 2007 – 2008 quant l’ennemi a frappé jusqu’à nos portes, à Nouakchott, nous pouvons sans complaisance aucune affirmer haut et fort que le terrorisme a été contenu et que nous vivons de 2009 à ce jour dans un pays Dieu soit loué sécurisé. Depuis cette date, nos nuits ne sont plus hantées par la peur des agressions terroristes, nous dormons à présent d’un sommeil profond et réparateur, sachant qu’une armée digne de ce nom veille sur notre sécurité.

Les forces armées et de sécurité ont fait l’objet d’une attention particulière depuis 2009, une armée digne de ce nom a été mise sur pieds et le territoire national convenablement sécurisé.

En plus d’être correctement équipées et remises à niveau quant à leurs capacités opérationnelles et techniques, les unités ont fait l’objet d’une implantation tactique bien menée et très professionnelle. Les rares tentatives d’incursions terroristes toutes mises en échec sont les preuves incontestables de la fiabilité de nos lignes de défense.

4) Les conséquences de l’intervention occidentale en Libye, le déclenchement de l’opération française Serval et la position mauritanienne.

Sous le couvert de la résolution 1973 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, du 19 Mars au 31 Octobre 2011 fut menée l’opération multinationale en Lybie sous les dénominations suivantes : Opération Harmattan pour la France, l'opération Ellamy pour le Royaume-Uni, l'opération Odyssey Dawn pour les États-Unis, l'opération Mobile pour le Canada et l'opération Unified Protector pour l'OTAN auxquelles il faut ajouter la participation d’une escadrille de l’aviation de chasse du Qatar.

Il y a lieu de noter à l’occasion l’ampleur de la polémique qu’a suscité à l’époque l’interprétation de la résolution susmentionnée quant à sa légitimation de l’intervention militaire occidentale en Lybie.

Nous ne nous attarderons pas ici sur l’aspect militaire de l’intervention proprement dite mais plutôt sur ses retombées en termes d’insécurité non seulement pour la Libye, le continent africain mais également pour l’Europe et tout le reste du monde.

KADHAFI et son régime anachronique ont certes été éliminés mais ce qui semble avoir supplanté une dictature des plus dures s’est avéré être bien pire ; une guerre civile des plus barbares avec l’effondrement total de l’état, de l’économie, du droit et de toutes les valeurs sociales le tout baignant dans une insécurité qui ne semble pas devoir s’arrêter.

Les stocks astronomiques d’armes et munitions ont été soustraits des magasins et soutes, d’aucuns se posent la question de savoir quelle a été la destination des très probables stocks chimiques. Un arsenal gigantesque s’est ainsi volatilisé dans la nature au grand bonheur du terrorisme international et des trafiquants d’armes.

Des armes lourdes d’appui, des armes d’assaut, des missiles (missiles S.A, Kornet, et Sam de divers types…) ont été trouvés dans toute la sous région et les réseaux de commerce d’armes de tous calibres et de toutes catégories prolifèrent dans toute l’étendue du continent et au-delà.

A ce désordre explosif est venu se greffer une donne complexe ; le sud libyen dépourvu d’autorité, géré dans un désordre total par des bandes qui n’en font qu’à leur tête est devenu la TORABORA africaine qui sert de cache et de camps d’entrainement aux éléments les plus aguerris et les plus sanguinaires de la nébuleuse tels l’organisation mère qu’est AQMI et ses satellites avec des têtes de pont des mouvements subsahariens et de l’est africain que sont BOKO HARAM et CHEBAB.

L’onde de choc résultant de la guerre de Libye bouleversera durablement la région et le continent tout entier. Au lieu de les affaiblir, l’intervention militaire en Libye a donné au terrorisme deux avantages de poids :

· Elle a élargie les limites de leur zone de manœuvre en l’agrandissant de territoires à présent sans autorité.

· Elle a mis à leur disposition toute la logistique de guerre qui leur faisait tant défaut (armes, munitions, carburant et ressources humaines et financières …)

Sans l’intervention militaire internationale en Libye, l’offensive des mouvements terroristes soutenus par AQMI et ses alliés du nord Mali n’aurait probablement pas eu lieu. Si un tel projet devait néanmoins être mis en exécution il ne se serait certainement pas passé avec autant de puissance et de réussite. Toujours est-il que l’agression a été consommée et s’en est alors suivi l’enchainement évènementiel qui suit :

L'opération Serval, en référence à un félin africain, est le nom donné à l'intervention militaire menée au Mali par l’armée française, depuis le 11 janvier 2013, à la demande du gouvernement du Mali.

L'opération avait pour objectif de soutenir les troupes maliennes cherchant à repousser une offensive des groupes armés islamistes qui ont pris le contrôle de l'Azawad, , la partie nord du pays, bousculant même les mouvement autonomistes maliens après s’être ligués au départ de l’agression.

Les buts de cette intervention tels qu'exprimés par le président français, François Hollande, le 15 janvier 2013 étaient d'arrêter l'avancée en direction de Bamako des forces djihadistes, sécuriser la capitale du Mali et permettre au pays de recouvrer son intégrité territoriale.

Le 12 janvier 2013, le ministre de la Défense français, Jean-Yves Le Drian, annonce lors d'une conférence de presse que l'armée de l'air a mené des frappes aériennes sur plusieurs objectifs qui ont permis de détruire plusieurs véhicules.

A l’opération SERVAL en cours vont se greffer avec l’aval de l’Organisation des Nations Unis : La MISMA devenue plus tard la MINUSMA pour l’Union africaine et la CEDEAO et les FATIM pour le TCHAD.

Cette coalisation signe dès lors l’internationalisation du conflit malien, notre pays est alors sollicité à contribuer par son expérience et sa profonde connaissance de l’environnement géographique et humain de la zone de conflit.

Faut-il encore le rappeler, la Mauritanie partage 2.237 kilomètres de frontière avec le Mali que les Djihadistes ont transformé en base arrière avec des connexions et connivences jusqu’à un niveau élevé de responsables. Malgré sa ferme volonté de se joindre à la communauté internationale, cet état de fait commandait à notre pays d’observer un certain nombre de préalables liés à sa sécurité propre.

Il est contre toute logique et le bon sens commun de se faire surveiller par une tierce entité la frontière que l’on partage avec ce pays frère pour aller sécuriser la frontière que ce dernier partage avec un autre voisin. Si une mission devait être confiée à la Mauritanie en tant que pays frontalier du Mali, celle-ci devrait être dans la zone jouxtant leur frontière commune.

Là fut le point de discorde, pas ailleurs. Bien avant l’offensive terroriste et l’intervention internationale qui s’en est suivi, la Mauritanie avait déjà endossé toutes ses responsabilités dans une longue guerre contre le terrorisme couteuse en vies humaines et lourde pour son économie. La volonté et le cœur y étaient, le courage et le patriotisme ont fait le reste.

A l’adresse de ceux, ici et ailleurs qui ont émis des doutes blessants sur la sincérité de l’engagement de la Mauritanie, l’exemple du voyage du Président Mohamed Ould ABDEL AZIZ à Kidal le 23 Mai 2014 pour y arracher un cessez-le-feu inespéré est en soi une réponse parlante.

Derrière cette pudeur et cette grande retenue, les mauritaniens que nous sommes, toutes ethnies confondues, restent imbus d’un grand sens de responsabilité et d’’honneur et ne peuvent concevoir de faillir aux engagements et à la parole donnée surtout s’agissant d’un domaine aussi vital que la sécurité d’un pays frère.

A l’instar d’autres pays dans leur sphère géographique, la Mauritanie est et reste un élément clé déterminant dans toute stratégie envisagée de lutte contre le terrorisme dans le Sahel, elle jouit d’une très grande expérience acquise au prix de la privation et du sang. Cette expérience elle l’a toujours mise à la disposition des pays amis et voisins et n’hésitera certainement pas un instant à la mettre à la disposition de la communauté internationale.

5) Face à un terrorisme à présent de portée mondiale et dont la menace pèse sur tous les continents, quelle riposte pour l’Afrique en particulier et le monde civilisé en général ?

Au moment où l’opération SERVAL, en collaboration avec la MINUSMA tire à sa fin le monde a été surpris de voir renaître de leurs cendres les mêmes groupes terroristes mieux armés et plus déterminés à en découdre.

Serval a laissé place à une nouvelle doctrine de portée sous-régionale; Barkhane avec des effectifs plus réduits de l’ordre de trois mille hommes (3.000). A l’opposé, le gros des mouvements djihadistes s’est fondu dans cette nouvelle nébuleuse née au Proche-Orient dans les conditions plus haut décrites et se donnant tous les attributs d’un état dit islamique.

Le monde va se retrouver du jour au lendemain face à une armée dotée de moyens militaires lourds et sophistiqués avec en soutien toute la puissance économique des riches contrées envahies. Dès lors la menace va non seulement prendre une nouvelle envergure mais elle va viser tous les pays sur tous les continents, jusqu’aux capitales occidentales les plus sécurisées.

Conséquence directe de la dislocation de l’Irak et de son armée, du démembrement des pays sous le souffle du dit printemps arabe, va prendre naissance un nouveau monstre, autrement plus agressif et plus dangereux : DAECH. Ce groupe aux structures et à l’implantation géographique moins saisissables qu’Al-Qaïda est né tout autant de la dissidence de celui-ci que de celle des armées défaites de SADDAM Hussein, Mouammar KADHAFI et de Bachar Al ASSAD.

DAECH, improprement et injustement appelé Etat Islamique va dès lors, avec les territoires conquis et les richesses fossiles confisquées se donner les moyens de sa vocation destructrice. Un terrorisme aveugle et sanguinaire sous toutes ses déclinaisons et à travers toute la planète n’épargnera alors plus personne.

Du Moyen Orient devenu un vrai volcan du fait de ces hordes illuminées, leurs actions directes ou par le biais de leurs démembrements et allégeances tels Boko Haram dans le Nord-est du Nigeria, Ansar Bait al-Maqdis dans le Sinaï égyptien et le Majilis Choura Chabab al-Islam en Libye.. Ils sèment aujourd’hui la terreur partout à travers la planète en massacrant des innocents.

En ne citant que leurs forfaits les plus récents : Nigéria, Cameroune, Tchad, Arabie Saoudite, Turquie, Liban, France, Mali … Le monde doit comprendre que nul n’est à l’abri de ces monstres et qu’il est urgent d’engager contre lui une guerre internationale sans merci jusqu’à son total anéantissement.

A la tête de cet empire du mal, un homme de 45 ans, irakien de naissance qui s’est auto - proclamé Calife : Abou Bakr AL-BAGHDADI.

DAECH compterait entre 30.000 à 100.000, voire 200.000 combattants selon certains analystes.

Leurs effectifs de 80 nationalités, sont composés principalement d’irakiens, syriens, saoudiens, tunisiens, yéménites, pakistanais, marocains, russes … et de plusieurs ressortissants d’Europe, principalement occidentale. (Tableau ci-dessous)

Sur le plan économique DAECH s’est donné les attributs et moyens financiers d’un état classique avec un budget de l’ordre des trois milliards de dollars (3.000.000.000.$) produits des ressources pétrolières et gazières mais également des impôts et taxes sur les activités économiques des territoires annexés.

« Hydrocarbures : 4 400 000 dollars par jour (55 %)

Pétrole : 3 000 000 dollars par jour (38 %)


L’Irak possède les 4èmes réserves de pétrole conventionnel au monde et ses principaux sites d’extraction se situent près de Bassora dans le sud du pays, dans la région de Kirkouk et proche de Mossoul dans le nord. De même, les sols de Deir el-Zor et Hassaka en Syrie sont riches en pétrole. On remarque sur la carte ci-dessus que Daech soit contrôle déjà ces zones, soit s’en rapproche dangereusement. Ainsi, il contrôle 15 % du pétrole irakien et 60 % du pétrole syrien.

Une fois ces zones conquises, Daech vend son pétrole au marché noir principalement en Turquie et en Jordanie à un prix estimé inférieur de 30 % du prix du marché (pour un baril de 50 $, il le vend 35 $). Il devient quasi impossible de tracer ce pétrole qui peut alors être vendu aux pays occidentaux.

Gaz naturel : 1 400 000 dollars par jour (17 %)

L’Irak et la Syrie sont également des territoires avec d’importantes réserves de gaz naturel (l’Irak possède les 12ème réserves de gaz naturel les plus importantes au monde et la Syrie les 41ème). Or, Daech s’est emparé du site de production situé à Akkas, proche de Qaim, qui est la plus grosse réserve de gaz naturel d’Irak.

Impôts : 1 000 000 dollars par jour (13 %)

Comme tout Etat qui se respecte, Daech lève des impôts divers sur les populations des villes qu’il occupe. Ainsi, l’organisation a mis en place des taxes sur la consommation, sur les télécommunications, sur les camions traversant son territoire, sur le revenu des entreprises nouvellement créées, sur les chrétiens syriens en échange de sa protection (impôt connu sous le nom de jizya).

Voila pour les 3 principales sources de financement « stables » de Daech (viennent ensuite la vente de phosphate, de ciment et de produits agricoles).

Daech gagne également de l’argent grâce à des activités plus irrégulières, comme le rançonnage et le pillage.

Une quinzaine d’otages occidentaux ont déjà été rançonnés par Daech. Sachant que le « prix » d’un otage varie entre 5 et 10 millions de dollars, l’organisation aurait touché environ 112,5 millions de dollars grâce à cette activité. Le pillage le plus spectaculaire commis par Daech est sans doute celui de Mossoul, 2ème ville du pays, en juin 2014.

Après seulement quelques jours de combats, Daech prend le contrôle de la ville et s’accapare ses ressources. Elle s’empare ainsi de l’arsenal militaire laissé par les américains à l’armée régulière irakienne (chars, canons, avions…), pour un montant total estimé à 3 milliards de dollars.

De plus, l’organisation s’accapare l’argent présent dans la banque centrale d’Irak située à Mossoul : de l’or (200 kilos, soit environ 7 millions de $) mais aussi les liquidités déposées par les banques (évaluées à 400 millions de $). Au total, l’organisation aurait donc empoché 3 407 millions de $ grâce à la prise de Mossoul. Ce schéma est reproduit à chaque fois qu’une ville est conquise (confiscation du matériel militaire et des ressources financières de la ville). » (Economiematin)

Certains pays, des plus puissants et des plus militarisés n’hésitent pas à voir, avec la naissance de DAECH les prémices d’une troisième guerre mondiale. Sans souscrire à cette déduction qui nous semble quelque peu exagérée, il faut tout de même avouer que le phénomène est un présage qui inquiète et interroge avec gravité.

Face à ce phénomène insaisissable, à son ampleur et à ses manifestations tout aussi imprévisibles que destructrices, le monde n’a plus le choix: Il faut faire fi des susceptibilités et antagonismes résiduels des configurations géostratégiques du passé et s’atteler ensemble à anéantir la bête immonde.

Face à cette menace mondiale majeure, il faut savoir établir une autre grille de lecture dans l’appréciation des déficits démocratiques dans les pays où la menace djihadiste est jugée lourde. Face au danger, il n’y a pas d’alternative autre que cette approche pragmatique. Sur le plan régional, particulièrement en ce qui concerne le continent africain, nous devons pour notre propre survie endosser notre part de responsabilité dans la bataille.

La guerre contre ce terrorisme ne fait que commencer, elle ne peut être menée à notre place par la France ou les Etats Unis d’Amérique, elle perdurera sur notre continent aussi longtemps que nous ne nous serons pas résolus et préparés à la prendre à notre propre charge.

L’aide de la communauté internationale au soutien logistique et financier ainsi qu’à la formation technique des hommes est certes souhaitée pour un départ mais devra être programmée pour s’éteindre au bout d’une période arrêtée d’un commun accord. Pour vaincre le terrorisme une coopération étroite en matière de renseignement et d’appui aérien aux troupes terrestres doit être maintenue avec les armées à capacités opérationnelles limitées.

Les pays directement concernés et ceux susceptibles d’être atteints par la menace à court ou moyen terme doivent prendre leurs responsabilités, s’armer du courage et de la volonté pour affronter ce problème et le vaincre. C’est tout à fait à leur portée pour peu qu’ils se départissent de l’esprit d’assistanat et qu’ils croient en eux-mêmes.

La confiance en soi est le ressort déterminant pour aller de l’avant en toutes entreprises humaines, particulièrement celles relevant du métier des armes. Dans notre zone sahélo sahélienne et sa proximité peu d’armées sont adaptées au combat antiterroriste en zone désertique, hormis celles de l’Algérie, du Maroc, du Tchad et de la Mauritanie.

Ceci n’est pas dit par mépris pour les autres armées que je respecte, mais des unités qui ne sont pas conçues pour un combat de mobilité, de fluidité avec une grande autonomie et une très forte puissance de feu ne peuvent faire face à ce genre d’ennemi alerte et insaisissable. Cette période transitoire de préparation des armées de la zone ne pourra faire l’économie de l’installation de bases occidentales en trois ou quatre points tout au long de la bande sahélo sahélienne.

Ces points d’appui pourraient jouer pour une période déterminée, l’indispensable soutien dans les domaines de la logistique, du renseignement et de la formation opérationnelle des unités de combat africaines. L’Algérie, le Maroc, la Mauritanie et le Tchad pourraient constituer les trois piliers sur lesquels s’appuierait cette lutte antiterroriste au Sahel.

Ils assumeront sans le moindre doute avec compétence le rôle de locomotives du processus. Un tel projet, exige pour son succès une coopération franche et dénuée de tout complexe entre les états impliqués comme sont entrain de le faire présentement les puissances militaro-industrielles, tous continents et idéologies confondus.

Si la communauté internationale n’anticipe pas au plus vite une stratégie fondée sur l’installation de points d’appui logistiques et opérationnels continentaux, la constitution d’unités de combat africaines avec des compétences techniques militaires de haut niveau et un transfert de technologies sans réserve, le terrorisme ne pourra être éliminé. Depuis quelques années et ce malgré l’implication occidentale directe dans la lutte, le terrorisme s’enracine dans le sahel et commence à gangréner en profondeur le continent.

Les interventions occidentales ponctuelles, malgré leur puissance et leur incontestable efficacité ne pourront rien y faire, aussitôt détruite, la pieuvre se régénérera en quelques mois, pour réémerger dans une autre contrée. La lutte anti terroriste ne peut se faire que directement sans interruption, par ceux qui subissent le phénomène et par des moyens militaires autochtones.

La Mauritanie a bien compris et assimilé au prix fort hélas la donne, mais la mobilisation de forces à la hauteur des enjeux, leur équipement et leur entretien dans la durée est un défi qu’elle a certes jusqu’ici relevé mais dont la charge est disproportionnelle à ses capacités économiques.

Ce qui est dit ici vaut pour le Tchad, quant à l’Algérie et le Maroc, pays jouissant d’une économie solide et équilibrée, ils n’ont besoin que d’une franche coopération et d’un transfert sincère de technologie en plus du renseignement opérationnel.

La guerre contre le terrorisme est à engager maintenant, et sans délai, une guerre qui ne peut être gagnée qu’avec l’ensemble de la communauté internationale. Par ailleurs, l’ont ne peut, devant un danger d’une telle envergure se cacher derrière son petit doigt en feignant de croire qu’une guerre peut se gagner avec seulement des bombardements aériens. Non, sans troupes au sol aucune guerre n’a et ne sera jamais gagnée ; une règle élémentaire connue de toutes les académies et écoles de guerre.

Ce combat universel doit commencer par l’anéantissement des bases de DAECH sur tous les continents pour tarir leur sources de financement et finir par la traque sans répit de ces illuminés où qu’ils puissent se cacher. Les pays industrialisés, particulièrement les puissances militaires doivent s’investir dans une vaste coalition jusqu’à l’éradication totale du monstre ce, nous le réitérons, nonobstant les rivalités et antagonismes idéologiques.

6) La guerre contre le terrorisme ne saurait être que militaire, elle est aussi et surtout spirituelle et économique.

Il ne faut pas tomber dans les erreurs du passé : croire que le terrorisme est le problème des autres et que les pays nantis peuvent continuer à vivre dans l’opulence en vase clos alors qu’ailleurs dans la plus large partie du monde, des gens croupissent dans le dénuement et la misère.

Que d’aucuns soient prédestinés de leur naissance à leur mort aux maladies et à la souffrance et que d’autres soient élus pour le bonheur terrestre ne peut mener que vers une scission de l’humanité.

En l’absence de toute perspective d’une vie descente sur cette terre, la mort peut, à l’extrême paraître comme une sorte de délivrance ou tout au moins ne plus constituer une fin à craindre. Dès lors la question fatale du « pourquoi l’autre et pas moi » se pose inéluctablement, cette interrogation métaphasique grave poussée à l’extrême peut pousser à cette révolte qui peut mener au terrorisme.

Le monde industrialisé commettrait une erreur grave en se barricadant encore un peu plus et en s’en prenant à ses minorités issues de l’immigration, telle réaction serait la meilleure manière de provoquer le repli identitaire, d’aiguiser les antagonismes et de grossir les rangs des courants marginaux.

Le monde nanti doit accepter de donner un peu de soi et faire quelques petits sacrifices sur son bien-être, donner un peu pour ne pas tout perdre. Ce monde doit comprendre et admettre que l’autre, autrefois lointain et ignorant de ce qui se passe autour de lui est aujourd’hui à ses portes ; une main tendue et l’autre tenant un poignard derrière le dos. Une coalition large et durable celle-là, doit s’atteler à combattre la pauvreté dans le monde en s’investissant plus dans l’aide au développement des pays pauvres.

Simultanément à cet élan, les établissements, mosquées et institutions musulmanes doivent s’engager dans la déconstruction des philosophies qui fondent le djihadisme et mettre en évidence ses nombreux écarts blasphématoires au regard de l’Islam authentique. Cette campagne doit recevoir tout l’appui des états et recevoir une place particulière dans l’enseignement religieux, sociologique et historique universels.

Pour annihiler toute emprunte de la culture djihadiste, les territoires libérés de ce dernier doivent être prioritaires dans cette prise en mains économico-spirituelle. Dans ce domaine également, comme nous avons eu à le souligner plus haut, la Mauritanie a initié, dès les premières emprises de ce prétendu jihad sur sa jeunesse une campagne agressive de sa déconstruction théologique menée par nos érudits sous l’encadrement engagé du Président Mohamed Ould ABDEL AZIZ et son gouvernement.

Cette opération a donné des résultats positifs inattendus qui ont pesé dans l’éradication des germes du terrorisme. Notre pays pourrait sans le moindre doute, être d’un apport important dans l’introduction de cette approche.

Colonel Intendant/Ret

Houssein BABY

















Les articles, commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité


Source : Houssein Baby
Commentaires : 5
Lus : 2033

Postez un commentaire

Charte des commentaires

A lire avant de commenter! Quelques dispositions pour rendre les débats passionnants sur Cridem :

Commentez pour enrichir : Le but des commentaires est d'instaurer des échanges enrichissants à partir des articles publiés sur Cridem.

Respectez vos interlocuteurs : Pour assurer des débats de qualité, un maître-mot: le respect des participants. Donnez à chacun le droit d'être en désaccord avec vous. Appuyez vos réponses sur des faits et des arguments, non sur des invectives.

Contenus illicites : Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes ou antisémites, diffamatoires ou injurieux, divulguant des informations relatives à la vie privée d'une personne, utilisant des oeuvres protégées par les droits d'auteur (textes, photos, vidéos...).

Cridem se réserve le droit de ne pas valider tout commentaire susceptible de contrevenir à la loi, ainsi que tout commentaire hors-sujet, promotionnel ou grossier. Merci pour votre participation à Cridem!

Les commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité.

Identification

Pour poster un commentaire il faut être membre .

Si vous avez déjà un accès membre .
Veuillez vous identifier sur la page d'accueil en haut à droite dans la partie IDENTIFICATION ou bien Cliquez ICI .

Vous n'êtes pas membre . Vous pouvez vous enregistrer gratuitement en Cliquant ICI .

En étant membre vous accèderez à TOUS les espaces de CRIDEM sans aucune restriction .

Commentaires (5)

  • bougouffe (H) 28/11/2015 09:16 X

    Un grand officier doublé d’un intellectuel de très grande classe. Merci pour cette belle analyse.

  • dorocire_ly (H) 28/11/2015 09:08 X

    Tout simplement brillant, rien à rajouter !

  • Brahimsidi (H) 28/11/2015 09:04 X

    BABY nous vous remercions pour cette brillante contribution de très haut niveau. Nous qui connaissons votre brillant cursus, vos grandes qualités morales et intellectuelles, votre humilité vous convions à continuer à nous gratifier de vos analyses profondes et constructives. Courage, vous ferez, comme par le passé l’objet de beaucoup d’attaques mesquines des mêmes jaloux que vous connaissez mais dites-vous que seuls les grands hommes suscitent la jalousie, les médiocrités passent inaperçues. Fraternellement

  • cheikhyouba (H) 28/11/2015 00:16 X

    1. Le CID n’existe plus, monsieur est resté fossilisé, en retard de quelques guerres ! 2. L’Ecole de guerre ne forme pas au sens propre du terme, c’est une rencontre d’officiers de haut rang et en principe de haut niveau pour un cycle de réflexions et de conférences sur les problèmes géostratégiques majeurs. On y accède déjà formé pour certains et en touristes pour d’autres ; suivez mon regard !

  • Symaodo (H) 27/11/2015 22:55 X

    oui bien,très bien même c'est digne d'un officier qui aurait pu faire l’école de guerre de Paris ou le C I D