L'Eveil Hebdo - Consultante en genre et développement et leadership féminin Présidente du Comité de Solidarité avec les Victimes des Violations des Droits Humains ( CSVVDH) en Mauritanie « Au-delà des slogans de campagne, il faut maintenant passer de la parole aux actes »

Au cours d’un entretien à l’occasion du 8 Mars, journée internationale pour les droits des femmes, Mme Lalla Aicha Cheikhou Ouédraogo a bien voulu nous livrer son opinion sur certaines questions brulantes se rapportant à la situation de la femme mauritanienne.

Question : Dans notre pays y a-t-il eu des progrès réels pour l’émancipation et la libération des femmes ? Citez quelques points forts et quelles sont encore les insuffisances ?

Par rapport à cette question, on ne peut être nihiliste, Parce que nous enregistrons une évolution du statut de la femme, au niveau législatif, par l’existence du CSP qui consacre certains droits à la femme dans son foyer même si ce code demande à être révisé et amélioré dans son contenu pour être en phase avec les conventions internationales dont est signataire notre pays.

Dans la pratique on trouve plus de femmes dans les sphères de décision ( le parlement, ministres ,directrices, maires …) comparativement aux années 90-2000. Cependant le taux de femmes dans ces sphères de décision, est faible par rapport au poids démographique des femmes (52%) de la population.

Le progrès enregistré, cache aussi des disparités importantes entre le milieu rural et urbain, mais aussi entre les communautés et couches sociales.

Question : Souvent le 08mars est accaparé par les pouvoirs politiques et sa célébration revêt alors un caractère folklorique. Qu’est ce qu’il faut faire pour éviter ce dérapage et donner un contenu exhaustif à cette mémorable et historique journée de lutte ?

Le gouvernement pour commémorer le 08 mars, met l’accent sur le folklore parce que dans le subconscient social, y compris des intellectuels, l’image de la femme est assimilée à l’organisation de festivités (jeux, danse, exposition d’objets d’arts traditionnels…) .

C’est pour cette raison que pendant plusieurs années, la fête est vécue comme un moment festif où les femmes se retrouvent entre elles, exposent les objets qu’elles confectionnent. Très peu de temps était consacré réellement à la réflexion et aux échanges sur les grands défis à relever tels, les violences basées sur le genre, l’autonomisation des femmes, leurs faibles niveaux éducatifs.

Les femmes gagneraient plus à rechercher et trouver des solutions idoines pour combattre les pesanteurs sociales qui bloquent leurs esprits d’initiatives et leurs savoir être et faire.

Pour accorder à cette journée toute la valeur qui lui sied, il serait important de faire l’état des lieux de la situation de la femme mauritanienne, collaborer avec la société civile pour une meilleure stratégie de prise en compte de la question Genre.

Travailler en synergie avec tous les acteurs, en vue d’un meilleur plaidoyer portant haut l’étendard de la libération effective des femmes de tous les fléaux handicapant son émancipation réelle. Au delà des slogans de campagne, il faut maintenant passer de la parole aux actes »

Question : Dites nous brièvement où en est la parité chez nous ?

Les résultats des élections en 2013, montrent ce qui suit:

- Au niveau des conseils municipaux : 1317 Femmes/3722 conseillers, ce qui représente 35,38% contre 30 %en 2006

-Au niveau des bureaux des communes et de la Communauté urbaine de Nouakchott(CUN) : 6 femmes maires /218 soit 2.75%; dont la Présidente de la CUN , et 4 femmes maires de communes rurales)

-Au niveau de l’Assemblée Nationale : 33 Femmes sur 147 députés, soit 22,4% contre 18 % en 2006

Pour le sénat , bien qu’il n’a pas été renouvelé; les femmes sénatrices sont de 10/56 en 2014, soit 5% au lieu de 9/56 en 2006

Propos recueillis par AOB

* Lalla Aicha Cheikhou Ouédraogo Consultante en genre et développement et leadership féminin Présidente du Comité de Solidarité avec les Victimes des Violations des Droits Humains ( CSVVDH) en Mauritanie