23-03-2017 08:45 - Editorial de la Nouvelle Expression : Les sénateurs, refus de la guillotine ou gifle
La Nouvelle Expression - Les sénateurs ont dit non à l’exécutif. Cette gifle n’a, peut-être, surpris que le chef de l’exécutif, le président Mohamed Abdelaziz. Tous les troubadours qui rodent autour de lui savaient que les sénateurs se feront difficilement guillotiner.
L’exécutif avait pourtant, à sa manière, mis tout en œuvre pour réussir son coup. Des terrains et d’autres avantages avaient été distribués aux élus de la Chambre haute. Et malgré cela le pouvoir a été désavoué et par cette décision le système a frémi.
On parle de l’historicité de ce vote. Peut être oui. Mais le peuple ne se trompe pas d’héros car ces élus en votant contre les reformes constitutionnelles (issues, dit-on, d’un dialogue inclusif) ridicules, inutiles, sans efficience sur la vie et l’existence du citoyen, des reformes voulues, ont plus voté pour le maintien du sénat qu’autre chose.
Le sénat, c’est leur vache à lait, une institution caduque, illégale, symbolisant la crise multidimensionnelle qui affecte le pays et le pouvoir d’achat des citoyens.
Le chef qui pense être trahi va-t-il tirer les conséquences qui s’imposent ? On ne pense pas trop. Dans un pays où tout est pensé, voulu et décidé par une seule personne, on ne peut parler d’avenir, on vit au présent misérablement car on n’existe pas. Annihilé, atrophié par des sangsues qui sont aux commandes par et pour leurs intérêts personnels, le peuple ne pense qu’au véritable sursaut.
Et cette fois-ci puisque le désaccord s’est matérialisé entre les sangsues, comme des spectateurs de la lutte sénégalaise, le peuple s’en fout car le perdant ou le gagnant a déjà son cachet.
Le peuple mauritanien veut exister en tant que nation avec une perspective d’avenir réfléchie et probante. Ce peuple meurtri et sucé mérite plus. Ce vote des sénateurs considéré comme un camouflé pour le pouvoir provoque, c’est vrai, une certaine hilarité chez le peuple mauritanien face à cet exécutif méprisant mais, au fond, il n’est rien d’autre qu’un jeu de lièvre et de l’hyène qui n’a que trop duré alors que les Mauritaniens d’en bas n’en peuvent plus.
C’est dire qu’on ne peut pas applaudir des élus qui s’en moquent des agriculteurs du Gorgol, ces paysans qui veulent éviter la famine à la région.
On ne peut pas applaudir des élus qui ne s’intéressent pas aux cris de désespoir des maraichers de l’Adrar ni aux pleurs des femmes de Garak pour leurs milliers d’arbres fruitiers et autres cultures sources de vie et de lutte contre l’insécurité alimentaire.
On ne peut pas applaudir des élus qui ferment les yeux devant les tares qui minent la cohésion de notre société, comme ce feu qui couve au Guidimakha alimenté par l’esprit féodal soutenu par des autorités esclavagistes.
Ces élus n’ont jamais été à la hauteur des attentes du peuple mauritanien. Ils sont juste des animateurs d’une Chambre d’enregistrement et d’applaudissement pour l’émir du moment.
S’ils cessent d’enregistrer et d’applaudir ce, c’est que l’exécutif a touché au mauvais bouton, voulant ainsi les faire danser un air dont ils ne goûtent pas la composition. Leur désaccord pour des intérêts individuels n’a, pour ainsi dire, qu’un intérêt limité pour le peuple qui, à défaut d’autre chose, peut tout de même en rire et se frotter les mains, car la suite, le spectacle pourrait être plus intéressant.
Camara Seydi Moussa