16-09-2017 13:12 - Le Kenya et nous

Le Kenya et nous

Le Calame - Au Kenya, la Cour suprême a invalidé le résultat de l’élection présidentielle du 8 août dernier et, partant, la réélection du président sortant Uhuru Kenyatta pourtant déjà proclamé vainqueur par la commission électorale indépendante.

Pour les juges kenyans, des «irrégularités ont affecté l’intégrité de l’élection», qui «n’a pas été conduite en accord avec la Constitution». Le résultat de l’élection, ont dit les juges, «est donc invalide et nul», et un nouveau vote doit être organisé sous deux mois.

Commentant cette décision de la Cour, prise à une majorité de quatre juges sur six, le président Uhuru Kenyatta a dit : «Personnellement, je suis en désaccord avec la décision qui a été prise mais je la respecte».

En Mauritanie, en dépit du bourrage avéré des urnes, de l’embrigadement des personnels et fonctionnaires de l’Etat, de la fraude à grande échelle facilitée par les autorités administratives régionales et locales et même par certains membres de la CENI, les résultats du scrutin référendaire portant sur des amendements de la loi fondamentale, ayant déjà fait l’objet d’un rejet sans appel par le parlement, ont été, sans coup férir, validés le 15 Août, par le conseil de Sghaïr Ould M’Barek.

Malgré la fraude à ciel ouvert qui a entaché le scrutin, malgré un grand nombre de flagrantes irrégularités dont des procès verbaux où le nombre de votants dépasse le nombre d’inscrits, le conseil constitutionnel mauritanien n’a rien eu à redire.

C’est à peine s’il a reconnu avoir reçu des recours en annulation (présentés par certains électeurs) qu’il a dit rapidement avoir rejetés. Rien de plus.

N’ayant aucune illusion sur ce qu’est ce conseil constitutionnel ni sur ce qui peut être attendu de lui, Me Bettah, président de la Convergence Démocratique Nationale, seul parti de l’opposition à avoir choisi de participer au référendum en faisant campagne pour le Non, n’a même pas daigné présenter un recours en annulation !

Au Kenya, Raila Odinga, le rival du président sortant, qui avait dénoncé des fraudes et saisi la plus haute juridiction du pays, n’a pas été inquiété. Mieux, c’est lui qui pose les conditions de sa participation à l’élection bis et exige le remplacement de certains membres de la commission électorale indépendante dont la moralité lui semble douteuse.

En Mauritanie, c’est tout le contraire ! Tous ceux qui ont osé exprimer leur hostilité aux amendements constitutionnels sont sur la ligne de mire du pouvoir. Des Sénateurs, des journalistes, des syndicalistes et des hommes d’affaires ont ainsi eu maille à partir avec la justice du pouvoir.

Celle-ci n’y était pas allée de main morte. Elle a distribué à tour de bras mandats d’arrêt, de dépôt et placements sous contrôle judiciaire. Tous ceux qui sont poursuivis dans le cadre de ce dossier dit «crimes transfrontaliers de gabegie» ont, en prime, été traînés devant la police et le parquet où certains parmi eux ont été retenus et interrogés toute une nuit.

Mais ce qui est le plus gênant dans tout ça, c’est que, dès le début, certains avaient prédit que le pouvoir des généraux allait sévir contre les sénateurs qui lui avaient administré un soufflet le 17 Mars 2017 en rejetant la réforme qu’il proposait.

Il s’agirait donc de poursuites préméditées engagées, sinon pour trucider l’opposition du moins pour l’affaiblir et montrer à l’opinion que c’est, seul, le pouvoir qui a la haute main sur le pays.

Voilà, en gros quelques-unes des différences qui distinguent la Mauritanie du Kenya, s’agissant surtout du fonctionnement des institutions en charge du recours et de la gestion des périodes post-électorales. Mais, ce n’est pas tout, il y en a encore d’autres:

le Kenya est une Nation qui a connu seulement deux présidents sur toute la période allant de 1964 à 1998 alors que nous on en a eu neuf. Le Kenya n’a jamais connu de coups d’Etat militaires alors que nous on a tendance à devenir le pays du million de putschs.

le Kenya est la première économie d’Afrique de l’Est alors que nous, en dépit de l’immensité de nos richesses, nous demeurons sur le carreau.

Il reste qu’en dépit de ces différences, le Kenya et la Mauritanie demeurent tous les deux dans le besoin de plus d’apaisement et de paix sociale. Le président kenyan qui a dit respecter la décision de la cour suprême et ne s’en est pas pris à ses opposants semble en être conscient. Est-ce qu’il en est de même en ce qui concerne ceux qui nous gouvernent ? Les poursuites engagées, ces jours-ci, contre plusieurs segments de la société civile ne le laissent pas penser et n’incitent, en tout cas guère à l’optimisme.

Ely Abdellah



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Commentaires (9)

  • Socrateplaton (H) 16/09/2017 17:47 X

    Aziz se fout royalement de la constitution . Il dit qu'il l'a transgressé deux fois et qu'il n'aurait aucune gêne à le faire une troisième ou une quatrième fois. Aziz ne compte que sur le Basep pour continuer à gouverner le pays , que le peuple le veuille ou non. C'est pourquoi il se permet après avoir truqué les résultats du référendum, il s'est mis à arrêter arbirtairement à arrêter tous ceux qui s'oppose à ces velléités de changer la constitution pour rester indéfiniment au pouvoir. Mais il faut qu'il est de plus en plus isolé , même ses plus proches collaborateurs ne cachent plus leur déception et leurs craintes de la fin imminente du régime. Chacun essaie de s'aménager déjà une porte de sortie avant qu'il ne soit trop tard.

  • medabdul (H) 16/09/2017 17:46 X

    Depuis quand un soit disant nationaliste arabe ou arabo berbère a l'esprit étriqué et constipe compare t'il la Mauritanie a un pays de noirs?

  • brabak (H) 16/09/2017 17:12 X

    Tu as tout a fait raison.Il n y a pas photo entre le Kenya et notre pauvre Mauritanie.

  • Opposant véridique (H) 16/09/2017 15:19 X

    Monsieur Ely, faire la différence entre la Mauritanie et le Kenya est tout d’abord une erreur de lecture politique, les juges et hommes nobles du Kenya qui viennent de lire le droit et rien le droit ont déclenchés une fureur contre les despotes, les putschistes, les dictateurs et tous ceux qui veulent rester au pouvoir par la fraude, le vol, l’intimidation avec une armée et la trahison de ses amis. La Mauritanie est une propriété de certains qui se sentent garantie et couvert par des généraux et des chefs de tribus, la démocratie n’as pas de place ici, les juges sont soumis à la diète de l’obéissance et les journalistes doivent voir du bon coté de l’intérêt d’un groupe de personnes, comme les élus qui doivent oubliés le peuple, ou aller en prison sinon mis sous contrôle judiciaire, la Mauritanie est en retard de 100 ans du Kenya, tant que nous faisons de la démocratie démagogique, les généraux vont nous exterminés.

  • jakuza (H) 16/09/2017 15:09 X

    Concernant le Kenya il faut savoir qu'un audit indépendant a conclu à l'absence totale de piratage ou de manipulations des résultats! Comme quoi...

  • leguignolm (H) 16/09/2017 14:47 X

    Oui mais "Cheikh Aly Rida" et Uhuru ont des ambitions différentes.

  • lasagess (H) 16/09/2017 14:23 X

    Je pense que tu tiens la queue du diable ou tu es en carence de sujet les gens parlent d'autre chose aujourd'hui le referendum est une page de l'histoire on en parle que pour se rappeler les souvenirs

  • bleil (H) 16/09/2017 14:19 X

    Le Kenya et nous autres, il ya une franche différence ... Un fils kenyan est devenu president des EU... cinquante de jeunes emigrants au EU furent arretés pour trafic de cigarettes (se faire du pognon rek!). Le Kenya malgré ses absurdités est un pays qui compte en Afrique et dans le monde... nous autres c'est le moyen age, le tribalisme et la flagornerie qui font le tampon du mauritanien ! Quant à l'essai c'est quand meme du journalisme de haut niveau, pas la pacotille Tvm ou Ami pour dénombrer les déplacements des idiots qui séminarisent, inaugurent ou se réunissent alors que les populations crévent sous la dalle ...

  • medabdul (H) 16/09/2017 13:21 X

    Comment peut t'on être aussi chauvin et raciste, nationaliste étriqué, et prendre comme exemple un pays noir, donc on ravale sa fierté d'arriéré, donc les références ne se sont plus le Yémen ou le Qatar ou l'Egypte, on n'est plus arabe ou quoi?