13-05-2018 18:00 - Mauritanie : La question du troisième mandat

Mauritanie : La question du troisième mandat

Initiatives News - La question du troisième mandat repose plutôt sur la perception de l’opposition comme «une entité virtuelle» selon le discours officiel plutôt que sur le désir et la volonté de confiscation du pouvoir politique.

Sinon comment en est-on arrivé à la banalisation de cette question ? Comment un tel verrou frappé de la clause d’éternité va-t-il sauter sans susciter aucune forme d’indignation à la hauteur de ses enjeux?

La stratégie du pouvoir est très efficace et elle consiste à faire parler des personnalités, des groupes de pression et des acteurs exerçant des fonctions symboliques (Les Imams) pour légitimer un troisième mandat.

Dans cette perspective, l’opposition n’est plus considérée comme le porte parole du peuple et ne saurait donc revendiquer le monopole de diffusion des aspirations populaires.

Je commence à me fatiguer du fait que les intellectuels ne soient pas pris au sérieux dans ce pays. En effet, en 1998 déjà je disais dans une conférence qu’il va falloir chercher des réponses concrètes à la question de la persistance des pratiques esclavagistes.

Je me rappelle qu’on ma regardé comme un pestiféré et quand j’ai soulevé la fissure entre le discours officiel qui s’en tient au respect de la Constitution et le permis donné à des personnalités pour initier des pétitions et faire des déclarations allant dans le sens d’un troisième mandat, on m’a rétorqué que le Président est clair sur cette question.

Volonté de confiscation du pouvoir politique

On feint d’ignorer que tous les chefs d’États africains qui ont révisé la Constitution ont toujours clamé le contraire ! Une formulation contraire de mon hypothèse est possible et envisageable à savoir que la banalisation de la question du troisième mandat repose plutôt sur le désir et la volonté de confiscation du pouvoir politique plutôt que sur la perception de l’opposition comme «une entité virtuelle» selon les autorités.

Il reste que dans tous les cas de figure, la question demeure et persiste et ce ne sont pas les félicitations que l’Union Européenne a adressées au pouvoir qui vont nous rassurer.

Il va falloir trouver des moyens pour éclairer les populations sur cette nouvelle stratégie d’accaparement et de confiscation du pouvoir politique car dans nos démocraties, l’opposition est piégée par les prescriptions de la légalité républicaine.

Tout appel à une forme de lutte, autre que la voie légale et républicaine est très mal perçue et criminalisée. Nous nous acheminons donc vers un référendum et il faut se préparer. Il ne sert à rien de faire semblant que ce processus ne va pas aboutir. Je peux me tromper car je ne suis pas un devin mais j’aimerais bien que quelque me donne des arguments prouvant le contraire.

Si nous ne pouvons pas créer les rapports de force nécessaire pour freiner ce processus, essayons au moins de gagner le combat de la mobilisation des populations.

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Abdoulaye Doro SOW

Enseignant-chercheur en sciences sociales Président du Comité Scientifique de l’Equipe de Recherches sur les Mutilations Génitales Féminines (ERMGF)

Coordinateur du Centre Interdisciplinaire sur les Droits Culturels (CIDC)

Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Université de Nouakchott





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Commentaires (2)

  • nemahaidara (F) 14/05/2018 17:20 X

    Dans toutes les démocraties ,( dans le sens occidental) aujourd'hui , "l’opposition est piégée par les prescriptions de la légalité républicaine " C'est cela même à mon sens le fondement de la démocratie , le respect de la loi. Maintenant reste à sensibiliser les mauritaniens sur les notions fondamentales pour lesquelles tout se meut en Mauritanie.Ces notions comme l'Etat, la république , la citoyenneté ,le patriotisme , la lutte contre les discriminations etc...gagneraient à être vulgariser afin que l'alternance si elle a lieu puisse être perçue par les populations comme un changement . A défaut de cela , ce ne sera qu'un changement d'hommes sans évolution véritable vers le vivre ensemble ciment de toute république .

  • Dangerous (H) 13/05/2018 19:37 X

    On dit qu’un vieux couché voit plus loin qu’un enfant debout, je crois que nous vivons aujourd’hui notre propre silence de l’enfer politique que nous avons cultivé depuis belle lurette. Nos hommes politiciens qui se veulent politiques sans savoir pourquoi, ils ne défendent que leur propre intérêt, ou tribal et même souvent communautaire. Aziz peut rester au pouvoir tant qu’il règle le problème économique de certains clans qui profitent des richesses du pays sans le demander, mais constituant une menace ou un appui sécuritaire pour le système, il peut rester au pouvoir tant que nos religieux ont comme cheval de bataille l’esclavage qu’ils veulent maintenir, Si Ould Tah qui se dit érudit et se faisait respecter par tous les mauritaniens peut dire sans contournement aucune au président de la république de violer son serment Coranique, on attend quoi de qui pour dire mieux ou dire NON. Nous mauritaniens nous sommes dangereux pour le monde et la démocratie, nous croyons à rien du tout, nous sommes spécial et spécifique, nous n’avons aucun respect pour aucune institution Nationale ou Internationale tant que nos intérêt sont en jeu, la Mauritanie n’est pas notre souci, notre souci ce sont nos commerces et autres activités lucratif quitte à vendre des êtres humains en Arabie Saoudite, nous sommes dangereux pour l’avenir.