31-05-2018 08:29 - Si j’étais "Birame" par Tijane BAL

Si j’étais

Tijane Bal - Si j’étais président de la République… chantait une ancienne gloire de la chanson. Ayant décliné un programme sympathique mais loufoque, l’artiste concluait par je ne serai jamais président de la République.

Birame Dah Abeid
doit rêver d’une issue différente. Lui qui vient d’officialiser sa candidature à Paris. Au fait, pourquoi Paris ? Le choix mériterait débat. Côté symbole, faire une telle annonce de l’étranger est a priori surprenant. Des considérations d’efficacité peuvent y avoir présidé.

La recherche d’une ample couverture médiatique peut-être. A cet égard, la polémique FPC/FLAM au sujet d’un prétendu soutien (finalement démenti) a fait office d’amplificateur. La quête d’une stature internationale a pu également jouer. « Birame » est désormais l’un des ténors nationaux à sortir du bois.

Ce faisant, il se retrouve un peu plus dans le viseur des chasseurs. C’est pourquoi, alors même que personne ne lui a rien demandé et sans que cela préjuge en quoi que ce soit de son vote, le signataire de ces lignes se permet (sans aucune prétention si ce n’est celle de faire sourire) quelques recommandations censées aider à déjouer des pièges.

Solder le passé

Cette recommandation est, au-delà du seul « Birame », valable pour tous les candidats à la présidentielle. Les concurrents seront là pour leur rafraîchir la mémoire. Solder le passé de son propre chef est donc une étape essentielle. N’attendez pas d’y être contraints.

Il importe d’emblée d’allumer, si nécessaire, des contre-feux. Et ce bien en amont de l’échéance… Cette démarche vous permettra le cas échéant d’objecter plus tard : de grâce, n’y revenons pas. Je me suis déjà expliqué sur le sujet. Il s’agit ainsi de neutraliser les polémiques probables et de désamorcer les dommages potentiels.

Cela s’appelle du déminage. En l’occurrence, les mines à retardement consistent principalement en des déclarations, des prises de position anciennes, désormais source d’embarras, des affinités antérieures devenues compromettantes.

Suivant les cas, l’erreur de jeunesse, les pressions liées au contexte et surtout la sincérité de la conversion peuvent tenir lieu de parades. Je suis et/ou j’ai fait comme tout le monde parce que je ne pouvais pas faire autrement……. Il suffira, après, de se faire convaincant.

Ne pas mépriser les anciens :

Retour à « Birame ». Je présume que vous vous savez attendu sur le terrain de la légitimité. Les sceptiques ne manqueront pas de vous faire observer que des pionniers vous ont précédé dans votre combat actuel contre le racisme, les discriminations, l’esclavage et plus spécifiquement en faveur de la cause H’ratine.

Ils vous rappelleront des figures tutélaires et des noms qui ne vous sont pas inconnus. Ils vous feront remarquer que les FLAM existent depuis 1983, El Hor depuis bien plus longtemps encore (40 ans je crois). Les faits étant indéniables, vous ne perdrez rien à les reconnaître. Concédez-les donc. Et tant qu’à faire, de bonne grâce.

Reconnaissez également ce dont vous êtes redevable à vos devanciers sans omettre de mentionner vos acquis, votre contribution, l’originalité de votre démarche. Célébrez les continuités et marquez les ruptures. Les unes et les autres sont importantes.

Etre un peu Jesse Jackson

La plus prévisible des critiques qui vous seront adressées est d’être prévisible justement. Vous pourrez difficilement nier que votre crédo politique est écrasé par un thème dominant.

Les mauvaises langues diront unique. Vous-même pourriez (veuillez excuser l’irrévérence) être qualifié de monomaniaque politique. Un président étant un généraliste, un aspirant président se doit de l’être tout autant. Sa crédibilité en dépend. Vous serez donc sollicité et jaugé sur des thématiques qui vous sont moins familières.

On vous titillera sur la fiscalité, l’emploi, la santé, le système éducatif, la diplomatie… Pour tester votre fiabilité, on vous bousculera de votre zone de confort vers des terrains plus mouvants.

N’étant pas a priori le favori de la présidentielle, on vous prendra de haut. Comme un certain Obama en 2008. Du moins au début. Rappelez-vous la colère des Africains américains quand Bill Clinton décréta que la candidature d’Obama était vouée au même sort que les tentatives précédentes de Jesse Jackson.

Populaire auprès de la communauté noire au point d’être qualifié de premier président noir des Etats-Unis par Toni Morrison, Clinton n’en fut pas moins suspecté de racisme.

En fait, les Blacks avaient décrypté l’objectif de disqualification contenu dans son message, l’appel sous-jacent au « vote utile », assorti d’un clin d’œil aux électeurs blancs : Allez, pas d’inquiétude. Il n’ira pas plus loin.

Le soufflé va retomber. Hillary lui fera mordre la poussière. Communautaire aux yeux de Clinton, la candidature d’Obama ne devait pas dépasser ou de peu le cadre de la communauté noire. Peu importe à la limite que Clinton y ait cru ou pas.

La suite devait démentir son pronostic feint ou réel. Il se trompait sur le sens du pari d’Obama en faisant mine d’ignorer qu’à la différence de Jesse Jackson, celui-ci était candidat pour gagner et non pour témoigner et encore moins pour faire de la figuration. Jesse Jackson, quant à lui, était suffisamment averti de la nature du système américain pour ignorer qu’il ne pourrait pas franchir le cap des primaires démocrates.

Quant à être élu président des USA …Ses candidatures successives poursuivaient d’autres objectifs : inciter les Noirs américains à s’inscrire sur les listes électorales et à aller voter. Jackson savait que ses appels à une coalition arc-en-ciel resteraient vains car l’heure n’était pas venue.

Etre un peu plus Obama

On ne manquera de vous demander avec qui gouvernerez-vous et auparavant avec qui comptez-vous aller à la bataille ? Adressée à vous, la question n’est pas si anodine. Elle est piégée. Faites de votre mieux pour vous extraire du carcan dans lequel on cherchera à vous enfermer, celui de la candidature monothématique, raciale et/ou ethnique.

Fantasme pour les uns, espoir pour d’autres, cauchemar pour d’autres encore, la très hypothétique coalition des Négro-mauritaniens contre le « système beidane » derrière votre panache blanc fait rêver ou trembler.

Cette perspective est-elle seulement réaliste ? Rien n’est moins sûr car le statut de porte étendard est très disputé. Les FLAM pourraient vous le contester du haut de leurs trente-cinq années d’existence.

El Hor ou ses continuateurs et d’autres ne seront pas en reste. Est-elle souhaitable ? On est en droit d’en douter également. A votre place, je récuserais toute candidature raciale au profit d’une candidature fédératrice dans la mesure du possible, antiraciste, contre les discriminations, pour l’égalité et adossée à un projet de société progressiste.

Rappelez-vous le discours de soutien d’Obama, alors sénateur, au candidat John Kerry dans lequel il déclarait : il n’y a pas d’un côté les « Etats rouges » ( red states républicains) et de l’autre les « Etats bleus « (blue states démocrates). Il y a les Etats-Unis d’Amérique. Il vous suffira de remplacer « rouge » par noir, « bleu » par blanc ou vice versa et Etats par Mauritanie.

Cela étant, je ne suis pas « Birame » et « Birame » pourrait allègrement se passer de mes recommandations. J’avais prévenu. C’est pour sourire.

Tijane Bal

PS : prochain article. Si…. j’étais Aziz










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Source : Tijane Bal
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Commentaires (10)

  • Eclair (H) 01/06/2018 19:46 X

    Grand frère Tidjane. J’espère que désormais nous aurons souvent l’honneur et le privilège de vous lire sur CRIDEM. L’éclat de votre plume et la finesse de vos analyses rehausseraient, pour sûr, la qualité des débats. Respects !

  • Belphegor (H) 31/05/2018 22:53 X

    @Ahmedabdallah Mieux vaut tard que jamais, vous aviez une telle admiration pour ce mercenaire que toute critique à son encontre était perçue comme un blasphème à vos yeux, je ne parle pas particulièrement de vous mais de tout ceux sur ce site qui se mettaient à invectiver voir insulter tout intervenant qui ne chante pas les louanges de cet escroc parce que dans leur étroitesse d'esprit on ne peut pas être pour une Mauritanie plus juste et égalitaire et ne pas vénérer Biram...Le réveil est brutal mais vous finissez enfin par comprendre aujourd'hui que ce combattant de pacotille ne lutte que pour lui même: son agenda politique personnel, sa visibilité médiatique, ses prix et médailles et surtout pour les subsides qu'il amasse ça et là en occident en surfant avec opportunisme sur la vague d'islamophobie qui y prévaut, lesdits subsides que ceux qu'il prétend défendre n'ont jamais vu la couleur (à plus forte raison bénéficié de quelque façon que ce soit) pour eux mais continuent à être abreuvés de slogans et discours populistes, haineux et démagogues par ce sinistre personnage...Il fera jour en Mauritanie sur un pays plus juste, égalitaire et surtout réconcilié entre tous les membres de ses groupes ethniques mais il était illusoire de croire depuis le début que ce Mandela ou Malcolm X de pacotille était l'homme qui le fera.

  • Ahmedabdallah (H) 31/05/2018 15:44 X

    Monsieur TIJANE BAL, vous ignorez à ce point les réalités socio-politico-tribales de cette insignifiante Mauritanie au point d'oser établir un parallèle avec les grandes nations comme les Etats-Unis d'Amérique? Si vous ne nous aviez prévenu que tout votre long "article" c'est juste pour "sourire", on se serait inquiété pour vous, sérieusement: Biram Dah Abeid pour qui on avait une admiration sans limite est entrain de montrer des signes décevants d'un opportuniste aux ambitions devenues floues et débordantes depuis qu'il a commencé à manifester son désir ardent de devenir président de la république bananière de Mauritanie, coûte que coûte. Il perd sa crédibilité et toutes ses dix dernières années de lutte pour les Droits de l'Homme dans notre pays sont entrain de couler dans l'eau, de s'écrouler. Au grand dam des patriotes de l'intérieur du pays et de celui de la diaspora! C"est dommage!!

  • bleil (H) 31/05/2018 14:32 X

    Si nous allons clôturer la liste des castrés de militaires par Biram le pays n'est pas sorti de l'auberge ... le pays requiert de la bonne gouvernance légitimée par le vote des urnes pour aborder et solutionner tous ses problèmes socio-économiques ! mais le malheur des idiots, en première ligne, c'est qu'il très difficile de leur faire comprendre que les fleurs sont meilleures que les ordures ...

  • hamadel (H) 31/05/2018 13:37 X

    LE sawab et l' upr c'est kif kif mbourou fof ko farign le part Sawab a fait le génocide de négros Mauritaniens;la radiation,la déportation vers le senegal et l'upr est entrain de faire sa radiation des noirs de l'administration territoriale et de l'apatridie a travers son génocide biométrique

  • ASSOCIATION MAIN PROPRE (H) 31/05/2018 13:35 X

    Biram dah abeid ne sera jamais jamais jamais président de la Republique ISLAMIQUE de Mauritanie, les mauritaniens ne voterons jamais pour lui. Biram est trop dangereux, il déteste les maures, il cherche à détruire la culture beydane, il a brulé des ouvrages sacrés de l'école malékite. Biram dah abeid n’a aucun respect pour nos savants. Or notre religion nous impose le respect et l’estime vis-à-vis des savants, des Imâm, des Huffâz (qui mémorisent le Coran), des gens du bien (des vertueux) et des personnes âgées. VIVE AZIZ ET VIVE LA NOUVELLE MAURITANIE

  • siam2013 (F) 31/05/2018 13:00 X

    La chanson à laquelle vous faites allusion est du (***) français Gérard Lenorman. C'est en effet un produit de la collaboration horizontale française pendant la dernière guerre...

  • synthetiseur (H) 31/05/2018 10:53 X

    J'aime bien se style d'écriture. Cependant le ramage ne se rapporte pas au plumage. Tout en respectant ce que vous énoncez si brillamment je doute fort que vous ne soyez en avance sur la configuration politico anthropologique de la Mauritanie pour donner de tels conseils à un marginal comme Biram. Si Bill Clinton ou Jesse Jackson ont réussi une percée aux USA, vous devez savoir que leurs qualités intrinsèques et l'appui de leurs environnement social n’ont pas suffi. Il a fallu une décision prise par les grands lobbys militaro industriels judéo chrétiens qui avaient jugé que les dégâts faits par Bush sur l'économie américaine après ses croisades en Irak et en Afghanistan méritaient une pause et donc un changement de cap pour envisager d'autres stratégies moins va-t-en-guerre mais pas moins cinglantes et sanglantes. Sauf que cette fois il fallait un homme qui allait faire faire les guerres par d'autres à la place des américains. Dou la création de DAESH, les tentatives d'affaiblir la Russie, la préférence pour l'Asie....Donc pour dire que Obama faisait l'affaire pour la décennie qui suivait. Par ailleurs il avait été bien vu par les stratèges américains que le temps était venu de flatter la conscience noire dans un pays où le bouillonnement du dépit et de l'indignation black prenait des proportions importantes. Ceci ne signifie nullement que je sous estime la capacité et le poids électoral et politique des noirs aux USA. Mais il a encore ses limites. Pour en venir à la Mauritanie, notre pays est encore et pour quelques décennies sous le joug des forces traditionnelles connues à savoir les oligarchies militaires, religieuses, commerçantes, tribales, ethniques et féodales. Leur emprise est telle que tous les efforts de transporter la Mauritanie vers un pays démocratique, égalitaire, où règne la justice, où les normes et les critères sont de rigueur, où la recherche de l’excellence est une obligation pas un choix, ou la transparence est maitresse ….. est un travail d’Hercule. Biram est dans ce contexte un minoritaire et un marginal. Non seulement il se bat dans un cercle restreint, l’abolitionnisme qui contrairement à ce qu’on pense est un cheval de bataille qui va s’essouffler avec le temps s’il ne s’adapte pas, mais divise énormément la population politique sur la manière plus que sur le fond. Les maures beydanes font bloc contre Biram, les Haratines sont divisés sur la stratégie, et les éthnies négroafricaines regardent en spectateurs attendant d’applaudir le vainqueur de ce combat qui ne les concerne pas. Donc si conseils à donner à Biram il y’a, c’est qu’il change son fusil d’épaule et qu’il associe les beydanes et les négro-africains dans sa lutte o combien juste en adoptant un discours moins radical, plus rassembleur, moins va-t-en-guerre contre les religieux, faisant appel à la fraternité et à la symbiose et non passer ses journées à pourfendre tous azimuts et sans considération. Tant que ces milieux féodaux et commerçants n’auront pas adouci leurs griefs contre Biram ce dernier devra se contenter d’être un ouvrier de la cause abolitionniste et pour longtemps encore. Quant au choix de la confrontation armée il sera fatal pour tout le monde et nous mènera inéluctablement vers le morcèlement d’un pays déjà fragile avec son cortège de morts et d’exilés vers les pays voisins et j’espère que ce n’est pas l’option d’un homme qui veut et prétend pouvoir diriger la Mauritanie. Et au passage je salue la tentative très judicieuse du reste de s’allier au parti SAWAB lors des futures élections, mais là aussi que diront les FLAM et le TPMN à Biram qui visiblement fait un virage très risqué vers les nationalistes arabes baathistes ? Que pourront ils lui apporter en terme de valeur ajoutée électorale si ce n’est la couverture politique et encore…. ? Difficile la politique ! Surtout quand on a des ambitions ……

  • Bilal Muezzin (H) 31/05/2018 10:40 X

    Monsieur BAL votre article est biaisé et très mal conçu en plus du retard vu le temps qui reste aux Candidats pour se représenter. Par ailleurs je crois que vous n’avez pas lu, le contrat que vient de signer avec SAWAB le parti Baathiste qui est à l’origine de tous les mots de ce pays, c’est grave cette alliance contre nature.

  • foutatoro (H) 31/05/2018 09:40 X

    On ne peut pas conseiller mieux Birame. Une plume qui nous sort, dès le matin, de la torpeur de notre pays en lambeaux.