Ely Krombelé - Pour de nombreuses sources concordantes, mais aussi dignes de foi, ce n'est qu'une question de jours, si ce n'est déjà acté. Le général de division Hanené Ould Sidi Ould Hanené quitte l'Etat-Major National où il était jusque là adjoint au divisionnaire Mohamed Ould Ghazwani.

Il serait sur le point de prendre le commandement du G5 Sahel basé à Sévaré, près de Mopti dans le centre du Mali. Le général Hanené remplacera ainsi le général David Dacko du Mali, un baroudeur, qui avec le général targui El Haj Gamou, jouèrent un rôle prépondérant tout au début de la rébellion des Touaregs et Arabes (Maures) du Nord-Mali.(Nous reviendrons sur la double casquette du général Gamou).

Le président Mohamed Ould Abdel Aziz, semble-t-il n'a plus le choix que de s'impliquer davantage dans la lutte contre le terrorisme, cette fois hors de nos frontières, après les avoir sécurisées de l'intérieur des années durant.

Pas de grands feux, car les mauritaniens n'iront pas combattre à la place des maliens. Cependant une mutualisation du renseignement, les échanges tactiques entre les Etats-Majors s'avèrent plus que nécessaires. Car la faille d'où qu'elle vienne peut entraîner des dégâts collatéraux chez l'un ou l'autre des cinq pays alliés. Ainsi la désignation du général Hanené qui révèle deux enseignements côté mauritanien, peut-elle aussi changer la donne même chez les rebelles maliens?

1/ Un officier expérimenté: Le sous-lieutenant Hanené est sorti de l'Académie Royale de Meknès en 1981. Il appartenait à la catégorie d'officiers mauritaniens tels : le général Felix Négri, les colonels Ndiaye Ndiawar, Alioune ould Mohamed, Mohamed Lemine Ould Taleb dit Meine, et enfin le très cultivé Seydina Oumar Ould Elemine ... qu'on disait brillants et surtout destinés à l'instruction militaire. En tout cas même les officiers sortant de Saint-Cyr pourtant moulus dans la prestigieuse École du grand stratège Napoléon Bonaparte, n'ont pas eu ce privilège. Ironie du sort, en dehors de Négri Félix et de Hanené Ould Sidi, aucun de ces officiers n'a cependant pu dépasser le grade de colonel.

C'est donc plus tard que l'officier Hanené Ould Sidi ira se mesurer à l'exercice difficile du commandement des unités opérationnelles, dans les centres d'instruction et puis les régions militaires. Mais le natif de Bassiknou n'a rien du chreigman nerveux qui répond au quart de tour. Intelligent, méticuleux, et très calme, nanti d'une mémoire d'éléphant et surtout adepte du raisonnement inductif (aller du général au particulier) l'homme peut vous résumer le dictionnaire en trois lignes seulement mais ..combien succinctes!!!.

Car il ne s'embarrasse pas de baratins bref, il est concis et très méthodique,...disons ..académique. Le seul couac est qu'il marche encore au diesel, ce qui d'ailleurs serait très adapté pour un travail de bureau quand il prendra fonction au PC du G5 à Sévaré.

2/ Le général Hanené est issu de la chefferie traditionnelle des Oulad Daoud, à proximité des lieux de conflit du septentrion malien. Durant des siècles et pour raffermir leur existence, les Oulad Daoud ont bataillé, ont dû se défendre contre les "Apaches" du Sahara, redoutables guerriers que sont les Touaregs. Seuls les Touaregs sont restés réfractaires aux sirènes de l'Arabité, même s'ils ont embrassé l'Islam de façon timide. Mais un voisinage séculaire a tissé forcément des liens tangibles entre les deux ensembles, souvent émaillés de tensions sporadiques. Ainsi le général Hanené Ould Sidi, fils de chef et frère du redoutable Sidi Ould Hanené, a désormais la même double casquette tout comme le général malien El Haj Gamou.

En effet ce targui loyaliste chef du Gatia (groupe d'auto-défense touareg des Imérades et alliés), issu de la tribu des Imghad est désormais incontournable dans le cadre du processus de paix au Mali.

De même qu'une fois que Hanené Ould Sidi aura pris fonction à Sévaré, les Oulad Daoud de Bassiknou auront les yeux rivés sur la région de Mopti. N'oublions pas que le centre des réfugiés maliens de M'Bera est à une vingtaine de km de Bassiknou. A noter également que des cousins lointains du général, les Berabiches ou Arabes maliens, partie prenante dans ce mic-mac malien, réfléchiront à deux fois avant de provoquer un casus belli. Donc la possibilité d'un dialogue entre belligérants n'est plus à écarter.

Encore une fois le président Aziz a fait le choix du bon officier en faisant d'une pierre deux coups. A savoir donner au G5 sa dimension humaine et stratégique en la personne du général Hanené Ould Sidi, secundo, étaler si possible un cadre géo-politique, voire socio-culturel, en tenant compte de la proximité consanguine de quelques protagonistes du différend malien, avec les tribus de l'Est-mauritanien.

LE TROU A COMBLER

D'autre part le départ inattendu (en tout cas pour l'opinion publique) du général Hanené de l'EMN suscite des remous, voire des supputations. Qui pour le remplacer? Car le rôle d'un CEMA est prépondérant. C'est un fusible qui permet au chef d'Etat-Major en fonction de s'occuper de considérations plus régaliennes. Pendant que le chef d'Etat-major a la tête dans les étoiles, l'adjoint joue balle à terre.

Ainsi le remplaçant du général Hanené sera connu bientôt. On parle du divisionnaire Bourour, ou du général Moktar Ould Bollé, mais pour combien de temps? D'ici la fin de l'année le général Ghazwani va-t-il bouger? Si oui, qui sera le prochain chef ? Etant donné l'importance de l'Etat-Major National, je suis convaincu que le président Aziz a mesuré la délicatesse du problème. On ne le dira jamais assez, l'Armée mauritanienne est le seul rempart à la dérive, aux éventuels soubresauts qui ont secoué certains pouvoirs centraux dans notre sous-région en proie également au terrorisme.

L'implication de la Mauritanie qui est désormais un élément prépondérant de la force du G5 Sahel, (ce qui a nécessité le redéploiement de nos contingents dans l'Est du pays), doit s'accompagner de la mise en place d'une plate-forme de commandement irréprochable et qui aura pour seul credo, l'acte patriotique./.

Ely Ould Krombelé, France