19-09-2018 23:15 - Après la déception, le temps de se remettre en cause

Après la déception, le temps de se remettre en cause

Hammel Barry - Les résultats des élections locales, régionales et nationales en Mauritanie s’avèrent un échec pour les partis de la mouvance négro-mauritanienne. L’absence de voix autorisées à l‘assemblée nationale ou au niveau des conseils régionaux donne droit à deux interprétations possibles : les leaders négro-africains ne représentent pas les Noirs comme ils le prétendent, ou bien la population noire est insignifiante en Mauritanie.

Évidemment, Ces deux assertions sont fausses. Dans les faits, les négro-mauritaniens forment un groupe important, si ce n’est le plus important dans le pays. Mais aussi les différentes formations négro-mauritaniennes ont des programmes qui militent pour le rétablissement de la justice et de l’égalité entre toutes les communautés mauritaniennes, de facto pour l’intérêt de la communauté négro-mauritanienne étant la plus lésée de toutes. Alors, qui en est responsable et quoi faire pour rétablir notre crédibilité ?

Objectivement, la responsabilité est partagée individuellement et collectivement entre les différents acteurs que sont la jeunesse, la diaspora et surtout les leaders de nos partis politiques. En effet, la jeunesse, celle-là même qui semble s’intéresser peu à la politique, privilégie la promotion personnelle sous prétexte que les leaders ne veulent pas s’entendre.

Motivés essentiellement par des ambitions individuelles, et certainement aussi par une certaine suffisance, de jeunes gens démultiplient les candidatures sous le parrainage de partis marginaux. Le faisant, ils encouragent et accentuent, consciemment ou non la division entre les différentes formations politiques.

Au lieu de choisir un des leaders le plus crédible pour le renforcer dans la sécurisation des votes, ils participent de fait au maintien de certains de nos ‘’partis cartables’’ pour favoriser la disqualification du plus crédible parmi les autres. Il apparaît donc que la priorité pour nos jeunes était de se ruer vers les différents partis qui assuraient le meilleur placement sur la liste.

Naïvement, ils croyaient que leur participation régulière aux manifestations ou leur activisme dans les réseaux sociaux leur conférerait assez de visibilité pour garantir leur succès aux élections.

Pendant que notre jeunesse jouait au trouble-fête, la diaspora mauritanienne, elle, brillait dans l’ambiguïté. Elle, qui est supposée être la plus éduquée et avertie de la ‘’chose politique’’, s’est avérée la plus inconséquente entre les deux. J’ai été choqué de cette méconnaissance et/ou de la banalisation des différentes idéologies des partis politiques mauritaniens et leur incapacité dans l’appréciation des perspectives entre les élections locales d’une part et celles des régionales et nationales de l’autre.

Ce flou artistique a donné lieu à des situations surréalistes telles que des campagnes électorales menées par des éléments issus de la mouvance négro-mauritanienne en faveur des ténors des Ex-MND a la députation contre les candidats de leur propre parti. Pour ceux de la diaspora qui possèdent encore un grain de lucidité dans leur esprit, ils réagissent toujours tardivement. Apparemment, nous sommes incapables d’être proactifs, nous ne faisons que réagir à des situations déjà matérialisées.

La diaspora doit savoir qu’avec le développement des réseaux sociaux tout le monde a droit et peut participer aux discussions virtuelles, mais exercer ce droit doit avoir des limites. Avoir un droit à quelque chose ne vaut pas nécessairement son utilisation.

Enfin, la plus grande responsabilité est portée par nos organisations politiques. Pourquoi nos responsables n’ont pas pu prévoir cette probable débâcle électorale et pour la contrecarrer. Franchement, ces résultats étaient prévisibles depuis un certain temps et rien n’a été apparemment fait pour les conjurer.

Ce qui manque, entre autres, à nos dirigeants c’est une bonne stratégie de mobilisation des électeurs et une pédagogie adéquate de communication de leur discours. Comment comprendre que l’AJD/MR soit incapable d’obtenir des candidats compétitifs à Kaédi, ou qu’un PLEJ ne puisse pas trouver des candidats à Maghama et qu’un Arc en Ciel ne peut placer un bon poulain à Selibaby ? L’explication est simple, nos partis politiques ignorent complétement leur base naturelle et se focalise sur Nouakchott.

Depuis les dernières élections, qui peut dire qu’il a aperçu où rencontrer nos leaders ou leurs lieutenants dans nos villes et villages ? Par exemple un Ibrahima Moctar Sarr, ou Mamadou Alassane Ba, Alassane Soma Ba ou même un Samba Thiam a Teccaan, Koudel, Wali et autre localité de la vallée ? La réponse est simple, personne. En plus de ces manquements, nos dirigeants politiques doivent bannir un autre comportement contreproductif.

Celui qui consiste à ignorer des dissidents à chaque fois qu’ils manifestent le désir d’être entendus. L’épisode de l’UFP qui a tout fait pour maintenir en son sein la tendance de Khadiata Malick devrait servir de leçon.

A la différence de beaucoup d’analystes ou de commentateurs, je ne vois pas cet échec comme une cause émanant des citoyens ordinaires de notre communauté. Si certains pensent que les Fuutanke sont achetables, pourquoi alors, ils (surtout ceux de la diaspora) n’ont pas mobilisé des fonds pour acheter leurs voix ? Je pense que le problème est ailleurs et il faut l’affronter avec courage et sincérité.

Aujourd’hui, la stratégie de diversité des partis négro-mauritaniens a montré ses limites et cette thèse ne tient plus. Alors, sans plus tarder toutes nos organisations doivent s’auto-dissoudre pour former un seul grand bloc sous un titre expressif, par exemple : Bloc pour la défense et la promotion des droits et des intérêts des négro-mauritaniens.

Etant donné que les maures ne voteront jamais pour un parti négro-mauritanien, il ne faut plus perdre du temps à vouloir donner à nos organisations des noms démagogiques qui voudraient ressortir l’union entre le maure et le noir. Désormais, il est plus que clair que les intérêts des négros africains sont plus que jamais menacés en Mauritanie. Toute diplomatie ou politique politicienne pour plaire à la composante maure n’est que participation à la disparition politique de notre communauté.

Alors tout complexe d’infériorité ou de crainte d’être taxé de raciste doit disparaître. Cette organisation serait de nature dualiste combinant les formes politiques et celle de la défense des droits civiques de la communauté négro-africaine. Un des rôles de cette nouvelle organisation sera d’exercer des pressions sur les membres de notre communauté élus sur la liste des partis au pouvoir.

L’organisation devra établir un bilan mensuel de chaque élu et l’accompagner de leurs appréciations à l’intention de notre communauté. Ainsi, dans notre action d’évaluation et de contrôle des alliés du pouvoir, nous les obligerons à travailler pour leur communauté ou à être désavoués par elle.

Car le peuple sera capable de les juger régulièrement et il n’y aura plus de mensonge ou de confusion par rapport à leurs activités en tant que représentant de la communauté au sein du pouvoir.

Mamadou Barry dit Hammel

USA.



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Source : Hammel Barry
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Commentaires (6)

  • jamarii (H) 20/09/2018 19:19 X

    Je kiffe le commentaire de Ksaleh...L'union fait la force.La "desertion" ne mene qu'à la disillusion.

  • Ksaleh (H) 20/09/2018 12:55 X

    "....Car le peuple sera capable de les juger régulièrement...." Quelle peuple ??? Il faut arrêter les analyses communautaires par rapport aux partis de l'extremisme. Les négro africains ont bien gagné et avec brio par les canaux des autres partis du consensus tels que l'UDP.., l'échec cuisant émane de ceux réduits à une seule communauté crées dans le cadre des réactions aux troubles des années 80 et 90. Maintenant si ces partis qui ne représentent plus personne en Mauritanie, mais sont la caisse de résonance d'une Diaspora installée dans l'aisance de l'immigration, qu'on ne vienne pas nous vendre des analyses bidons ! Le combat se passe en Mauritanie entre des forces conscientes des antagonismes sur le terrain, il faut analyser la réalité sous ce prisme et avancer, sinon le reste n'est que verbiage.....

  • pyranha (H) 20/09/2018 12:07 X

    Cette analyse recoupée et ses arguments juxtaposés donnent une idée claire en effet de la débâcle enregistrée par ces partis. je souscris également sur la pertinence des idées d’observateur que vous êtes . Mr Barry vous avez parfaitement raison de souligner que ce résultat négatif ne s’explique ni parce que numériquement la communauté noire est faible dans ce pays et encore moins parce que les leaders negros africains ne représentent pas les noirs .En réalité le problème est beaucoup plus grave et incisif que cela. Vouloir également prendre ces partis un à un pour les amener à subir une “consultation médicale » aurait réservé des surprises alarmantes dans le diagnostic final .Reprenons simplement Mr Barry votre exemple assez expressif (sur l’UFP) et qui donne une belle illustration des problèmes communs à tous ces partis : “ Celui qui consiste à ignorer des dissidents à chaque fois qu’ils manifestent le désir d’être entendus. L’épisode de l’UFP qui a tout fait pour maintenir en son sein la tendance de Khadiata Malick devrait servir de leçon » Mr Barry comment comprendre qu’un Biram Dah Abeid en prison bien avant même le début de campagne puisse confortablement remporter victoire au 1er tour, lui et sa vice présidente Coumba Daddah Kane et une autre dame supposée même avoir été au service de maitre esclavagiste il n’y a pas si longtemps et que Biram aurait libérée ? Alors que dans le même temps Aziz, président du ciel et de la terre, « propriétaire » de tous les citoyens Mauritaniens et de leurs biens y compris les Imans , était sur le terrain . Tous les leaders noirs en coalition ou non sans repos battaient campagne ignorant même sans égard qu’un des leurs croupissait en prison mais qui en fin de compte sont rentrés bredouilles. Il suffit donc que ces leaders puissent bien méditer sur ce cas unique et de procéder à une autocritique sévère pour comprendre la ou les raisons de ces résultats inattendus .

  • sammbasy (H) 20/09/2018 10:45 X

    @Mamadou Barry, vous faites certainement la même erreur d'analyse que les prétendus "dirigeants négro-africains". D'abord, il faut souligner que cet échec n'est pas l'apanage des partis d'obédience négro-africaine seulement : ils sont plus de 70 les partis qui ont récoltés des résultats faibles à ces élections, dont une bonne partie appartenant à la mouvance "nationaliste arabe" ou même franchement extrémistes arabe. Il y a aussi l’émiettement de leur électorat naturel dû aux candidatures multiples. La deuxième chose importante est le fait que certains partis d'obédience négro-africaine suivent une ligne politique difficile à lire pour les populations qu'ils sont sensées défendre : Arc-en-ciel par exemple, tantôt à l'opposition, tantôt fignole avec le pouvoir ; AJD/MR qui veut rester à égale distance entre la majorité et l'opposition en les mettant presque ‘dans le même sac’ (des gens qui ne lutteraient pas contre le "système' etc) ; au point qu’ils sont assimilés à des gens cherchant leur propre intérêt... Ces élections prouveraient en fait que les mauritaniens désapprouvent tous les mouvements à tendance particulariste (noirs ou maures).

  • abma (H) 20/09/2018 05:02 X

    Vos deux paragraphes ci-dessous prouvent également que vous même vous n'avez rien compris de la situation politique de ce pays. Venez passer quelques mois au pays cela vous aidera de votre analyse. Les leaders négros africain ont besoin d'une autr analyse qui n'est pas celle-là. Ce flou artistique a donné lieu à des situations surréalistes telles que des campagnes électorales menées par des éléments issus de la mouvance négro-mauritanienne en faveur des ténors des Ex-MND a la députation contre les candidats de leur propre parti. Pour ceux de la diaspora qui possèdent encore un grain de lucidité dans leur esprit, ils réagissent toujours tardivement. Apparemment, nous sommes incapables d’être proactifs, nous ne faisons que réagir à des situations déjà matérialisées. Celui qui consiste à ignorer des dissidents à chaque fois qu’ils manifestent le désir d’être entendus. L’épisode de l’UFP qui a tout fait pour maintenir en son sein la tendance de Khadiata Malick devrait servir de leçon.

  • aminatat (H) 20/09/2018 00:52 X

    L'extrémisme d'où qu'il vienne constitue un fléau pour l'unité de la nation