31-07-2019 16:33 - Le Prophète, le savant et le forgeron/Par Cheikh Touré

Le Prophète, le savant et le forgeron/Par Cheikh Touré

Le Calame - Dans son ultime kermesse cathodique, le président-général putschiste tombe les voiles de son régime passé, présent voire futur. Au sujet d'un innocent repenti arbitrairement incarcéré, le tyran exulte : «la justice ne lui reproche rien. Nous le gardons en prison au nom de quatre millions de mauritaniens...».

«La tête du forgeron».

Sans être l'aveu le plus fichu du putschiste commandeur des croyants, cette confession médiatique brise le silence universel sur le sort de la victime. À la botte de tout puissant depuis la genèse de leur caste, les oulémas bénirent la gaffe providentielle en l'assortissant d'un repentir audiovisuel de l'innocent sur la chaîne nationale où défilent les autres otages de la justice militaire depuis le courant putsch électoral.

Pour rappel, ce condamné à la liberté carcérale fut la victime idéale d'un contexte hérétique qui embrasait les sphères judiciaires. Alors, les castes suprémacistes se liguèrent pour «écraser l'infâme» forgeron qui en fédère les phobies anthropologiques : «bon à rien le forgeron fut-il savant».

La chasse à l'apostat déchaina les foules vengeresses qui exigèrent le sacrifice expiatoire en défense du saint prophète. Des justiciers sauvages s'arrogèrent l'héritage sacré pour se farcir l'emblématique menu grégaire: «la tête du forgeron»..!

Prophète de grand chemin

Pourtant la libération de l'innocent repenti n'était plus impensable si une énième fatwa d'autorité incontrôlée n'avait pas été improvisée pour tuer le consensus: «le blasphème du prophète est plus grave que le génocide de dizaines, centaines et milliers de musulmans».

Diffusée sous la forme impersonnelle d'un échange téléphonique, la fatwa criminelle ne craint pas de surenchère pour sourcer son verdict assassin: «le code malékite stipule la mort du repenti pour lui éviter l'enfer du jugement dernier».

En république islamique, le repentir aggrave la sentence. Dieu ajourne la créature et le verdict, le mufti sacrifie son forgeron. À l'appui de ce code sauvage où le blasphème surclasse le génocide, le procureur de dieu croise les anecdotes troubles de la geste prophétique et les versets coraniques inhabilement illustrés (XXXIII-57, XXX-6, XLVIII-8) pour commuer la malédiction divine en peine capitale.

Infaillibilité papale obligeant, la jurisprudence assimile le pauvre blasphémateur repenti aux primes et pires ennemis de l'islam et son prophète. Ironie de cette logique quasi-préislamique, ces salafistes-là abusaient des mêmes arguments calomnieux que le docte héraut du prophète. Portrait idéal pour une internationale islamophobe : « assassin de grand chemin, commanditaire de meurtres froids, individuels et collectifs...».

«Livres-mères»

En effet, le savant des savants impute le supplice d'écartèlement meurtrier de la vieille prisonnière fazarite (Oum Qirfata) au prophète qui interdit fermement la mise en scène du vivant (Temthil). Alors que les «livres-mères» (Oumehat el-koutoub) l'attribuent au poète Qaïs ibn Mouhsir lors d'une expédition punitive contre sa tribu qui avait dépouillé une caravane du prophète sous le commandement de son fils adoptif.

Comme la mort guerrière du cousin et prisonnier qoraïchite (Nadr ibn Harith) qui fut immortalisée par le poème de sa soeur : «les enfants de son aïeul ne cessèrent de lui asséner leurs épées / Ainsi bien des liens de dieu en furent découpés». Pourtant le mufti le déclame si bien qui soustrait son canon pénal aux larmes de repentir poétique dont le prophète bénit les vers de Qutayla : «Ô Mohamed de si noble lignée/ Seigneur bien aligné /Ta bonté n'aurait pas indigné / Ô combien irrité, le noble peut épargner...».

Qui est plus blasphémateur..?

Quant au traître assassinat du poète juif -Kaab ibn El-Achraf-, l'ayatollah du forgeron en connait l'auteur dont il cite la récidive devant le premier calife omeyyade. Dans un contexte explosif où d'autres voix téméraires incitent à la haine noire du peul et de l'esclave, nul meilleur témoin que cet empereur qoraïchite pour attester que le miséricordieux prophète amnistiait ses pires détracteurs dont les plus illustres assumèrent les plus hautes charges de l'empire islamique: «dégagez, vous êtes libres!».

Que dire de sa clémence pour le blasphème quotidien de ses compagnons hypocrites? Et son secrétaire cumulard, traître apostat et blasphémateur qui devint gouverneur d'Egypte..? «Modeste proposition pour les mauritaniens» -Swift- :«libérez le fils des gens» -Khalou 3ankoum wel enass-...Qui est plus blasphémateur: le général-putschiste-commandeur des croyants, le fougueux savant des savants ou l'innocent forgeron repenti ?

-Lien de la fatwa sonore de Cheikh Dedew: https://soundcloud.com/tiguend/umvsqilbjlmz



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Commentaires (2)

  • YayaKoudiyel (H) 01/08/2019 13:05 X

    Excellent texte, comme d'habitude! Je suis content de mon protégé, l'homme d'Adrar a la prose scintillante et aux qualities humaines extraordinaires. Mais, Cheikh ( Maa khaleytne chi!), n'oublie pas que nous sommes les marabouts! We. issak lat dakhalna naar avec ton exegese par trop parfait. Salutations fraternelles de ton grand, depuis les US.

  • mystere1 (F) 01/08/2019 12:34 X

    J’aime bien cet article (Le Prophète, le savant et le forgeron), un thème intéressant à lire, en ce qui concerne de notre bien aimé Prophète Aleyhi Afdallou Sallatou Wa Salam, c’est un trait ou ligne rouge à ne pas franchir, car c’est le diamant de parmi toute les créatures, en particulier du fils d’Adam, donc blasphémer ou dire des négativités sur lui, a comme conséquence de règle ordonné par Le Très Haut Divin, malheureusement les règles ou charia de l’Islam ne sont pas appliquées dans presque plusieurs musulmans, je ne parle pas des pays multi religieux ou laïques, c’est très compliqué, et justement le fait qu’on a pas appliqué ces Règles Divins, qui font que nous musulmans en particuliers sont tout le temps dans la tourmente quotidienne de nos vie par ses méfaits venant de la négativités des mauvaises actions de certains, et parlant « du savant », malheureusement le savant ou guide religieux, étant l’acteur religieux qui est sensé de sensibiliser, nous rappeler, et nous aider à se rapprocher du Seigneur afin que l’on puisse regarder vers le chemin droit, lui, est l’un des 1er responsable si une société dévie, hélas beaucoup de nos guides sont corrompus, ainsi qui est qui ? et enfin le forgeron ! là on parle d’une personne de sont statut social, surtout si cet individu est issu de classe castée, mais on fait référence d’un cas qui est celui du célèbre malheureux bloggeur dont il est supposé être condamné mort, car parait-il qu’il a abominablement blasphémé contre l’Elu de Dieu (SWL) et dit des conneries sur ses vertueux compagnons dont Dieu Est Satisfait d’eux, dans les normes, ce type devrait être condamné afin que personne d’autre qui voudrait blasphémer n’osera pas le faire, mais puisque notre pays n’est pas normale, et que la charia n’est pas appliquée, alors vaut mieux laisser les choses ainsi avant que d’autres soucis ne soient engendré par ce cas, vu que l’état social du pays reste paisible mais au fond des cœurs qui ne sont pas en odeur de sainteté, qu’Allah nous Guide et nous Protège.