23-10-2019 23:15 - Société civile : Entre légitimité de rôle, méfiance à l’égard des bailleurs et négligence de l’Etat

Société civile : Entre légitimité de rôle, méfiance à l’égard des bailleurs et négligence de l’Etat

Maître Mohamed Vadel Elhady - La population mauritanienne est confrontée à des problématiques diverses dont essentiellement la pauvreté, la sècheresse, les crises sociales et l’insuffisance des ressources alimentaires.

Ces problématiques ont poussé l’Etat mauritanien à ouvrir la porte à des partenaires et bailleurs pour assister les populations et mettre en œuvre des programmes, dont l’objectif principal est d’éradiquer ces phénomènes entravant la vie des populations et handicapant le développement durable du pays.

Certes, ces partenaires ont la volonté d’améliorer la situation de notre pays et d’aider l’Etat à améliorer les conditions de vie des populations, mais le problème reste et demeure l’exécution des programmes et la politique de leurs mises en œuvre, qui, suscite manifestement le débat au sein de la société civile.

Les procédures de mise en place et d’exécution des programmes ne permettent pas à la société civile d’y jouer son rôle, cette dernière étant un acteur incontournable et proche de la population, réputé pour sa proximité avec la population, seul acteur capable d’assurer d’aider efficacement à l’atteinte des objectifs visés par l’Etat et son gouvernement d’une part, et les partenaires d’une autre.

Les coopérations des pays européens envisagent l’exécution de leurs programmes à travers des OSC occidentales, à un coût exorbitant, sous prétexte d’une incompétence avérée des OSC locales, ou de divergence entre différents mouvements regroupant ces OSC.

Ce qui veut dire qu’au lieu d’allouer ces sommes importantes à la formation et la promotion de la société civile sur place, les organismes européens préfèrent dépenser cet argent en faveur de leurs OSC qui d’une part, n’ont pas l’expérience requise pour comprendre le contexte local, et d’autre part ne peuvent élargir leur champ d’application en terme de compétence ni en terme de zone géographique, se limitant souvent à Nouakchott comme seul zone d’intervention.

En réalité, la situation des populations de Nouakchott est plus favorable que celle des citoyens vivant par exemple à Néma ou à Zouerate, ce qui explique clairement l’échec constaté par les différents observateurs nationaux et internationaux en termes d’exécution des missions attribuées par les partenaires en l’occurrence européens aux OSC étrangères.

Le constat ayant été évoqué maintes fois par les acteurs et activistes de la société civile prouve un réel dysfonctionnement et soulève un handicap sérieux face à l’atteinte des objectifs visés par les programmes aussi bien de l’Union Européenne que des pays tels que la France, l’Allemagne, la Belgique et l’Espagne qui ont des structures de coopération installées en Mauritanie.

Les différentes occasions de discussion autour du sujet (collaboration entre OSC locaux et OSC internationaux) ainsi que les plates-formes de débat mis en place par les partenaires ont prouvé une divergence quasi-permanente entre les partenaires et leurs interlocuteurs de la société civile.

S’ajoutent à cela le fait que les différents rapports de missions à l’étrangers et les comptes rendu de réunion, tables rondes, conférences et journées, laissent transparaitre un sérieux mécontentement de la société civile vis-à-vis des partenaires, surtout lié au constat de la faiblesse du rôle de l’état mauritanien, qui est pourtant le principal bénéficiaire de la bonne exécution des programmes et la rationalisation des fonds alloués aux programmes visant les populations du pays.

Les organisations internationales, les coopérations pays, ainsi que les ONGI ne jouent pas efficacement leur rôle, non par intention mais par la carence se manifestant par le nombre limité de zone d’intervention et par la limite des moyens alloués, eut égard au coût exorbitant des consultants internationaux dédiés à l’exécution des programmes au niveau du pays.

Il est vrai que l’Etat mauritanien est conscient de cette réalité, mais force est de constater qu’il ne réagit pas, pour multiples raisons, dont essentiellement cette entrave créée par le manque d’une législation solide assurant le bon fonctionnement de la société civile, et l’absence d’un répertoire national des OSC actives et pérennes pouvant faciliter la sélection en fonction de domaine d’intervention et de niveau d’expérience.

Il est également vrai que la manière dont les partenaires traitent la Mauritanie est différente de celle avec laquelle ils traitent ses voisins, notamment le Sénégal et le Mali, ce qui ne permet plus d’accepter un tel état de choses inappropriées vis-à-vis d’un pays qui avance sur tous les plans, notamment dans le domaine de la société civile.

Malgré tout cela, il reste une partie importante de la société civile qui réclame à ce jour justice face à ce regard décevant des partenaires et à la négligence manifeste de l’Etat mauritanien se traduisant par une sous-estimation du rôle et de la contribution de la société civile.

Il faut aussi dire qu’avec l’arrivée d’un nouveau régime et l’installation du gouvernement, et surtout la présence de ce nouveau haut responsable en charge d’assurer la relation entre l’Etat et la Société civile , en l’occurrence le Commissaire aux Droits de l’homme, à l’action humanitaire et aux relations avec la société civile, la plupart des activistes de la société civile reste optimiste.

Les partenaires quant à eux, ne cessent de dénoncer ces accusations et tenter de faire preuve de collaboration malgré le défi à relever face à cette immense vague d’indignation provoquée par les agissements des partenaires au développement. Les chiffres démontrent que ces partenaires allouent une grande partie de leurs dotations budgétaires à ces prestations fournies par les consultants internationaux, sans un impact visible sur la vie des citoyens.

Pour terminer, je m’adresse à son Excellence Monsieur le Président de la République Mohamed Mohamed Ahmed El Ghazwani pour attirer son attention sur cette situation afin d’entreprendre les dispositions garantissant aux populations de tirer plein profit de l’aide qui leur est adressée par les partenaires aux développements et les coopérations des pays frères et amis de par le monde.

Je l’invite aussi à orienter la politique du gouvernement vers une collaboration constructive avec la société civile en lui permettant de pleinement jouer son rôle, pour l’intérêt aussi bien de l’Etat que des populations du pays.

Des dispositions sans lesquelles le pays devra attendre pour connaitre le développement durable.

Maître Mohamed Vadel Elhady

Expert Judiciaire et activiste de la société civile





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