Abdoulaye Djimme Diaw - Le retour de l'ancien Président Ould Abdel Aziz avait, en Mauritanie, suscité inquiétude et controverse au sein de l'UPR.

Ceux qui sont encore ses supporters avaient repris du poil de la bête et dans un excès de zèle, avaient remis au goût du jour la possibilité du partage du pouvoir entre l'ancien et le nouveau président.

Dans les réunions de préparation du congrès à venir, cette perspective avait été battue en brèche et rangée dans les oubliettes.

Depuis mercredi soir, dans une réunion du parti, Aziz s'est remis en selle, revendiquant la paternité de l'upr et les acquis de la dernière décennie, ce qui lui autorise à jouer un rôle de premier plan dans la vie politique nationale.

Le décor de la turbulence est ainsi planté. Plusieurs questions restent néanmoins posées.

L'ancien président dispose-t-il de toutes ses facultés, notamment politiques, d'une vue assez globale de la situation politique actuelle, du paysage politique et d'une capacité de jugement politique, suffisante pour tenter une telle aventure ? En a-t-il mesuré les risques pour la stabilité du pays et les dangers de confrontation entre citoyens?

Cette initiative d'Aziz était-elle partagée avec son ami et frère, le Président Ghazouani avant d'être rendue publique ? Si oui, quelle est la position du Président Ghazouani à cet égard ?

Le peuple mauritanien, en trois mois, a pu fonder des espoirs sur la gouvernance de Ghazouani, après avoir expérimenté Aziz une décennie durant. Ce peuple qui vient de donner mandat à GHAZOUANI serait-il prêt à revenir sur son choix ?

Les partis politiques, de la majorité comme de l'opposition, mais surtout de l'opposition, qui ont rencontré Ghazouani et en ont tiré une bonne impression seraient- ils prêts à voir, au pouvoir, celui qui les a toujours considérés comme moins que rien, au point de ne les avoir jamais rencontrés ?

La classe politique et l'opinion nationale et internationale (ce dernier discours de Dakar en constitue l'illustration) seraient-ils disposées à accueillir au pouvoir celui qui l'avait quitté il y a trois mois avec plus ou moins d'honneur, sorti par la porte, de revenir insidieusement par la petite fenêtre ?

La hiérarchie militaire, garante de la paix, de la sécurité et de la stabilité politique et sociale du pays, qui avait accompagné Ghazouani au pouvoir, est - elle disposée à voir Aziz revenir au pouvoir aujourd'hui et cette manière ?

Le Président Ghazouani, élu par le peuple et régulièrement investi, accepterait-il d'être un figurant pendant que la réalité du pouvoir sera exercé par Aziz?

La tribu de Ghazouani et sa famille accepteraient-elles de se faire virer du pouvoir pour donner la prééminence à la famille de Abdel Aziz?

Autant de questions qui nourrissent des inquiétudes légitimes de tous ceux qui ont un sentiment positif pour la Mauritanie.

Si la volonté d'Aziz devait prendre forme, tous les patriotes de ce pays seront interpellés pour s'opposer à une telle mascarade.

Mais le Général Ghazouani sera le général de cette mobilisation des patriotes car il y va de son honneur d'officier, de sa crédibilité d'homme politique et de sa dignité en tant qu'homme.

L'heure de la vigilance a sonné car l'instabilité pointe à l'horizon.

Dr Abdoulaye Djimme Diaw