26-11-2019 13:51 - Ghazouani/Aziz : Fin de l’entente fraternelle ?

Ghazouani/Aziz : Fin de l’entente fraternelle ?

RMI Biladi - Moins d’une semaine après son retour au pays, Mohamed Ould Abdel Aziz a tenté un véritable coup de force pour se remettre en selle. La réaction ‘’forte’’ du pouvoir ne s’est pas fait attendre. Retour sur une crise qui semble avoir tourné en faveur du président en exercice.

Revenu, samedi 16 novembre, de son exil doré de plus de trois mois, l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz donnait la fausse impression de vouloir passer sans attirer l’attention du public. Il a publié dans les colonnes de l’un des sites d’information en ligne son désir de ne pas être accueilli en grandes pompes.

Un effacement qui ne correspond pas à la personnalité de cet homme qui est monté brusquement sur la scène à la faveur du putsch manqué du 08 juin 2003 et qui n’y est jamais sortie. S’il désirait réellement passer inaperçu, il n’aurait tout simplement pas communiqué sur son retour qui pouvait se passer dans la plus grande discrétion.

La suite des événements a bien confirmé le fait qu’il cherchait plutôt à diffuser la nouvelle de ce retour au pays.

En effet, moins d’une semaine après son arrivée, Ould Abdel Aziz, qui n’a cessé de recevoir tous ceux qui lui sont restés fidèles parmi son équipe gouvernementale et ses amis politiques (l’ancien PM Ould Hademine, les ministres Dinda Bâ, Amedy Camara, Ould Abdel Fettah… Boidjel Ould Homeyd et bien d’autres soutiens et parents) semble être revenu avec l’idée en tête de réinvestir le pouvoir et la scène politique à travers le contrôle de l’instrument politique, sa ‘’propriété’’, l’UPR.

Apparemment Aziz, auquel rien n’a résisté pendant la décennie écoulée, n’a pas daigné avertir son successeur de son projet et est allé directement dérouler son plan qui a commencé par la convocation, mercredi soir (20 novembre), d’une réunion du comité provisoire chargé de gérer le parti à laquelle il avait décidé de participer lui même.

Ou plus exactement de la présider, tant les membres de la fameuse commission semblaient toujours répondre à ses injonctions. Personne parmi eux n’a posé la question évidente du statut qui permettait à l’ancien président de convoquer une telle réunion qui sonne comme un retour en force de l’ex.

A la suite de celle-ci, un communiqué est rendu public, tard dans la nuit de mercredi à jeudi. Il définit la référence ‘’idéologique’’ du parti incarnée par son président fondateur Mohamed Ould Abdel Aziz. Quant à Ghazouani, le communiqué comité directeur de l’UPR se suffit de dire qu’il soutenait son programme qui s’inscrit dans la poursuite des ‘’réalisations grandioses de la décennie bénie’’.

Panique dans une grande partie de l’opinion ! Aziz qui a quitté le pouvoir par la grande porte cherche à revenir par la fenêtre, écrit un écrivain député qui, à travers les lignes, soutient le programme et la manière de faire de Ghazouani.

Moins nuancé et carrément rangé du côté du président en exercice, l’ancien député Khalil Ould Teyib, porte drapeau de la ligne qui réclame la prépondérance de Ghazouani comme unique référence de l’UPR, déclare, la même nuit, que "La réunion du Comité directeur du Parti de l’Union Pour la République (UPR), présidée mercredi soir par l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz, constitue une source de nuisance au microcosme politique national prévalant".

Il ajoute que « les résultats de cette réunion conduiront à un état de tension politique que notre pays ne peut supporter, dans un climat interne, régional et international instable et prêt à exploser à tout moment ».

Prévisible, la guerre tant redoutée ou même souhaitée –c’est selon où l’on se positionne- entre les amis de quarante ans est lancée. Après un peu d’hésitation ou plutôt de retenue, le pouvoir s’est résolu à contre-attaquer. Une réunion de haut niveau, largement médiatisée, se tient à la présidence.

Y ont participé à côté de Ghazouani, le PM, le ministre de l’Intérieur, le ministre du Pétrole, le directeur du cabinet du président, le 1er vice président de l’Assemblée nationale et le président du groupe parlementaire de l’UPR.

Même si on a beaucoup axé sur les relations ‘’au dessus de toutes les considérations’’ entre Ghazouani et Aziz, il a été noté que la référence de l’UPR est Ghazouani et son programme, mes engagements, constitue un objectif stratégique pour le parti.

La réaction du pouvoir ne s’est pas arrêtée là. Plus de quatre vingt députés de l’UPR se réunissent, jeudi 21 novembre, le lendemain de la réunion de l’ancien président, et rejettent son retour sur la scène politique.

Dans Leur déclaration, ils saluent ‘’l'alternance démocratique réalisée pour la première fois dans l'histoire du pays entre deux présidents élus; et expriment leur attachement très fort à l'UPR comme principal soutien du président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani qui représente la référence exclusive du parti qui doit s'ouvrir à toutes les forces politiques l'ayant soutenu et celles qui voudraient adhérer à la perspective de la mise en œuvre de son programme’’.

Aziz et son camp restèrent muets après la contre-attaque très forte du pouvoir et plus ou moins inattendue de leur part. L’ancien président est allé passer le weekend dans son ranche dans l’Inchiri. A-t-il compris que son coup –de force ou de bluff- a foiré ? Ou va-t-il continuer à se battre ? Avec quelles armes ?

Aucune information, même si ses soutiens, certes pas très nombreux, continuent de se réunir et rêvent de voir leur champion gagner la partie. Une perspective difficile à envisager, tant il est clair que les munitions (armée, parti-Etat, notables, hommes d’affaires…) nécessaires à son entreprise lui échappent cette fois-ci. Alors que lui restera-t-il ? ‘’A se ranger’’, dixit un observateur de la scène.

Cela est d’autant plus probable que l’acte II de la réaction du pouvoir concernerait la reprise de l’UPR et le changement des hommes qui le dirigent et qui paraissent encore obéissants à celui qui les a placés là où ils sont. Ils n’ont pas pu savoir où se situait la réalité du pouvoir. Comme d’ailleurs une grande partie de l’opinion.

De toutes les façons, cette crise, si elle allait se terminer en faveur de Ghazouani comme l’indiquent tous les indices, aura bien servi ce dernier en raffermissant son autorité aux yeux de l’opinion publique et en le séparant, sans grands efforts, d’un ami qui devenait, pour le moins, encombrant.



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Commentaires (5)

  • synthetiseur (H) 26/11/2019 17:49 X

    Ce qui vient de se passer montre combien il est important que dans un pays il y ait des institutions républicaines fortes dirigées par des hommes indépendants et intègres capables de dire et de faire la loi loin de toutes influences et faiblesses. Les incartades des despotes non éclairés et des apprentis dictateurs n'auraient en ce moment plus de place. Mais pour cela il faut aussi un haut degré de patriotisme et de conscience des acteurs politiques, des élus et de l'élite, des magistrats, de la société civile en général. Pour l'instant la Mauritanie est à la merci de ploutocrates, de féodaux, de flagorneurs de toutes sortes que la hiérarchie militaire au pouvoir depuis 1978 et malgré le paravent de gouvernements civils manipule à volonté et à dessein. Si le nouveau président mauritanien s'engage dans la voie de perpétuer ce système il ira lui aussi à sa perte comme son ami et frère d'arme Aziz. S'il transcende les flatteries, l'encensement et l'enivrement du pouvoir, l'enrichissement facile et illicite, s'il privilégie les intérêts de son pays, de son peuple et des futures générations, il se considérera comme l'homme d'une transition vers une réelle alternance démocratique et prendra les mesures indispensables à cet effet. La Mauritanie est à un tournant.

  • cccom (H) 26/11/2019 15:57 X

    S'il m'a été donné de conseiller à Aziz de rentrer honoré et immunisé dans ses droits d'ancien Président de la Mauritanie à son Ranch de l'Inchiri, je prie le Président Ghazouany de rattraper le temps perdu depuis l'indépendance octroyée conditionnée par le pillage de nos ressources minières par le systéme d'Education modulaire Cerveaux Oasis intensif et gratuit de Maaden. Systéme le plus performant du monde et moins cher, généralisé à toutes les Régions par les Conseils Régionaux et APE, réducteur des coûts et cursus de 3/4 garant à la fois sans besoin de récruter un seul professeur de tripler les salaires mensuels des enseignants ( A 200.000 UM/mois) pris en pension totale par les APE du bac trilingue à 15 ans, diplômes d'ingénieurs et Chercheurs scientifiques en bas âges et autres effets induits porteurs d'emplois et autosuffisances alimentaires ainsi que d'une Economie du Budget de 50 milliards UM/an pouvant aller à 100 milliards UM/an en cas d'application du Programme annoncé du Premier Ministre. cheikhany_ouldsidina@yahoo.fr .

  • Mohamedene (H) 26/11/2019 15:50 X

    L'amitié est une chose le deal et avec un accord c'est autre chose. Ce qui suinte de la conduite de Ould Abdel Aziz dans cette affaire, c'est son assurance de quelqu'un qui vient demander un du, ou mettre à exécution sa partition dans un accord préalablement établi. C'est exactement un comportement à la Poutine avec en moins le poste de 1er ministre. Ould Cheikh Ghazouani doit se frotter les mains, non pas qu'il ait gagné la bataille, mais la nature du scénario foiré de Ould Abdel Aziz qui lui a permis de mettre à jour l'arrogance de ce dernier et son ambition puérile d'être devant la scène. Le président Ould Cheikh Ghazouani et ses communicants, n'ont pas besoins de mot pour expliquer cet échec de l'ex président.

  • mystere1 (F) 26/11/2019 15:20 X

    C'est vraie que la politique n'a pas d'amis, mais au fond, ça n'a pas de sens qu'une amitié depuis l'adolescence se déchire comme cela soudainement, la presse dès fois exagère et va donner l'occasion au peuple de commérer, surtout les mauvaises langues, ne soyons pas naîfs, c'est de la poudre aux yeux, avec le tempéramment posé de ghazwani, je ne crois pas qu'il soit destabilisé par son ami frère, cependant ils peuvent avoir des divergences de points de vu politiquement, cela n'empêche pas cette amitié de se gâcher, c'est de la comédie, n'oublions pas que c'est la politique, alors qu'en hors politique, ils sont toujours des bests friends, maintenant reste à voir l'arrivé de notre ex-président ce qu'il fera ! wait and see !

  • duroowo (H) 26/11/2019 14:18 X

    si il veut se debarasser d'AZIZ il n'a qu'ouvrir une investigation sur l'argent mal aqui il a tout l'argent de la Mauritanie et il vend ses biens pour ramener ca a la caisse de l'Etat simple et il le jete en prison.