04-01-2020 01:00 - Le PRCM : Une formation qui fait d’une pierre deux coups

Le PRCM : Une formation qui fait d’une pierre deux coups

Dr Sidi El Moctar Taleb Hamme - Le PRCM ou Partenariat Régional pour la Conservation de la zone Côtière et Marine est « une coalition d’acteurs travaillant sur les problématiques du littoral ouest africain et couvrant sept pays de la Mauritanie à la Siéra Léone ». Il est donc défenseur de l’environnement au sens large au niveau de cet espace et est également le catalyseur de toute action en faveur de sa conservation.

Dans le cadre de ses missions, ce PRCM vient d’organiser, du 24 au 28 du mois courant, une session de formation sous le thème ‘’Gestion environnementale des activités du pétrole et des gaz en offshore’’. Celle-ci est principalement adressée aux acteurs les plus concernés par ce genre de questions dans l’Administration publique (y compris dans l’enseignement supérieur et la recherche) et dans la société civile.

Ces acteurs savent déjà qu’avec l’expérience du puits Chinghitti (2006-2017), la Mauritanie a tapé à la porte du club des pays africains producteurs de pétrole offshore.

Pour eux, la découverte d’un champ de gaz naturel offshore, considéré le plus important en Afrique de l'Ouest, notre pays confirme sa place dans ce club et multiplie ses chances pour devenir parmi les grands acteurs au niveau continental. Il s’agit du "Grand Tortue - Ahmeyim" (GTA), situé au niveau des frontières maritimes du pays avec le Sénégal et dont la première production est prévue vers 2021-2022.

Mais, d’aucun n’ignorent les défis qui entourent cette ambition sachant que les activités du pétrole et de gaz ont toujours été un enjeu de taille pour tous les pays du monde où se déroulent des travaux d’exploration et d’exploitation de leurs gisements.

Pour notre pays –et pour aussi les pays ciblés par le PRCM- cet enjeu est particulièrement grand à cause de l’importance quantitative et qualitative des ressources halieutiques de notre ZEE et du rôle économique et social qu’elles jouent.

Ce sont là des facteurs qui avaient sûrement été mis sur la balance par les décideurs lors de la délivrance des autorisations de recherche. Ces facteurs ont aussi préoccupé les parties prenantes dans la phase de l’exploration et continueront à préoccuper tout le monde durant la phase de l’exploitation proprement dite et même au-delà de celle-ci.

L’évolution des découvertes du pétrole et du gaz dans la zone ouest-africaine et les enjeux liés à leur gestion, auraient peut être motivé le PRCM quant à programmer, pour la Mauritanie et les autres pays inclus dans son champ d’action, .la session de formation, objet du présent écrit.

Il serait opportun de souligner que cette formation de renforcement de capacités, qui a débuté en Mauritanie, a été une réussite eu égard la nature des thématiques des modules dispensés, la richesse des contenus et la qualité des conférenciers.

En effet, tout participant interrogé aurait reconnu avoir acquis les connaissances les plus pertinentes sur les écosystèmes marins et côtiers et les multiples services qu’ils rendent ainsi que sur tout ce qui a trait au pétrole et au gaz.

En ce qui concerne particulièrement le pétrole, il s’est agi de son histoire. C'est-à-dire de ses premiers usages dans l’antiquité et des évolutions subies à partir de 1959 et ayant abouti à la place stratégique occupée aujourd’hui par ce produit minier dans les relations internationales et les rapports de force dans le monde ; les impacts environnementaux de l’industrie de pétrole étant, dans ce contexte, l’un des principaux enjeux connexes des activités de cette industrie.

A une autre échelle de détails, cette session de formation, à permis la maîtrise des vocables, des termes et des concepts génériquement utilisés dans les domaines du gaz, du pétrole, de la pêche, du transport maritimes et du droit de la mer.

Elle a aussi été l’occasion de découvrir la carte géologique de la Mauritanie et les potentialités des Bassins de Taoudenni et de Tindouf et puis de la zone offshore, en particulier; le décryptage des informations fournies ne peut qu’aiguiser l’appétit des compagnies pétrolières et gazières transfrontalières et leurs traditionnels complices au niveau national, créer de l’espoir chez les classes les plus déshéritées et donner des frissons aux défenseurs de l’environnement.

Sur le plan institutionnel et réglementaire, les participants ont également pris connaissance des cadres de régulation et de gestion des industries extractives par rapport aux progrès réalisés ailleurs.

Plus explicitement, il a été question de détails sur le cas mauritanien ainsi que sur les textes et les pratiques les plus utilisés sur le plan international, notamment dans les pays leaders des industries du pétrole et du gaz.

Là, on trouve tout ce qui se rapporte aux principales phases d’un projet standard de pétrole tels que les études d’impacts environnementaux (EIE), les contrats (exploration et exploitation, avec ou sans risque dans le capital), les conditions de gestion d’une propriété communes aux générations actuelles et futures (ITIE et FITI), etc.

Implicitement, on invite les Mauritaniens à continuer à s’inspirer des progrès réalisés ailleurs, notamment en ce qui concerne la capacité de négociation, l’évaluation des EIE et les méthodes de suivi-évaluation des recettes et dépense de manière conforme aux nouvelles approches introduisant l’opportunité de la dépense et son efficience, surtout quand il s’agit de projets structurants et de grande envergure (http://cridem.org/C_Info.php?article=635472).

D’autre part, l’analyse approfondie des différents modules de cette formation du PRCM et des réactions des participants nous laisse sous-entendre que :

1. Nos politiques et stratégies environnementales (sectorielles et nationales), devront désormais intégrer suffisamment la problématique du changement climatique et insister, dans le cas des projets du pétrole et gaz, sur les mesures de prévention, de correction et de restauration des dégâts pouvant apparaitre ou résulter des phases d’exploration, d’exploitation et d’abandon ou démantèlement ;

2. Des formations similaires sur la gestion environnementale des activités de la pêche et/ou sur la gestion environnementale des activités agricoles, montreront combien ces activités affectent-elles aussi l’environnement;

3. Les ressources naturelles du sous-sol ne sont pas de l’argent content. Il faut en effet risquer de gros capitaux dans l’exploration et investir des moyens, plusieurs fois plus importants, dans l’exploitation (développement et production, etc.) ;

4. les ressources naturelles, en tant que capital naturel commun aux générations présentes et futures, doivent obligatoirement être gérées sur la base de quelques principes fondamentaux dont notamment la durabilité pour celles renouvelables, la transparence, l’équité, la préservation de l’environnement, ect. (http://cridem.org/C_Info.php?article=730028).

5. La recherche et l’exploitation du pétrole et du gaz en mer constituent, même pour un pays qui a des côtes parmi les plus poissonneuses au monde, un mal nécessaire exactement comme les Accords de Partenariat de Pêche (APP) ;

6. Les sociétés majors continueront à monopoliser la recherche dans le domaine des technologies pétrolières et gazière et à contrôler la production et la vulgarisation des équipements et techniques liés à leur industrie.

Tranquillisées déjà par l’importance du potentiel continu ou probable du pétrole au niveau mondial, ces société freinent actuellement l’exploitation de l’énergie renouvelable à une grande échelle et continueront à éviter qu’elle devienne, malgré ses effets minimes sur l’environnement et ses couts modérés, une véritable alternative à l’énergie fossile.

Pour des raisons stratégiques, les efforts des majors seront plutôt orientés vers comment d’une part, réussir l’exploitation, jusqu’au niveau zéro, des puits déjà abandonnés et de ceux qui feront, à l’avenir, l’objet d’exploitation et de l’autre, accéder à des profondeurs plus importantes pour ce qui est de l’offshore.

Par ailleurs, peut-on conclure que cette formation a renforcé les capacités des acteurs nationaux en matière de gestion environnementale des activités du pétrole et du gaz pour en faire des soldats suffisamment armés de conscience et de connaissances techniques nécessaires.

En ce qui concerne particulièrement notre société civile, les connaissances acquises devraient la rendre assez avertie et pragmatique pour comprendre la réalité des choses et accepter que l’exploitation des gisements de pétrole et de gaz, est un mal nécessaire que ce soit dans le continent ou en offshore.

Quant au revers de la médaille, en constitue le risque que cette même société civile devienne plus regardante sur les questions de fond et plus exigeante face aux décideurs et promoteurs privés impliqués.

En somme, le PRCM a contribué à faire émerger des soldats capables d’aider les décideurs nationaux à résister aux jeux des compagnies transnationales ou de lutter, le cas échéant, contre la complaisance de celles-ci avec les dirigeants nationaux. C’est tout simplement faire, involontairement, d’une pierre deux coups.

Enfin, une étude sérieuse de cas pourrait certainement révéler que tous les problèmes des industries extractives -et du monde entier- tournent autour de l’éthique. A méditer.

Dr Sidi El Moctar TALEB HAMME



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