05-01-2020 17:53 - Economie - Banque centrale : Quel bilan?

Economie - Banque centrale : Quel bilan?

Mauriweb - Le bilan de la Banque centrale de Mauritanie aura été en dessous des espoirs attendus tant on a pu lui reprocher une absence remarquable dans la gestion quotidienne et stratégique de ses fonctions régaliennes.

Tout d’abord par rapport à la démonétisation réalisée en 2018 aux forceps sans aucune préparation amenant les banques primaires à s’adapter dans la dispersion aux nouvelles règles édictées par les autorités publiques. Jusqu’à présent, les conséquences techniques et financières sont amplement ressenties sur la scène économique. D’aucuns ont estimé que les prévaricateurs ont utilisé pour leurs comptes le contexte mal géré de la démonétisation pour mettre leurs établissements en banqueroute organisée.

Les cas les plus patents sont ceux de la Nouvelle Banque de Mauritanie (NBM) et de la Banque Mouamalat Sahiha (BMS) entre 2017 et 2018 sans oublier le cas encore tout frais de la Maurisbank qui date de 2015.

Près de cent milliards MRO de dépôt sont ainsi partis en fumée. Ce ne sont pas les subsides prévus par le fonds de garantie géré par la BCM (3% maximum des dépôts) qui vont désintéresser les agents économiques qui ont pris le risque de faire confiance aux banques primaires.

Les experts et non des moindres estiment que les déséquilibres structurels latents menacent à très courts termes d’autres établissements bancaires de la place au risque de créer un effet domino dans l’ensemble du système financier.

Les doutes sur la bonne conduite de la politique financière par la BCM ne s’arrêtent pas là. Des personnes parmi les plus autorisées soulèvent la problématique posée par la création et la circulation fiduciaire de la nouvelle monnaie (MRU) lancée au tout début de l’année 2018 du fait de la mauvaise qualité des billets de banque mis sur le marché pourtant valorisés par l’institut d’émission pendant la campagne de lancement.

Comment en est-on arrivés là ?

L’observation conduit à conclure que ce sont là les résultats d’une fuite en avant sur plusieurs années ; époque où la place centrale et stratégique pour la politique économique de la BCM ayant été banalisée par les dirigeants laissant la place à l’improvisation, la négligence voire au laisser-faire. C’est à cet égard que l’on peut estimer que les fonctions de régulation ont été simplement abandonnées laissant la porte ouverte à tous les abus vécus.

Sur un plan plus général, certains cadres avisés de la BCM, qui regrettent cet état de fait dommageable pour le maintien des grands équilibres macro-économiques et financiers du pays, estiment que la BCM a depuis quelques années ignoré ses fonctions régaliennes et de supervision bancaire, en particulier, à l’avantage des sphères administratives et politiques.

A qui incombe finalement la responsabilité directe de cet effondrement ? On peut estimer que la responsabilité est largement partagée à l’échelle de l’administration impliquée. Toujours est-il qu’il est grand temps de voir de plus près comment peut-on donner sa véritable place à la BCM au sein de l’échiquier économique et financier de notre pays. Une nouvelle organisation s’impose, une clarification des missions et responsabilités est à implanter ; une plus grande implication de l’Etat, au sens large, dans la supervision de la conduite financière et économique de la BCM est à instaurer…

Jusqu’à présent, la BCM a tenté de s’adapter aux mutations nationales et internationales sans disposer des instruments institutionnels idoines (statuts, instruments de politique monétaire et place dans le financement de l’économie…). Il est grand temps pour les pouvoirs publics de se donner du temps pour mieux asseoir une nouvelle BCM conforme aux exigences et aux ambitions de notre politique économique.

JD



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Commentaires (2)

  • nabuchodonosor (H) 06/01/2020 09:27 X

    Depuis le départ d'Ahmed Zein en 1992, la BCM a connu 12 Gouverneurs avec en moyenne une gestion d'une durée de moins de 2 ans et demi par Gouverneur. Quel désastre? L'institution qui demande le plus de stabilité a été considérée par les dirigeants politiques un instrument de lutte politicienne de très basse envergure. En effet, à part deux Gouverneurs (Zeine et Kane), tous les autres n'avaient pas les profils requis dont le plus important à mon avis est la force de caractère et l'autonomie dans la prise de décision. Ce sont ces critères de désignation (basés essentiellement sur la subordination aveugle aux désirs du chef) qui ont manqué à la BCM durant ces trois dernières decennies. Malgré les compétences averées de certains de ces gouverneurs (et l'incompétence notoire de certains), la plupart a peché de manque d'indépendance. Or l'indépendance dans la gestion d'un institut d'émission monétaire et le principal garant de sa perennité.

  • moboco (H) 05/01/2020 19:48 X

    Il ne faut surtout pas s'en prendre aux personnes qui ont été nommées à ces fonctions d'ordre stratégique qui sont souvent étrangères à leur domaine d'activité mais aux systèmes politiques qui ont commencé à les y désigner depuis au moins une vingtaine d'années pour essayer de mieux les maîtriser.. Ces nominations sont en effet condamnables car d'une part c'est une injustice flagrante vis à vis des cadres compétents et intègres de ces institutions qui attendaient une promotion méritée mais c est surtout grave car les personnes ainsi désignées mettent au moins deux ans avant de comprendre le fonctionnement de l'Institution,ce qui conduit parfois à des situations irréparables comme ce qui s'est passé à la Sonimex, lEner et dans une moindre mesure à la Snim..Et tout cela s'applique plus particulièrement à la BCM car la maîtrise des rouages de la politique monétaire ne s'improvise pas et nécessite une très grande expérience au sein de l'Institution.