02-02-2020 14:30 - Mauritanie: le français désormais interdit au Parlement

Mauritanie: le français désormais interdit au Parlement

Le360 Afrique - La Mauritanie est rattrapée par le vieux débat d’une arabisation forcée et au rabais qui a historiquement nourri l’antagonisme entre les nationalismes, débouchant sur de graves dérives et l'exclusion des communautés négro-mauritaniennes, plutôt francophones.

Le président de l’Assemblée nationale, Cheikh ould Baya, colonel à la retraite, proche de l’ancien président, Mohamed ould Abdel Aziz, interdit désormais aux députés mauritaniens, de s’exprimer en français au cours des séances plénières de l’institution. La mesure a été notifiée aux élus ce vendredi 31 janvier.

Du coup, les seules langues admises au sein de l’auguste hémicycle sont désormais l’arabe, le hassania (qui en est dérivé), le peul, le soninké et le wolof.

La constitution mauritanienne consacre l’arabe comme langue officielle de la République. Le hassania, le peul, le soninké et le wolof, absents du système éducatif, sont élevées au rang de langues nationales.

Zappé par la loi fondamentale, le français, héritage de la colonisation, est présent dans l’enseignement, une bonne partie de l’administration et dans la vie politique et le monde des affaires. Mieux, il sert d’ouverture vers l’Afrique de l’Ouest, voire le Maghreb et bien sûr le monde.

Première conséquence de la nouvelle orientation parlementaire, vendredi, le président Cheikh Baya, a refusé la parole à Coumba Dada Kane, députée de la coalition Sawab/RAG, qui voulait s’exprimer dans la langue de Molière, estimant «qu’un discours en français à l’Assemblée nationale de Mauritanie n’a pas de sens».

L’annonce de cette nouvelle est à l’origine d’un torrent de réactions dans la presse en ligne et sur les réseaux sociaux.

Un concert de dénonciation contre une démarche relevant d’un vulgaire populisme, véritable ennemi de toute forme rationnelle de gestion de l’Etat et des institutions.

Ainsi, Samba Thiam, leader des Forces progressistes pour le changement (FPC), fustige «le caractère léger, dilatoire et malsain, d’une mesure dont l’ambition inavouée est de perpétuer le même système qui opprime, depuis des décennies, les négro-africains de Mauritanie.

Une décision prise sans étude préalable, ni transition. Le français éjecté de l’hémicycle, remplacé par l’Arabe, le Peul, le Soninké et le Wolof, qui seraient traduits uniquement vers l'arabe, et inversement, au mépris de la connexion et de l’identité culturelle commune des populations négro-africaines, comme pour briser tous liens entre elles».

Pour sa part, le Pr Lô Gourmo Abdoul, vice-président de l’Union des Forces de Progrès (UFP-opposition), perçoit à travers la mesure «une volonté délibérée d’effacer les négro-africains du paysage politique et des autres activités de la vie du pays. Cela est cohérent avec le vieux projet chauvin, d’uniformisation ethnolinguiste du pays » par l’imposition d’une langue ».

Interpellant directement le président de l’assemblée nationale, le Pr Lö enfonce le clou «votre majorité mécanique» vous permet de poser immédiatement les jalons d’une réforme nécessaire, visant à officialiser les langues négro-africaines. Un défi dont l’objectif est de montrer que la nouvelle initiative ne vise nullement la promotion des langues négro-africaines.

Par ailleurs, de nombreux internautes dénoncent «l’attitude incohérente» de ces élites aux moyens immenses, qui envoient leur progéniture à l’école française pour échapper à la catastrophe d’un système éducatif détruit par une arabisation populiste et au rabais.

Par notre correspondant à Nouakchott
Cheikh Sidya





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Commentaires (10)

  • Marrakech (F) 05/02/2020 08:11 X

    Les mauritaniens préfèrent la colonisation arabe à celle des français, ils rampent devant les EAU ....

  • mystere1 (F) 03/02/2020 10:33 X

    Le pire est que ce président de l’assemblée, a son mandat pour rester, à moins que le président ghazwani a du pouvoir, pour modifier ce cas, puisqu’il est le président et gardien de la constitution, donc, il ne doit pas accepter la démocratie linguistique, mais aussi que nos langues locales soient apprises à l’écoles, dans les autres lieux de travail, ce n’est pas seulement en journal télévision, oui cela est très important pour le patrimoine culturel et social d’un pays pour sa richesse, mais hélas, puisqu’on vit dans un pays où la comédie et l’hypocrisie excellent en l’art du mensonge, eh bien, rien ne marchera pour le pays et pour son peuple, qu’Allah nous Sauve de ces maux.

  • kalidou gueye (H) 03/02/2020 07:49 X

    le chapitre de l'interpreteuriat stipule que les debats au niveau de l'hemicycle seront traduits dans toutes les langues nationales mais pas d'en interdir une. Si vraiment le francais est banit a l'assemblee pourquoi les rapports des commissions ne sont faits qu'en arabe et francais, pourquoi pas dans les autres langues. En plus ceux qui traduisent sont des gens du systeme et leur traduction n'est pas sincere. Ils ne disent pas directement ce que le depute a dit au gouvernement mais ce qui plait a leur employeurs. A revoir.

  • kalidou gueye (H) 03/02/2020 07:45 X

    Il est temps que la communaute negros mauritaniennes en particulier et les francophones en general se dressent devant ce mensonge et injustice qui vient contribuer a l'exclusion de notre communaute. Chaque president qui vient a sa facon d'exclure ou de participer a l'exclusion de cette composante noire. Il faut des actes forts (manifestations ou desobeissance civile) pour arreter ces conneries que ne cessent de faire nos dirigeants depuis les independances. Mobilisons nous et luttons pour notre existance.

  • leguignolm (H) 03/02/2020 00:29 X

    Il veut saboter l'enquête dirigée contre son ami, sûrement l'enquête ne sera pas en arabe,il cherchait semer un chao générale.

  • Marrakech (F) 02/02/2020 19:14 X

    C'est la victoire des ignorants et des obscurantistes !

  • netali (H) 02/02/2020 16:42 X

    mais tant mieux du moment que c'est seulement au parlement bien. exprimez vous en soninké poular et wolof et refuser de parler autre langue que votre langue maternelle

  • lass77 (H) 02/02/2020 16:40 X

    Un président de l'assemblée nationale n'a aucun pouvoir de prendre seul une décision concernant la vie démocratique d'un pays. C'est vraiment de l'enfumage. Heureusement que la majorité des députés sont illégitimes sinon pourquoi il y'a aucune réaction des autres députés y compris ceux soi-disant arabes qui ne peuvent meme pas s'exprimer. Ghouazani doit intervenir, car il s'agit là encore d'une volonté d'exclure et de museler la voix des mauritaniens. ça suffit.

  • NDIEWO (H) 02/02/2020 16:34 X

    Le français n’est pas remplacé par l’arabe et les autres langues nationales mais par le hassaniya et les autres langues nationales. Des arrivistes dont les parents n’avaient même pas un goori( chèvre ), tu ne pourras pas imposer à personne de parler arabe au détriment de sa langue, et en vérité c’est cela votre objectif. Nous allons désormais parler que nos langues et le français. Svp, recruter des traducteurs de nos langues partout dans l’administration vu qu’il n’y’ a plus de kowri dans l’administration Mauritanie, Delfique naamchala

  • dykrim (H) 02/02/2020 15:20 X

    ould Baya est entrain de se faire vieillir rapidement ce monsieur ne fait que polémiquer tout en étouffant le vrai débat à l’assemblé national. Sa façon de faire dénote nettement qu’il roule pour quelqu’un en dehors de l’hémicycle. Ils ont certainement un plan qui mettra chaos la RIM à fin de rester agripper aux pouvoir. Si ont se souvint, les gens comme Kadiata Malik Dialle, Saoudatou Wane et autres qui ont bougonné l’assemblé se sont exprimés en français une langue ils méprisent pour faire véhiculer aisément leurs revendications sur le plan national et international, c’est ce que ces chauvins veulent arrêter, pour des intérêts peso...