13-06-2023 23:58 - Mauritanie : lancement des activités de l’association « Jiggen Jef Suqaliku » - [Photoreportage]

Mauritanie : lancement des activités de l’association « Jiggen Jef Suqaliku » - [Photoreportage]

La capitale a abrité ce samedi 10 juin 2023 à l’ancien palais des congrès de Nouakchott, le lancement officiel des activités de l’Association « Jiggen Jef Suqaliku », expression en Wolof qui se traduit comme « Femme-Action-Développement », sous le haut patronage de la première dame, son excellence madame Mariem Mint Mohamed Fadel Dah qui a haussé de sa présence l’événement tout en étant accompagné d’une forte délégation.

Les trois discours de la cérémonie officielle étaient d’une rare intensité combinant vivacité, passion pour la cause des femmes et une invitation à l’unisson des cœurs pour construire ensemble un meilleur avenir pour la Mauritanie.

Lors des interventions, l’audience a applaudi passionnément le récit relatant le leadership d’une héroïne du Walo dans la signature du traité de paix entre l’Emirat du Trarza et le Royaume du Walo.

Celle-ci avait renoncé à ses intérêts personnels au profit du bien commun.

D’emblée, le décor de la cérémonie rappelait les rassemblements des récentes campagnes politiques mais les différences se situent dans les motivations des participants. Durant la campagne, les politiciens dépensaient des sommes colossales pour acheter les consciences des pauvres citoyens et prenaient en charge la totalité de leurs frais de déplacement.

A contrario, les pauvres dames membres de l’association se sont déplacées sur leurs propres frais et pris en charge les frais d’organisation de l’évènement en mutualisant leurs efforts. Ainsi, l’association a fait salle comble sans tambour battant.

Les parties de la salle dans lesquelles l’on voyait des chaises vides étaient celles réservées aux invités qui se sont absentés en croyant certainement au « déjà vu » lors de la réception de leur lettre d’invitation.

L’allocution de la présidente du bureau exécutif de l’association, Yacine Mbodj portait essentiellement sur un message de bienvenue et l’explication de la devise de l’association qui est défini comme suit : « Nous sommes le fruit de notre passé, nous construisons notre avenir sur la réalité du présent ».

D’une part, la présidente a d’abord défini le mot Walo avant d’exposer les traits caractérisant les Walo-Walo en mentionnant leurs principales activités qui sont l’agriculture, la transformation des produits agricoles et le commerce en détails. Toutefois, elle a soutenu que ces femmes s’organisent en coopérative et participent à un système d’épargne traditionnelle, appelé « Tontine ». Malheureusement, elles sont connues pour les dépenses extravagantes lors de la célébration d’évènements sociaux, tels que baptême, mariage et Gamou (Chant religieux). Ce mode de vie anéantit tout leur espoir de sortir du cercle vicieux de la pauvreté.

D’autre part, elle a précisé que les conditions de vie de plus en plus difficiles doivent contraindre les femmes Walo-Walo à changer de mode de vie et s’adapter à l’évolution. Ainsi, le programme d’autonomisation est une opportunité d’éveil des consciences et de changement des habitudes de ce fait. Toutefois, la stratégie de l’association privilégie la valorisation des acquis et talents des femmes en transformations les mauvaises habitudes en opportunités. D’où la nécessité d’incarner les valeurs des femmes des ancêtres du Royaume du Walo (1287-1855) dont la capitale qui a eu le record de longévité fut Ndiourbel dans la rive droite du fleuve Sénégal, c’est-dire dans l’actuelle ville de Rosso-Mauritanie. Le lieu est devenu le plus grand quartier populaire de cette ville et conserve toujours le même nom. Ce qui est fierté pour la communauté des Walo-Walo de la Mauritanie.

A la fin de son intervention, la présidente a noté que l’objectif principal de l’association est de rendre autonome 2500 membres. L’un des objectifs spécifiques est de créer une institution de microfinance en remplacement de la tontine.

A ce jour, l’effectif s’élève à 1917 membres confirmés qui se sont acquittés des frais d’adhésion et d’une part sociale de 2000 MRU. Ce chiffre est obtenu à l’issue de deux campagnes de recrutements dont la dernière est clôturée en janvier 2023. Dans le souci de contribuer à l’unité nationale et d’atteindre l’effectif cible, l’association a décidé de lancer une autre campagne de recrutement devant permettre aux membres des autres communautés et/ou femmes issues d’autres zones géographiques de s’inscrire suivant des modalités à définir ultérieurement.

En ce qui concerne, la Présidente du Conseil des Sages et de Discipline de Jiggeen Jef Suqaliku, Linguère Ndeye Niang a développé quatre points qui ont marqué l’empreinte des linguères dans l’ancien Royaume du Walo-Walo en guise de modèle d’inspiration. Il s’agissait du rappel des points suivants :

- Les anciennes normes sociales du Walo étaient basées sur un système matrilinéaire accordant des privilèges socio-économiques et socio-politiques aux femmes,

- Le partage du récit de la tragédie de « Talatay Nder » (Mardi Nder). Il s’agit du suicide collectif des femmes du Walo devant le choix de finir en captives de guerres ou se donner la mort ;

- La capacité d’influence des Linguères du Walo : Sur ce point, la Présidente a cité le Général Faidherbe qui avait mentionné dans ses mémoires publiés en 1886 que : « Le chef du Walo portait le titre de Brak ; mais, il y a une soixantaine d’années, deux princesses de la famille royale, Djimbot et ensuite Ndété-Yalla, sa sœur, s’emparèrent de l’autorité ». Ce qui montre que le pouvoir des femmes dans l’ancien royaume du Walo,

- En dernier point, elle a rappelé la décision de la reine Djimbot Mbodj, rescapée de Talatay Nder, de renoncer à ses pouvoirs de « Roi en titre » pour donner sa propre main à l’Emir Mohamed El Habib et ce, dans le but de rétablir une paix durable entre les peuples du Trarza et du Walo. De ce mariage, naquit l’Emir Ely Djimbot ould Mohamed El Habib.

Cet exploit aboutissant à la paix durable montre que juste une femme engagée peut résoudre des crises profondes entre deux peuples. En conséquence, beaucoup de femmes unies peuvent faire des merveilles. Ce le défi lancé aux femmes mauritaniennes pour relancer le dialogue et unir la nation.

A la fin de la partie cérémoniale, la première dame a pris la parole pour marquer le lancement officiel des activités de l’association. Elle a salué l’initiative courageuse des femmes du Walo et a rappelé les contributions de la femme mauritanienne dans le développement social, politique et économique du pays durant les dix dernières années.

La première dame a renouvelé son engagement pour la cause des femmes, particulièrement les femmes rurales qui vivent dans des conditions difficiles. Elle a soutenu que l’initiative de création d’une institution de microfinance pourrait résoudre beaucoup de problèmes dont font face les femmes.

La deuxième partie du programme était consacrée à la présentation du contenu du rapport annuel de l’association par différentes intervenantes. Le fait marquant pour cette jeune association est qu’elle a distribué des copies de son premier rapport d’activités comportant le bilan financier. Ce qui constitue une innovation pour les associations. La situation financière présentée montre un total de produit d’exploitation de 4 539 134 MRU au titre de l’exercice 2022-2023 dont 97% sont constitués d’apports des membres. Un effort considérable pour des femmes issues majoritairement des couches sociales défavorisées.

Il a fallu attendre la dernière intervention du programme pour voir la prise de parole d'un homme. Il s’agit de Mr Abdou Karim Gaye, un cadre de la BCM qui accompagne l’association en qualité de consultant bénévole. Son intervention portait sur le résumé d’un article scientifique intitulé : « Complexité de l’autonomisation des femmes Africaines : Etude de Cas des Linguères du Walo en Mauritanie ». Il est l’auteur de cet article publié dans la revue « International Journal of Economic Studies and Management en fin décembre 2022. L’article traité du style de leadership promouvant les principes de la psychologie positive, c’est-à-dire s’appuyer sur ses propres capacités pour se développer.

Ibrahim Idriss
Arriyada.net


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Source : Ibrahim Idriss
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