18-06-2017 00:00 - Pourra-t-on encore regarder le Qatar droit dans les yeux ?

Pourra-t-on encore regarder le Qatar droit dans les yeux ?

Le Calame - Avait-on besoin de cette autre crise du Golfe ? Avait-on besoin de brader l’indépendance de notre décision ? Avait-on besoin de découvrir notre déconcertante satellisation à une puissance étrangère ? Pouvait-on, un jour, s’imaginer que la Mauritanie est descendue si bas au point de laisser les autres décider à sa place ?

Tous ceux qui avaient vu comment la Mauritanie a négocié une brillante entrée sur la scène pouvaient mal croire qu’il n’allait plus rien lui rester de cette aura que ses premiers diplomates lui ont léguée.

La rupture de nos relations avec le Qatar, juste parce que ce richissime émirat a des problèmes avec son grand voisin saoudien, est l’une des dernières énormités qui sont venues saper le petit peu qui restait de notre orgueil national.

Moktar Ould Daddah, qu’Allah ait son âme, doit s’être remué plusieurs dans sa tombe, lui qui a toujours défié les grands de ce monde, en rompant, s’il le fallait, les relations diplomatiques avec eux, en dénonçant les rapports coloniaux unissant la Mauritanie à certains parmi eux, en délocalisant, pour l’unique fois dans l’histoire, l’une des réunions du conseil de sécurité et en refusant obstinément de se laisser dominer quel que grand que ce soit.

Le tout, l’ancien président l’avait fait alors que le pays dont il présidait aux destinées venait à peine d’accéder à la souveraineté et était encore désespérément démuni.

En son temps, la Mauritanie, quoique pays naissant, avait son mot à dire sur la scène mondiale et lui, il avait sa place aux côtés des dirigeants les plus en vue d’alors qui lui vouaient estime et respect et qui ne pouvaient, à aucun moment, interférer dans nos affaires intérieures ou nous dicter les orientations de notre diplomatie.

Sincèrement, et pas pour les beaux de l’émir Temime ou de son petit émirat gazier, je ne pouvais guère m’imaginer que l’Arabie Saoudite pouvait avoir le culot de nous intimer l’ordre de rompre avec Doha parce que Riyadh a senti le besoin de disculper auprès des Etats Unis d’Amérique en leur faisant croire que c’est plutôt le Qatar qui incarne et alimente la machine terroriste !

D’autres pays, un peu plus respectueux de l’orgueil de leur peuple, n’avaient pas succombé aux promesses saoudiennes et avaient refusé de rompre avec Doha, se limitant à proposer leurs bons offices pour des retrouvailles entre cet émirat et son arrogant voisin. Pourquoi pas, nous ?

Nos trois partenaires maghrébins, le Maroc, l’Algérie et la Tunisie, ont tous sauvé les meubles en s’abstenant de prendre partie pour l’un ou l’autre de ces deux protagonistes de la péninsule arabique. Du coup, ils n’ont pas insulté l’avenir de leurs relations avec ces deux pays qu’ils pourront toujours regarder droit dans les yeux. Pourquoi pas nous ?

En fait, c’est ça ce qu’il nous fallait faire. Parce qu’il est certain qu’il n’y aura pas de 4e guerre du Golfe. Les Etats Unis, mêmes déboussolés par le tout nouveau D. Trump, n’accepteront, pour rien au monde, de risquer un embrasement des derniers bastions stables de la région.

Par conséquent, il faut s’attendre à un rapide règlement du contentieux qataro-saoudien et là, tous les pays qui ont pris fait et cause pour Riyadh auront, sans doute, des problèmes.

Comment peuvent-ils désormais traiter valablement avec Doha ? Est-ce que cet émirat pourra encore avoir confiance en eux ? Est-ce qu’ils vont pouvoir rétablir leurs relations avec lui ? Comment cela va se faire ? Est ce que l’Arabie Saoudite, qui a été à l’origine de la rupture, se fera le devoir d’épauler ses pays satellites pour qu’ils retrouvent le chemin de Doha ?

Ce sont des questions de ce genre que se posent tous les patriotes soucieux de l’image de notre pays et, surtout, de son indépendance qui, somme toute, ne pourrait pas avoir de prix.

Ces sont aussi ces mêmes questions que le pouvoir du général Abdelaziz devait se poser avant de prendre parti pour un frère au détriment d’un autre frère.

Ely Abdellah




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Commentaires (8)

  • doudou19 (H) 18/06/2017 18:28 X

    jakuza (H)Le choix est d'une pierre deux coups : - S'aligner sur la ligne de conduite du plus offrant en terme d'aides; - empocher une bagatelle de 50 millions de Dollars US. Le choix est vraiment stratégique par rapport aux intérêts du boss et pas du citoyen mauritanien: pas par ce que la Mauritanie a rompu ses relations diplomatiques avec le Qatar. Non. Par ce qu'il ne verra pas un seul sou.

  • leguignolm (H) 18/06/2017 15:10 X

    Ce comportement de la Mauritanie fait parti de sa culture autrement de sa politique de refuge si ses autres pairs du Maghreb Arabe sont parvenus à chauffer les casseroles;c'est par qu’ils n'ont pas les mêmes cas sociaux et je m'adresse encore à ceux qui disaient la décision de la Mauritanie c'est une affaire de choux, c'est faux aussi car la raison des nos "jouhas" est ailleurs. Et pour répondre à la question du Mr. Oui la Mauritanie peut bel et bien regarder le Qatar dégager ou manifester aucun sentiment de regret!

  • zelimkhan2 (H) 18/06/2017 13:17 X

    @Ely abdallah Vous omettez un fait important. Aziz a empoché 50 millions de dollars US venus d'Arabie saoudite au nom de la rim sans qu'aucune institution financière publique (BCM, trésorerie publique) n'ait enregistré ce montant. Nos dirigeants et en l'occurrence le premier est cupide et irréfléchi. Ce qui est dangereux et conduit à de telles énormités.

  • Bertrand (H) 18/06/2017 12:18 X

    Les Etats, particulièrement, aujourd'hui, n'ont pas de moral. Développement, sécurité, préservation des acquis, résistance à la dislocation, sont les maîtres mots. Le Qatar a offert par le passé et offre très très peu d'aide à la Mauritanie, contrairement à l'Arabie Saoudite et aux Emirats ou il y a une très grande communauté de mauritaniens. Si les pays du monde avaient une morale, ils rompraient leurs relations avec les USA, Israel, La France, La Grande Bretagne, l'Italie, des pays qui détruisent le monde chaque jours, qui bombardent des populations innocentes qui emprisonnent et tuent à feu nourri et à petit feu le peuple palestinien, qui font un génocide en Syrie et au Yémen, après l'Irak et la Libye.La position de Mauritanie est compréhensible, il ne s'agit pas de choisir entre la vérité et le mensonge, le bien et le mal, mais plutôt de choisir le moindre mensonge et le moindre mal et voir qu'est ce qu'il y a à gagner et à perdre.

  • doudou19 (H) 18/06/2017 11:11 X

    Je me demande: Pourquoi fait-on autant de bruit par rapport à la rupture des relations diplomatiques entre notre pays et le Qatar? A t-on demandé l'avis de quelqu'un lors de leur établissement? Pourquoi s'accroche t-on à une fraternité quasi-inexistante? On n'oublie que les intérêts sont plus forts qu'une simple fraternité épidermique.

  • medabdul (H) 18/06/2017 01:03 X

    Pays freres,quels pays frères? il ne faut pas confondre pays frère et pays donateur, la Mauritanie est un pauvre pays qui tend la main, cette fraternité est a sens unique, ces pays du golfe prennent la Mauritanie pour une contrée de petits bédouins berbères arriérés qui se prennent pour le centre du monde, et d'une mentalité de quémandeurs taillables et corvéables a merci, il suffit de remuer des dollars pour s'aplatir a bon gré, sans histoire et sans passe conséquent comme disait Kadhafi, une certaine couleur épidermique ne définit pas la fraternité même si la notre est plus foncée.

  • thialido (H) 18/06/2017 00:32 X

    Écoutez monsieur couper une relation diplomatique entre pays est facile; la rétablir dès que besoin se fait sentir est encore plus facile que vous l'imaginez. Nous sommes en Mauritanie est nous maîtrisons le vivre sur situation. J'espère que dans notre valise nous avons différents boubous de différentes couleurs.

  • jakuza (H) 18/06/2017 00:11 X

    "Le cœur d'un homme d'Etat est dans sa tête!" Dixit Napoléon Bonaparte. Aziz a pris la décision qui préserve les intérêts stratégiques de la Mauritanie malgré l'empathie qu'il peut avoir pour le Qatar...