30-05-2013 12:17 - Arrêt de la grève à Zouerate : Accord durable ou improvisé ?
Les employés non-permanents de la citée minière de Zouerate ont décidé, après de rudes négociations entreprises mardi soir dernier à une heure tardive avec des émissaires du gouvernement et la direction de la SNIM et couronnées par un accord, de reprendre le travail.
Un répit nécessaire consenti par les grévistes mécontents pour accorder suffisamment de temps aux pouvoirs publics pour la concrétisation de leurs promesses.Mais, avec une réputation peu reluisante en termes d’accords respectés à la lettre, les dirigeants du pays doivent s’armer de volonté et de sincérité pour éviter un come-back irréversible à l’effet boomerang de cette colère ouvrière sur les autres segments de l’emploi.
Les autorités peuvent se réjouir grandement d’avoir remporté le pari d’emmener les journaliers grévistes de Zouerate à regagner mercredi passé leur lieu de travail et à suspendre toute forme de manifestation, contre la satisfaction de certaines de leurs revendications fondamentales dans les prochaines semaines.
Mais, cette trêve obtenue difficilement après de moult pourparlers avec des ministres et la SNIM reste précaire. L’expérience vécue montre malheureusement que l’Etat n’a pas souvent tenu parole et que ces thérapies aux crises qui secouent par moments le pays, ne sont que des tranquillisants ponctuels qui ne tardent pas à perdre leurs pouvoirs et à replonger les parties conflictuelles dans l’impasse, allant crescendo et vivement ravivée sous l’effet de la récupération politique et des conditions de vie toujours difficiles.
En effet, les autorités se sont régulièrement dérobées de leurs engagements signés par leurs délégués à l’occasion d’accords convenus avec des parties tierces politiques ou sociales. Depuis le célèbre accord de Dakar qui avait mis fin à l’élan de contestation du coup d’Etat d’aout 2008 aux résultats du dialogue convenus entre l’opposition participationniste et la majorité présidentielle en passant par l’arrangement paraphé par le ministère de la fonction publique avec les syndicats sociaux professionnels d’une part et les anciens fonctionnaires victimes de la déportation d’autre part, pour ne citer que ces cas d’école, force est de constater que les engagements pris par l’administration finissent souvent par être des promesses sans lendemain.
Sans verser dans le pessimisme et dans l’espoir de voir les autorités tirer enfin les enseignements qu’il faut de cette grogne sociale violente, qui a causé d’énormes dégâts matériels notamment la destruction d’édifices publics, il est clair que les autorités sont les premières à favoriser le climat d’exploitation et de mépris à l’endroit des ayants droits, du fait de leurs accords improvisés et de leur amnésie des engagements pris.
A propos de l’accord proprement dit, qui aurait permis de ramener le calme dans la citée minière, on apprend qu’une dizaine de sociétés sous-traitantes, qui mettaient ces journaliers à la disposition de la SNIM, se sont engagées à honorer entre autres doléances le paiement d’un salaire supplémentaire à la fin du mois de mai, des jours de grève (7 jours de protestation).
Les mêmes sociétés ont promis également d’appliquer l’article 57 du code du travail, portant l’attribution d’une prime d’éloignement et d’exécuter immédiatement d’anciens accords signés entre employeurs et travailleurs ainsi que d’accorder aux journaliers un accès à l’assurance maladie en plus de leur protection contre tout acte de représailles après leur mouvement de grève.
Notons par ailleurs que le gouvernement a été représenté à cet accord à préserver à tout prix pour éviter de revenir au pré-carré de la grogne sociale et de ses répercussions dangereuses par le ministre de l'intérieur et de la décentralisation Mohamed Ould Boilil et son homologue du pétrole, de l’énergie et des mines Taleb Ould Abdi Vall. La SNIM a été représentée quant à elle par son patron, Mohamed Abdallahi Ould Oudaa.
Rappelons enfin que d’actes violents de destruction d’édifices publics s’étaient produits mardi dernier suite à la décision des journaliers grévistes mécontents de passer à la vitesse supérieure de l’affrontement pour pousser des interlocuteurs publics présentés comme étant indifférents devant leur calvaire.
Une insouciance que des observateurs avertis imputent à des disfonctionnements dans le dispositif Etat où la décentralisation n’existe que de nom, où encore rien ne peut se décider sans le président de la République. Et quand l’homme fort est absent pour raison de congé, comme c’est le cas actuellement, c’est incontestablement la tension qui monte en flèche entre des travailleurs spoliés et une administration spectatrice. Enfin, espérons vivement que le point de presse du premier juin prochain prévu par les syndicats professionnels des dockers des différentes centrales ne soit pas la révélation d’un manquement des autorités à leurs engagements qui avaient récemment apaisé la grogne au niveau de cette filière d’ouvrier. Wait and see !
Md O Md Lemine
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