26-04-2024 20:17 - Présidentielle 2024 : Aziz est inéligible, affirme Lo Gourmo... Si répond Béchir Fall

Présidentielle 2024 : Aziz est inéligible, affirme Lo Gourmo... Si répond Béchir Fall

Info Plus - Le professeur et avocat Lo Gourmo, également le Vice-président de l'UFP est catégorique dans son raisonnement de juriste : l'ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz est inéligible à la magistrature suprême, en raison de l'article 28 de la Loi Fondamentale mauritanienne selon lequel "le président de la République est rééligible une seule fois".

Un avis qui n'est partagé par un éminent autre juriste qui n'a pas besoin d'être présenté aux intellectuels mauritaniens, en l'occurrence Béchir Fall, lequel prend à contre-pied dans le raisonnement suivant les assertions de Me Lo Gourmo.

"Je viens de lire un article du professeur Lo Gourmo insistant sur l'inéligibilité du citoyen Mohamed Ould Abdel Aziz à la fonction présidentielle au motif que l'article 28 de notre constitution le lui interdit. Que stipule, de façon explicite, cet article 28 sur lequel s'appuie Maître Lo Gourmo ? En voici les termes précis : "le président de la République est rééligible une seule fois".

1re remarque de style, cet important article prévoyant en toute logique une interdiction ou une limitation n'inclut aucune négation dans sa formulation. Ce qui le différencie de toutes les dispositions contenues dans les constitutions de référence limitant ou interdisant l'usage abusif des mandats présidentiels.

En ma qualité de juriste, j'ai toujours considéré que mes collègues, qui ont rédigé cet article, l'ont tout de même raté. J'avoue être frustré du défaut de termes juridiques appropriés et rigoureux dont cet article 28 est étrangement dépourvu face à l'enjeu d'une interdiction absolue d'exercer deux mandats présidentiels consécutifs ou non. En effet, cette phrase a comme sujet "le président de la République". Alors que l'adverbe "Nul" aurait été plus convenable parce que plus unanime et plus impersonnel. Or la disposition en cause ne vise que le président en exercice, cité de façon explicite. Posons-nous alors la question suivante. Qui est "rééligible une seule fois" ?

Uniquement le président de la République. C'est à lui, et lui seul, que s'adresse l'article 28. Ce qui exclut tout autre citoyen. Y compris les anciens présidents dont le citoyen Mohamed Abdel Aziz. Lequel est parfaitement en droit de postuler pour un 3e mandat non consécutif.

Cette possibilité pour un ancien président de postuler à un troisième mandat est prévue expressément dans plusieurs pays dont la France et le Sénégal. Qui ont toutefois pris soin d'insérer des dispositions d'une grande clarté.

En réalité, nos juristes chargés de rédiger la constitution ont commis de graves erreurs en négligeant, au-delà de l'esprit de la constitution, la lettre de celle-ci en ne s'entourant pas de suffisamment de bonnes règles d'usage pour une rédaction parfaite ne laissant l'ombre d'aucun doute sur leur réelle intention d'imposer une interdiction absolue à quiconque d'exercer plus de deux fois le mandat présidentiel. Ils auraient pu s'inspirer de la rédaction du 22e amendement de la constitution des États-Unis en vertu duquel "Nul ne pourra être élu à la présidence - de la République, (ajouté par moi-même pour encore plus de rigueur) - plus de deux fois."

Dans ce cas, le président de la République comme tout autre citoyen, y compris les anciens présidents sont compris dans l'adverbe "NUL" qui ferme la porte de manière définitive à toute personne d’être élu plus de deux fois comme président de la République.

Nos rédacteurs plus familiers du droit français auraient pu aussi s'inspirer de l'article 6 de la constitution française qui stipule que "Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs". En réalité, le constituant français n'a voulu limiter l'exercice des deux mandats que consécutivement pour éviter que trois mandats se suivent de maniere continue. Exactement, le cas de notre fameux article 28 si mal rédigé et ne concernant que le président en exercice auquel s'applique seul l'interdiction du 3e mandat consécutif. Était-ce leur volonté ? J'en doute.

Revenons à la candidature présumée du citoyen Ould Abdel Aziz. L'article 28 ne le concerne pas. Nous le répétons à nouveau. Il s'applique uniquement au président en exercice, comme Ould Abdel Aziz en 2019. En 2024, n'étant plus président en exercice, il pourrait parfaitement, si telle est son intention, devenir candidat à la présidence de la République.

Et je conclus ainsi pour donner plus de poids à l'adverbe "Nul" négligé à tort par les rédacteurs de l'article 28 et qui seul convenait à instituer une interdiction absolue d'exercer un 3e mandat présidentiel, peu importe qu'il soit consécutif ou pas.

Aucune disposition de la constitution actuelle, encore moins l'article 28, n'interdit à un ancien président de la République, et donc à Mohamed Ould Abdel Aziz d'être candidat à une élection présidentielle.





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Commentaires (6)

  • pyranha (H) 28/04/2024 01:19 X

    Avec les explications de Mr Béchir Fall mm celui qui n'a pas de notion de droit comprend aisément la justesse de son raisonnement très didactique et pédagogique. Fall Bechir est un intellectuel et professionnel de référence, dommage que les autorités de ce pays aient la malchance endémique de ne s'entourer que d'ignorants.

  • pyranha (H) 28/04/2024 01:13 X

    Buwuelm, vous avez parfaitement bien compris les enjeux qui se cachent derrière la position de Gourmo LO. Ce Mr l'avocat de l'état pour liquider Aziz, il serait tout à fait qu'il paradoxal qu'il soit juste pour intervenir en faveur de Aziz.De toute façon le constat de ce professionnel du droit qu'est Mr Fall Bechir est sans equivoque et indiscutable,comme le dit Buwuelm. Béchir juge cette affaire en toute impartialité et transparence. Lo Gourmo depuis qq temps perd toute crédibilité et c'est dommage.

  • soumas (H) 27/04/2024 12:41 X

    Cette lecture de la constitution n'est pas nouvelle, Jemal et un groupe de juristes avaient tenté de la vendre à aziz quand il hésitait à faire un troisième mandat ou pas. ils lui avaient conseillé de démissionner trois mois avant la fin de son mandat et alors il ne serait plus président et pourrat alors briguer un autre mandat. Je suis d'accord que cet article 28 aurait pu etre plus explicite mais l'esprit de la loi est que nul ne peut exercer plus de deux mandats sinon cette disposition serait inutile car tout président pourrait démissionner juste avant les élection et continuer ainsi à jouir de mandat à l'infini.

  • ELHAGHIGHA (H) 27/04/2024 12:06 X

    Maître Lo Gourmo tente d'appliquer son souhait venimeux contre l'ancien président Mohamed Abdel Aziz à un article constitutionnel qui n'a rien avoir cette nouvelle candidature de Ould Abdel Aziz.

  • mdmdlemine (H) 27/04/2024 12:06 X

    La constitution est vague et souffre par endroits de de fin en queue de poisson. Pour la problématique des deux mandats, il fallait écrire "le président est éligible une seule fois, successivement ou non". Donc très simple. Comme un intellectuel qui n'est pas du DROIT peut être plus clair que les juristes. fait paradoxal

  • Buwuelm (H) 26/04/2024 22:49 X

    Me Lo Gourmo fait souvent des erreurs d’appréciation, cela se remarque sur toutes ses sorties où il est question de l'ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz. L’avocat a un seul objectif : barrer la route, à celui qu’il déteste jusqu’aux os. Notons que G.L. a été l’avocat le plus déchainé contre MOAA, sa hantise, lors du procès dit « de la décennie ». Cet épisode passé ne lui suffit plus, et il voudrait voir O. Abdel Aziz « enterré ». Pour cela, le professeur Gourmo n’hésitera pas à sortir des écrits douteux pour justifier une mise à l’écart éventuelle de l’ex-président. Le professeur a sa stratégie, mais il a intérêt à méditer sur le cas Diomaye Faye du Sénégal : le séjour carcéral pourrait être salutaire pour Aziz, qui rêve de reprendre les rênes du pouvoir en Mauritanie. Ce sera quand ? Seul ALLAH le sait. M. LÔ ne s’imagine pas, un seul instant, devoir faire avec un adversaire politique de taille, pour le Président de l'UFP. M. Lô qui n’a qu’un rêve, celui d’éloigner celui qu’il considère comme un ennemi à abattre, ne lésinera pas sur tout ce qui peut créer le doute dans certains esprits non avisés : (Article 28). Ce monsieur Béchir, quant à lui, je l’ai connu à travers ses interventions très pertinentes, qui servent le plus souvent de repères, pour la plupart de ses followers. Cette mise au point survient à un moment crucial. Je fais confiance à M. Fall qui a toujours montré une certaine équidistance, entre sa pensée propre et le sens des textes juridiques, qui ont priorité. Le temps presse et je crois que d’autres juristes apporteront leurs contributions pour éclairer la lanterne des novices, dans le domaine juridique. Grâce à une bonne lecture des textes de la Constitution, les à-peu-près, ne doivent plus être servis au peuple.