13-06-2024 22:30 - Toutes les marques de thé consommé en Afrique de l’Ouest sont contaminées aux résidus de pesticides
Consommé depuis des siècles, le thé vert de Chine, servi dans de petits verres surmontés d’une épaisse couche de mousse blanche, appartient à un cérémonial qui rythme la vie de l’ensemble des foyers en Afrique de l’Ouest.
Convivialité et bonne humeur se conjuguent tout au long des trois services réglementaires. « Le premier thé est amer comme la vie, le deuxième est fort comme l’amour et le dernier suave comme la mort » (un proverbe Touarègue, selon Wikipedia).
Analyses de 2021
Suite à la détection, en 2021, de résidus d’aflatoxines dans la marque Achoura au Mali (toxines secrétées par la pourriture de la matière organique et considérées comme cancérigènes), le Collectif de Cadres Mauritaniens à l’Étranger (CCME) laçait une étude sur le thé consommé en Mauritanie. Vingt- huit thés ont été collectées et un échantillon de dix marques a été sélectionné dont cinq ont été choisies selon le critère de notoriété et 5 de façon aléatoire.
Les analyses, pour la recherche de résidus de pesticides, de fongicide et d’herbicides ont été confiées à un laboratoire européen accrédité par la COFRAC (Comité Français d’ACcréditation) et spécialisé dans ce type d’analyses (www.phytocontrol.com). Les marques analysées sont : ACHOURA, ATANIM, AZAWAD, DAWASS, DIAMANT, LEHCEYRA, MALIKA, OUMR ETWIL, RALLYE1 et SEVINET ESSAHRA.
Les résultats sont sans appel : les dix marques sont toutes contaminées. Etant donné le caractère aléatoire du tirage des échantillons analysés, il est autorisé de penser que l’ensemble des 28 marques de départ le furent aussi. Chaque marque contient au moins 13 contaminants dont, au moins, 3 dépassent la Limite Maximale de Résidu Autorisé (LMR).
Ces dépassements s’échelonnent entre 200 et 11000% de la LMR ! Les contaminants détectés dans le thé sont des molécules utilisées comme pesticides (traitement des culture et conservation). Ils sont soit cancérigènes, soit modificateurs endocrinien, soit neurotoxiques ou bien encore cytotoxiques.
Le tableau 1 : résultats des analyses effectuées par le CCME en 2021. Les valeurs dans les cases rouges correspondent aux pourcentages de la LMR qui ont dépassé 100%. La citation des noms de marques n’engage que la responsabilité de l’auteur de cette publication et non celle du CCME.
Analyse de 2024
En Mai de cette année 2024 (3 ans après la publication des résultats du CCME), l’auteur de cette publication (Mohamed BABA SAID, Professeur de Chimie à l’Université de Clermont Ferrand en France) décidait d’examiner de nouveau le niveau de contamination du thé en Mauritanie. Il faut faire remarquer que les marques de thé consommé en Mauritanie sont les mêmes que celles consommées dans l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest. Cette fois aussi 10 marques ont été choisies. Il s’agit de : BESMA, EVELLE, Thé 20/20, AL ASSIMA, AZALAY, YAMMA de Laspalmas, Al FAKHIR, EXTRA QUALITY, LEJWAD et AL JOUMHOUR.
La marque Yamma de Laspalmas provient d’Espagne et Al Fakhir de Ayoune du Sahara.
Le tableau 2 : résultats des analyses effectuées par l’auteur de cette publication en Mai 2024. Les valeurs dans les cases rouges correspondent aux pourcentages de la LMR qui ont dépassé 100%.
L’échantillon analysé est composé, là aussi, de 10 marques dont les deux venant d’Espagne et de Ayoune du Sahara. Les 8 autres marques ont été tirées au sort sur 60 marques au total.
Comme en 2021, toutes les marques analysées exhibent un niveau élevé de contamination. Aucune ne pourrait accéder au marché européen (la marque espagnole, Yemma, est en totale infraction par rapport à la réglementation européenne). Cinq pesticides dépassent la LMR dans l’ensemble des thés analysés.
Conclusion
Vingt de la soixantaine de marques de thés consommés en Mauritanie (et en Afrique de l’Ouest) dont 15 ont été tirées au sort, présentent un taux élevé de pesticides. On en conclut alors que l’ensemble du thé est contaminé. Ces pesticides sont dangereux pour la santé et opèrent par accumulation sur le long terme. Le thé est une boisson presque sacrée dans notre région.
Sa contamination est une catastrophe sanitaire pour tous les consommateurs de thé que nous sommes. Les autorités doivent se saisir de cette problématique et mettre en place, dans les plus brefs délais, un mécanisme de contrôle des produits alimentaires aux deux extrémités du circuit : un contrôle systématique au pays d’origine (Chine) qui interdise à toute marchandise non munie de certificat de bonne santé d’appareiller vers nos pays et un contrôle aléatoire aux entrées et au sein des marchés de nos pays.
Ce dernier contrôle doit être effectué par une Autorité Indépendante et Irrévocable dotée de moyens humains (techniciens) et matériels (laboratoires) qui lui permettent d’assurer sa tâche convenablement.
Pr Mohamed BABA SAID
Liens :
1- Lien de la vidéo sur le sujet : https://fb.watch/sEmRG-JEta/